Marre d’être traité(e) de flemmard(e) ?

No thumbnail
Publié le 27/03/2015 par TRD_import_MariaPoblete ,
Chaque trimestre vos bulletins sont remplis de "Ne travaille pas assez", "Pourrait mieux faire", "Se laisse vivre"... Vous ne supportez plus ces appr eciations et vous avez decide de vous sortir de cette situation. Nos conseils pour vous aider a en finir avec cette reputation.

« J’ai traversé les années de collège et lycée dans la peau d’un gros paresseux, j’ai eu des périodes catastrophiques. L’école était une angoisse terrible. Certains cours m’ont traumatisé parce que je ne voulais faire aucun effort, je me calais au fond de la classe, puis au fond de mon siège. À la maison, c’était pareil, mes parents criaient parce que je n’aidais pas, je me levais à 14 heures le dimanche et je passais mes journées affalé sur mon lit à rêvasser… J’ai dû réapprendre à me lever le matin, réapprendre à apprendre. »

Difficile d’imaginer l’adolescence de Valentin, qui est aujourd’hui, à 20 ans, en classe prépa à l’École municipale des beaux-arts à Gennevilliers (92), et s’apprête à boucler ses dossiers de candidature aux plus prestigieuses écoles d’art. « J’étais très flemmard et je me confortais dans cet état. Quelque part, ça m’arrangeait, même si je me suis beaucoup ennuyé ! En plus, je me sentais exclu, sans compter les remontées de bretelles des profs, qui n’ont cessé de répéter que je végétais en dessous de mes capacités ! »

Faites un effort pour vous remobiliser

Valentin a eu un déclic en classe de terminale. « Le stress du bac m’a sauvé ! assure-t-il. La paresse entraîne un manque de travail et on se ferme à toutes les possibilités. Maintenant que j’ai eu la chance d’avoir été admis dans cette prépa, je ne compte pas mes heures, mes nuits courtes pour terminer des travaux. C’est l’intérêt aux choses qui permet de se mettre en mouvement… même si, c’est clair, je trouve que le paresseux, l’animal, est mignon et son mode de vie sympa… »

Comme Valentin, Mathieu, 19 ans, étudiant à Prépart à Paris – une classe préparatoire à l’entrée aux écoles d’art –, pense que la motivation est le seul remède à la paresse.  » Je conseille aux lycéens de prendre ce qu’il y a de bon dans quelques matières, puis de faire un petit effort pendant un petit moment, la satisfaction et les résultats viendront. Et automatiquement on a envie d’en faire plus. C’est dur au début, mais on se sent tellement mieux après ! »

Remobiliser et remotiver, c’est le travail de Julie Casa, coach en orientation pour lycéens. « Sans objectif, il est difficile de ne pas se laisser aller à une forme de dilettantisme, surtout à un âge compliqué qui fatigue physiquement, explique la coach. Travailler sur l’orientation, le projet personnel en envoyant le jeune faire une enquête professionnelle, par exemple, est une piste intéressante. Cela peut être une demi-journée dans une entreprise, un entretien avec un salarié. Cette démarche permet de voir plus loin que le cours de français ou d’histoire et d’envisager de se projeter dans un avenir proche. » Encore faut-il accepter de consulter pour flemmardise aiguë !

Acceptez de vous faire aider

Élisa, 19 ans, était étiquetée « cossarde ». Aujourd’hui en L1 (première année de licence) de sociologie à l’université Lumière-Lyon 2, elle a attendu la fin de la seconde pour oser parler de SON problème. Elle se souvient : « Je passais pour une glandeuse, incapable du moindre effort, j’avais des sales notes et des commentaires assassins ; en plus, à l’époque, j’étais en surpoids, je cumulais les clichés. En obtenant quand même mon passage en première L, j’ai osé demander de l’aide. Si mes résultats étaient moyens, c’est parce que j’avais besoin d’être guidée. Mes parents ont été super, une étudiante est venue deux fois par semaine à la maison, histoire de combler mes lacunes. Depuis l’obtention de mon bac, je ne suis plus traitée de flemmarde, et pour cause, je ne l’étais pas ! »

C’est l’accumulation de plusieurs échecs qui a déclenché une réaction chez Mathieu et l’a fait se décider « à en parler ». « Plus on rate, moins on fait d’efforts, et plus on est catalogué. Moi, je suis allé voir le CPE [conseiller principal d’éducation] que j’aimais bien. Il avait compris que mes retards et mes notes étaient liés à un truc plus profond. Il a réussi à me trouver une place dans l’étude surveillée, parce que mes parents n’avaient pas les moyens de me payer des cours particuliers. Quand ça ne va pas, il faut trouver les bonnes personnes qui vont nous soutenir. Il y en a toujours. »

