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Bac STMG 2015 : corrigé d'un sujet d'économie-droit (partie économique)

Par Sophie de Tarlé, mis à jour le 27 janvier 2015
1 min

Auteur : Jean-Pierre Broutin, auteur des annales Tout-en-un bac STMG – Sujets et corrigés, édition 2014, Hachette Éducation 

Partie économique 

A. Questions méthodologiques

1. Distinguez les notions de chômage structurel et conjoncturel.

On parle de chômage conjoncturel pour décrire un chômage lié à un ralentissement de l’activité économique (par insuffisance de la demande ou/et de l'activité économique), mais on parle de chômage structurel pour décrire l'inadéquation des offres et des demandes d'emploi (par manque de flexibilité ou de mobilité).

2. Présentez l'évolution du chômage (évolution globale et par catégories de chômeurs).

Le candidat devra prouver sa capacité à faire la synthèse de plusieurs documents.

Le chômage est à la hausse : de 2 % dans les années 1970, il a augmenté régulièrement pour arriver à presque 10 % (9,2 %).

Début 2014, il atteint les records de 1997, avec plus de 3 millions de chômeurs.

Aucune région n'est épargnée.

Les plus frappés sont :

– Les plus de 50 ans : presque 1 million ; un chiffre qui a doublé en cinq ans.

– Les jeunes (25,7 % du total) : en augmentation de 50 % en cinq ans.

– Les contrats précaires (CDD et intérims), qui représentent 30 % des chômeurs.

De plus, la part du chômage de longue durée est importante : 39,9 %.

3. Présentez les évolutions de l'emploi depuis la crise de 2008.

Avec la crise, les entreprises ont supprimé 187.000 postes en 2008 et 334.000 en 2009, mais les employeurs ont limité les dégâts sociaux en recourant au chômage partiel et en voulant garder des personnels compétents.

Si les CDI sont relativement épargnés, les contrats précaires ont lourdement chuté (de 670.000 en 2008 à 440.000 en 2009). En 2011, les CDD représentaient 81 % des embauches, mais pour des durées très courtes (moins d'un mois, voire d'une semaine).

Les licenciements économiques sont plutôt rares, car les employeurs utilisent d'autres moyens pour se séparer de leurs personnels : licenciements pour faute personnelle (+ 60 % entre 1998 et 2008) ou rupture conventionnelle (par accord amiable).

4. Présentez le traitement social du chômage et dégagez les reproches faits à l'action du gouvernement.

Le gouvernement utilise trois instruments :

– Les emplois d'avenir pour des jeunes sans qualification de banlieues défavorisées ou de campagnes désertées.

– Les contrats de génération qui lient jeunes et seniors pendant trois ans.

– La sécurisation de l'emploi (flexi-sécurité).

Avec une croissance molle, pas de perspectives de relance, le gouvernement aura des difficultés à respecter ses objectifs, car les employeurs ne se précipitent pas sur les dispositifs.

De plus, la hausse des prélèvements obligatoires freine la consommation des ménages.

Le manque de flexibilité décourage d'embaucher en CDI. Enfin, la qualité de l'enseignement se dégrade, diminuant l'employabilité des jeunes.

B. Question analytique

Présentez les arguments qui permettent de répondre à la question suivante : pourquoi peut-on dire que le marché du travail est un marché spécifique par rapport aux autres marchés de biens et de services ?

Le marché du travail est le lieu de rencontre des employeurs qui demandent des travailleurs et ces derniers qui offrent leur force de travail, leurs capacités. Le marché du travail fonctionne avec un bien particulier : le travail. La question se penche donc sur les différences entre le fonctionnement du marché du travail avec son bien particulier (le travail) et un marché de marchandises « normal ».

I. Le marché du travail n'est pas homogène

1. C'est un marché cloisonné

Le marché du travail est cloisonné au niveau :

– Des qualifications : les travailleurs sont plus ou moins qualifiés et les emplois demandent certaines qualifications. Les compétences ne se valent pas toutes, et ne sont pas interchangeables.

