Natoo, Cyprien, EnjoyPhoenix… les rockstars de la génération ultra-connectée

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Publié le 24/06/2016 par TRD_import_Jean-SébastienLétang ,
Avec leurs millions de vues sur leurs vidéos, les Youtubeurs sont aussi populaires que des rockstars chez les 10-25 ans. Une célébrité qui tient à trois ingrédients : originalité, authenticité et proximité avec le public.

En 2014, le magazine américain « Variety » demandait à 1.500 ados de 13 à 18 ans quelles étaient leurs personnalités préférées. Parmi les cinq noms arrivés en tête, on ne trouvait ni Beyoncé ni Barack Obama, mais seulement des personnes devenues célèbres en postant des vidéos sur YouTube. En France aussi, les « Youtubeurs » ont le vent en poupe, et certains de ces jeunes vidéastes n’ont plus grand chose à envier au show-business. La chaîne humoristique de Cyprien, le numéro 1 en France, est suivie par près de 9 millions de fans. De son côté, Squeezie rassemble plus de 6 millions d’abonnés avec ses podcasts de jeux vidéo. Et chez les filles, c’est Marie Lopez, alias EnjoyPhoenix, qui tient le haut du pavé avec des vidéos sur le maquillage ou la cuisine, vues des millions de fois. De vraies stars de la génération Y que marques et médias s’arrachent.

Les réseaux sociaux pour entretenir les liens avec les fans

Pour Caroline, alias BeautéActive, qui réalise des vidéos consacrées à la beauté et à la mode sur Youtube, le succès vient de la proximité qu’entretiennent les vidéastes avec le public. « Pour ma part, je suis très à l’écoute de mes abonnés et je m’adapte constamment pour leur proposer du contenu qui les intéresse », souligne-t-elle. Celle que ses 173 millions de vues n’empêchent pas de se décrire « comme une fille complètement banale qui fait des vidéos sur Internet » communique également beaucoup via les réseaux sociaux. Pour elle, cette présence sur Twitter, Facebook ou Instagram est « une grande force car aujourd’hui, tous les jeunes sont constamment collés à leur téléphone. Les personnes qui nous suivent ont réellement l’impression d’être très proches de nous. »

Meggie, 21 ans, est fan d’une autre vidéaste, l’humoriste Natoo, membre du Studio Bagel, et a créé son fanclub. La jeune fille décrit des Youtubeurs « plus abordables » que les stars du ciné ou de la musique, ajoutant que « chaque année on peut avoir la chance de les rencontrer lors de grands salons, comme la Paris Games Week ou La Vidéo City ». Lors de ces rendez-vous, qui rassemblent des milliers de fans, chaque intervention d’un vidéaste célèbre suscite l’engouement de la foule.

Au-delà du lien affectif, ces jeunes créateurs possèdent également une liberté de ton que n’ont pas forcément leurs aînés. Un fait souligné par César Le Messager, président et cofondateur de la NeoCast, un salon qui réunit des Youtubeurs et leurs fans à Strasbourg. Pour lui, « leur façon de traiter chaque sujet est complètement libre, il n’y a plus de contraintes financières ni éditoriales ». Et si le contenu est original, c’est parce que « ce sont des personnes qui font ça par passion, se sont lancées en prenant le risque de faire quelque chose qui ne marche pas forcément ». C’est cette authenticité qu’apprécie Noëllie, 16 ans, fan de Mathieu Sommet, d’Antoine Daniel et de Fred, alias le Joueur du Grenier : « Le fait que les Youtubeurs soient moins connus que les chanteurs ou les acteurs les rend plus libres dans le choix des thèmes qu’ils souhaitent aborder. »

De jeunes vidéastes qui ressemblent à leur public

Pour les ados et les plus jeunes, les Youtubeurs ont également un argument en leur faveur : l’âge, les plus vieux ayant à peine 30 ans. « Ce sont des jeunes qui ont monté ce système, il y a un vrai principe d’identification avec le public », affirme César Le Messager. « Ils ont commencé dans leur chambre par passion, et c’est quelque chose qu’ils arrivent à véhiculer dans leurs vidéos. » Si certains sont devenus célèbres, les vidéastes cultivent leur image de personnes abordables et se tiennent loin des phénomènes de déification. Lors de sa convention, César a observé chez les fans « du respect, de l’admiration devant une personne suivie par des millions de spectateurs », mais, selon lui, « il n’y a pas la peur d’aller les voir, de poser des questions, de demander une dédicace ». Il décrit également les vocations que les Youtubeurs créent chez les ados, beaucoup d’entre eux voulant maintenant se lancer sur la plateforme de vidéos : « Les visiteurs de la Neocast viennent également pour trouver de l’inspiration auprès des Youtubeurs, pour échanger, pour leur poser des questions sur comment monter une bonne vidéo, avec quels logiciels etc. »

Les professionnels d’un nouveau média : Youtube

Grâce à cet engouement, le milieu des vidéastes se professionnalise petit à petit, avec des salaires qui peuvent parfois monter très haut. D’ailleurs, Caroline « pense de plus en plus à (s)’entourer de professionnels, notamment pour la réalisation de courts métrages et n’écarte pas le fait de (se) professionnaliser encore plus dans le futur ». Pourtant, certains tenants du show-business voient les Youtubeurs comme des amateurs pas très sérieux et voudraient les orienter vers des médias traditionnels comme la télévision ou le cinéma. Une récupération qui pourrait écorner cette originalité et cette authenticité si appréciées du public. « Ce qui est sur Internet reste sur Internet », explique Julie, 16 ans, fan de ‘Salut les Geeks’, l’émission de Mathieu Sommet. Elle n’apprécie pas les apparitions de plus en plus fréquentes de Cyprien ou de Norman dans les médias : « Pour moi, ils deviennent des personnalités banales. Ils sont moins accessibles et moins proches de leurs fans qu’au début. » Selon César Le Messager, les vidéastes n’ont plus besoin de changer de support pour gagner en popularité : « Aujourd’hui, la tendance n’est plus d’aller vers la télé ou le cinéma. » Lui voit Youtube à la fois « comme un média à part entière et un nouveau mouvement culturel ». D’ailleurs, « ceux qui créent sur cette plateforme réussissent plutôt bien : ils ont la popularité et une audience fidèle ». Mais la plupart de ces stars d’Internet ont débuté leur carrière il n’y a même pas dix ans, il n’y a plus qu’à observer comment elles vieilliront avec leur public.