Organisez-vous pour pouvoir anticiper

Et lorsque le contrat est signé, il faut s’y tenir et ne pas se décourager. « Les objectifs doivent être réalistes, souligne Julie Casa, ils devront tenir compte des particularités de chacun, avec des plannings sur une journée, une soirée, une semaine, un mois, et révisables à tout moment, sinon gare au stress supplémentaire. »

Ce que confirme Mathieu : « J’ai commencé à me bouger en philo parce que ça m’intéressait. Je me souviens d’une dissertation que j’avais commencé à écrire cinq jours avant de la rendre, au lieu de la veille au soir. Avant, je me posais trop de questions avant de commencer. En fait, j’avais peur de rater. Depuis je m’organise, je prends de l’avance. Je perds moins de temps et j’essaie de maintenir un effort. »

Claire, 17 ans, en première ES au lycée Sophie-Germain à Paris, a aussi compris, mais à ses dépens, qu’ elle s’épuisait à remettre à plus tard, à attendre que les idées tombent du ciel et que les exercices de maths soient résolus : « Après la seconde, j’ai voulu me secouer. Du coup, j’ai eu une période de gros stress à la rentrée, et en février, j’étais épuisée, j’en suis tombée malade avec des rhumes à répétition. »

Prenez conscience de votre valeur

« Les adolescents vivent des moments de grande solitude et subissent souvent une forte pression parentale. Certains tiennent bon, d’autres lâchent, analyse Marie Gilbert, pédopsychiatre au CHU de Nîmes. Après avoir compris pourquoi ils sont là, en cours, au lycée, quelle est leur place d’élève, on peut les aider à hiérarchiser leurs priorités, à remonter, par exemple, une ou deux moyennes, à ne pas les laisser croire qu’ils feront des miracles du jour au lendemain. Le travail avance toujours progressivement, par étapes et sans à-coups. » Il convient alors aux parents de prendre conscience de ces progrès et de féliciter chaque pas en avant.

Lucile, 14 ans, en troisième au collège Charles-de-Gaulle à Fameck (57), a réclamé des encouragements : « Un jour, ma psy m’a demandé si, au vu des efforts que je produisais, on me félicitait à la maison, raconte-t-elle. Comme ce n’était pas évident, j’ai fait comprendre à ma mère et à mon père que même si je n’arrivais pas au sommet, j’étais moins paresseuse et que c’était pas mal… » Résultat : le regard sur elle commence à changer, d’où une meilleure estime de sa personne.

« Tous les êtres humains ont besoin d’un retour positif après un effort, c’est normal, affirme Marie Gilbert, pédopsychiatre. Passer d’une moyenne de 7/20 à 8/20, terminer un travail pénible… sont des événements pour des jeunes qui n’y arrivaient pas du tout. Sans encouragements, ils seraient tentés de ne faire aucun effort et de laisser tomber. »

Et vous également, vous avez le droit de vous accorder, en votre for intérieur, les félicitations du jury. Comme Lucie, 21 ans, en BTS comptabilité au lycée Levavasseur à Saint-Denis (La Réunion) : « Après avoir été une vraie cossarde, avec un bac STMG [sciences et technologies du management et de la gestion] obtenu au rattrapage à 19 ans, j’ai pris conscience de ma valeur. Je suis heureuse d’être arrivée à continuer des études supérieures, j’ai ma petite reconnaissance personnelle, je suis fière de moi ! »

Distinguez la paresse des troubles du comportement

Selon Anne Gramond, pédopsychiatre au CHU de Nîmes, et auteure de « J’aide mon enfant à faire ses devoirs » aux Éditions Eyrolles, si une tendance à la paresse est normale chez les adolescents, il faut faire attention à ce que cela ne cache pas un trouble du comportement.

« La paresse, ou ce qui s’y apparente, est souvent liée à la période de l’adolescence. Un jeune de cet âge peut avoir tendance à passer du temps dans sa chambre, à avoir moins d’appétence au travail scolaire, à être de mauvaise humeur et irritable avec ses parents. Tout ceci est normal. Lorsque ce mouvement de type dépressif dure longtemps, que l’ado est maussade avec tout le monde, y compris ses copains, alors il me semble nécessaire d’y prêter attention plus sérieusement. Cela signifie peut-être qu’il se sent vraiment découragé. Que se passe-t-il en cours, au lycée ? N’aurait-il pas échappé à un diagnostic de trouble spécifique des apprentissages tels que la dyslexie par exemple ? N’a-t-il pas un problème lié à la consommation de cannabis ? Si cela dure et que l’entourage s’inquiète, il faut aller plus loin et chercher à comprendre cette démotivation subite. La première étape est de consulter un professionnel, le médecin de famille ou un psychologue. »