– De l'expérience : on demande souvent aux jeunes un minimum d'expérience, ce qu'ils n'ont pas au départ.

– Géographique : il y a plus d'emplois proposés dans des zones urbaines très peuplées (Paris, Lyon, Marseille…) que dans les campagnes.

2. C'est un marché segmenté

On distingue :

– Les travailleurs qui ont un emploi stable (en CDI) et les précaires (CDD ou intérim).

– Les travailleurs qualifiés (recherchés) et les non ou peu qualifiés (les principaux chômeurs, car les entreprises préfèrent mécaniser l'emploi).

– Les travailleurs du privé (plus exposés au chômage) et ceux du public (qui ont la garantie de l'emploi).

II. Les offres et les demandes d'emploi ne s'ajustent pas parfaitement

1. La demande

Elle provient des entreprises du privé (cela dépend de la situation économique) ou du public (cela dépend du rôle que veulent jouer les pouvoirs publics, en relançant l'activité par exemple). Elle dépend aussi des incitations ou des contraintes du Code du travail.

2. L'offre de travail

Elle provient de la population active (personnes en âge de travailler et qui ont un emploi ou en cherchent un). Cette population évolue selon le taux de natalité, les flux migratoires, mais aussi selon la conjoncture (la reprise attire de nouveaux actifs) ou la réglementation.

3. Le difficile ajustement de l'offre et de la demande

L'employeur doit choisir entre coût et production supplémentaire. Pour l'entreprise, qui recherche le profit, le travailleur représente un coût, en raison du salaire à verser. Pour le travailleur, ce salaire est un revenu destiné à satisfaire des besoins (les siens et ceux de sa famille). Son montant est donc un compromis entre le salarié qui recherche un pouvoir d’achat et l’employeur qui recherche un bénéfice et la pérennité de son entreprise. L'employeur fixe les rémunérations, en respectant les réglementations en vigueur. La rigidité à la baisse des salaires (existence d’un salaire minimum) peut dans certains cas constituer un obstacle à l'ajustement des offres et des demandes de travail. Ainsi, les employeurs pourraient être tentés de substituer du capital au travail si le prix du travail est trop élevé.

III. Le marché du travail manque de transparence et de fluidité

1. Le manque de transparence

Les salariés, comme les employeurs, ne sont pas toujours au courant de toutes les offres et demandes d'emploi : certains employeurs ne déclarent pas leurs offres à Pôle emploi, préférant la cooptation ou les petites annonces. De plus, des entreprises ont des intranets. Les salariés ne sont pas au courant des demandes sur la France entière.

2. Un marché peu fluide

Les travailleurs peuvent être peu mobiles.

Il leur est souvent difficile de changer d'emploi (qualification non adaptée qui demande une formation pour la reconversion). Pour devenir fonctionnaire, il faut passer des concours. L'employeur doit respecter des règles pour embaucher ou licencier (ex. : verser des indemnités de licenciement, ce qui est coûteux).

Conclusion

Le marché du travail est particulier, car étant cloisonné et segmenté, il n'est pas homogène. De plus, les offres et les demandes de travail ne s'ajustent pas parfaitement. Faut-il plus libéraliser le travail, comme on a libéralisé le marché des biens et services pour résorber le chômage ?

Documents


Annexe 1 : Le chômage a atteint un nouveau record et dépasse les 3,2 millions de personnes inscrites à Pôle emploi

