Se soigner sans médecin, bonne ou mauvaise idée ?

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Publié le 19/11/2016 par TRD_import_DelphineDauvergne ,
Manque de temps, d’argent, de confiance envers les praticiens… Chacun a ses raisons de se soigner sans aller chez le médecin. Mais est-ce bien prudent de chercher des conseils pour votre santé sur Internet sans aller voir un(e) professionnel(le) ?

Nolwenn est enrhumée. Son réflexe : aller à la pharmacie avec sa liste de médicaments. Doliprane, pastilles, sirop… « Je me soigne par moi-même, je n’aime pas aller chez le médecin généraliste, je ne m’y sens pas rassurée », témoigne cette étudiante en première année de licence social et santé à l’université Bretagne-Sud.

Une façon d’être autonome

« L’une des raisons de l’automédication est de manifester son autonomie , de signifier que l’on se prend en charge. Beaucoup de personnes préfèrent aussi faire confiance à leur propre expertise car ils ont été déçus par un professionnel de santé « , constate Sylvie Fainzang, anthropologue, auteure du livre « L’automédication ou les mirages de l’autonomie ».

Moins dépenser de temps… et d’argent

Plus d’un tiers des étudiants français pratiquent l’automédication, et presque la moitié pour les lycéens, selon une étude de la mutuelle Smerep publiée en juin 2016. La principale raison : le coût.  » Beaucoup de jeunes renoncent aux soins pour des raisons financières. De nombreux médicaments ne sont pas remboursés et ils ne voient pas l’utilité d’ aller voir le médecin pour une telle prescription , pour eux c’est une perte de temps et d’argent « , remarque Sylvie Fainzang.

Kévin, 22 ans, étudiant en M2 droit de l’économie sociale et solidaire à Limoges, est dans cette situation. « Après avoir été enrhumé pendant plus d’un mois je me suis résolu à aller voir un médecin, mais il m’a seulement prescrit une boîte de doliprane et des médicaments non remboursés ». Il préfère économiser en temps et en argent, en se rendant à la pharmacie située à dix minutes de chez lui. Car quand on cumule études et job, pas toujours facile de caser un rendez-vous médical.

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N’ayez pas peur, les médecins peuvent être sympas… // © Fox_

Ne pas faire trop confiance à Internet

 » Les jeunes se servent dans la pharmacie familiale , demandent des conseils à leurs proches ou à leur pharmacien. Ils recourent beaucoup à Internet pour s’auto-diagnostiquer sur des forums… où des personnes partagent les mêmes symptômes », alerte Sylvie Fainzang.

« Est-ce que c’est normal d’avoir des pertes blanches ?« , « Est-ce que c’est normal de saigner après un rapport ?« , sont les deux premières suggestions de Google en tapant le début de la question. Les interrogations liées à la gynécologie sont les plus présentes sur Internet , par pudeur, mais aussi car le coût d’une consultation d’un gynécologue est souvent élevé. Si ils peuvent parfois vous aiguiller vers la source de votre problème, les sites Internet comme Doctissimo ne sont cependant pas des sources 100 % fiables (on vous conseille cependant le site Web du gynécologue Martin Winckler).

Connaître ses limites

Gynécologue, dentiste, ophtalmo…  » Pour les spécialistes, on est obligés de s’y rendre. Je ne peux pas remplacer mon orthodontiste ! », admet Kévin. Il connaît aussi les limites de ses propres diagnostics : « Quand quelque chose que je ne connais pas dure trop longtemps, je me résous à voir un médecin ».

Même chose pour Nolwenn. « En juin dernier, j’ai eu une grosse douleur au ventre, j’ai pensé d’abord être constipée, mais ça continuait, alors je suis allée aux urgences. Je faisais en fait de l’aérophagie à cause du stress lié à ma soutenance de stage« , raconte la jeune fille de 19 ans.

Des risques à ne pas ignorer

Sylvie Fainzang concède que  » l’automédication peut être pratiquée de manière raisonnée , mais il est risqué d’y recourir systématiquement, notamment à cause des médicaments non compatibles entre eux ». Faites donc attention à ne pas faire de cocktails explosifs !

Selon elle, l’automédication est pratiquée « surtout pour la sphère ORL (rhume, bronchite…), mais aussi pour les psychotropes. Les antidépresseurs sont pris comme des hypnotiques par les jeunes qui ont des difficultés à dormir. » À long terme, cela peut devenir une drogue ou avoir des conséquences sur votre mémoire et votre concentration.

 » En étant son propre médecin, l’étudiant n’a pas de recul sur sa situation. Un rhume qui dure un mois peut être symptomatique de quelque chose de plus important », met en garde Pierre Faivre, chargé de prévention à la Smerep. Donc l’automédication, à pratiquer avec modération !

Vous vous êtes déjà soigné par vous-même, sans consulter un professionnel de santé ? Partagez votre avis et vos réactions dans les commentaires sous l’article !