Le record en matière de chômage, qui datait de janvier 1997, juste avant l'arrivée de Lionel Jospin à Matignon, aura été battu sous François Hollande un an après son élection. La France compte 3 224 600 demandeurs d'emploi inscrits en catégorie A à Pôle emploi fin mars, soit 36 900 de plus qu'un mois plus tôt et 29 100 de plus qu'en janvier 1997. Cette hausse, la 23e d'affilée, porte à 321 900 le nombre de chômeurs depuis le début du quinquennat de François Hollande. Soit 40 % de la hausse enregistrée sous Nicolas Sarkozy entre 2007 et 2012.
« Tous les leviers de la politique de l'emploi sont désormais opérationnels : emplois d'avenir, contrat de génération, sécurisation de l'emploi, assure Michel Sapin, le ministre du Travail. Leur montée en puissance est désormais l'enjeu majeur. »
La meilleure preuve est le démarrage poussif des emplois d'avenir, réservés aux jeunes sans qualification de banlieues défavorisées ou de campagnes désertées. Cinq mois après leur lancement, fin mars, seuls 10 000 avaient trouvés preneurs, avec un rythme trop lent pour tenir l'objectif de fin d'année.
Même sentiment de flottement pour les contrats de génération, ce dispositif qui lie pendant trois ans l'embauche d'un jeune au maintien dans l'emploi d'un senior à coup d'exonérations de charges. François Hollande en escompte 500 000 sur son quinquennat, mais les premières remontées montrent que les entreprises ne se ruent pas dessus. Faute de perspective stable de reprise économique, la frilosité l'emporte, et les employeurs préfèrent différer leurs recrutements, voire tailler dans leurs effectifs.
Pierre Moscovici, le ministre de l'Économie et des Finances, reconnaît que la France ne sera pas en mesure de recréer des emplois avant 2015. Une croissance quasi nulle associée à des dispositions étatiques du traitement social du chômage qui tardent à trouver preneurs a pour conséquence une hausse du nombre des demandeurs d'emploi de 27 000 par mois.

Source : Le Figaro du 26 mars 2013.

Annexe 2 : Évolution du chômage de 2008 à 2013

Annexe2

Source : Le Nouvel Observateur du 25 avril 2013.


Annexe 3 : Les cinq plaies du chômage français

– 780 100 jeunes de moins de 25 ans inscrits à Pôle emploi dans les catégories A, B, C.
Le nombre de jeunes au chômage a explosé depuis le début de la crise : +50 % en cinq ans. Leur taux de chômage atteint désormais 25,7 %.
– 978 200 seniors de plus de 50 ans inscrits à Pôle emploi dans les catégories A, B, C.
La progression du nombre de seniors au chômage est encore plus impressionnante : +101 % en cinq ans, le double de l'évolution enregistrée toutes classes d'âge confondues.
– 39,9 % de chômeurs de longue durée.
Leur part a progressé de 7,6 points en cinq ans. Un demi-million, soit un petit tiers, sont sans emploi depuis plus de trois ans.
– 150 000 entrées chaque mois à Pôle emploi après la fin de CDD ou de mission d'intérim.
Les pouvoirs publics se focalisent sur les travailleurs en CDI victimes d'un plan social, mais ils ne représentent qu'entre 2,5 et 3 % des inscriptions à Pôle emploi, contre plus de 30 % pour les fins de contrats précaires.
– 214 800 offres d'emploi collectées tous les mois par Pôle emploi.
Ce nombre est en chute libre : -18,5 % sur un an. Il a reculé de 30 % depuis le début de la crise de 2008. Tout comme celui des offres satisfaites, qui s'est replié sous la barre des 200 000 par mois (-20,3 % sur un an).

Source : Le Figaro du 26 mars 2013.


Annexe 4 : le marché du travail manque-t-il de flexibilité ?

Pour Laurence Parisot, la patronne du Medef, « il est temps de détabouïser le mot de flexibilité […] l'incertitude judiciaire [liée aux licenciements] augmente implicitement le coût du travail et désincite les entreprises à embaucher. » Est-ce si sûr ?
Le droit social français n'a pas empêché les entreprises de contracter leurs effectifs au plus fort de la crise : 187 000 postes ont été détruits en 2008 et 334 000 en 2009, soit les pertes les plus lourdes enregistrées depuis quarante ans. Certes, cela aurait pu être pire… Confrontés à la chute de leurs carnets de commandes, de nombreux employeurs se sont efforcés de leur plein gré de limiter les dégâts sociaux, quitte pour cela à recourir au chômage partiel. Pas par charité, mais afin de préserver les collectifs de travail et garder en interne des compétences qu'ils auraient eu du mal à retrouver le jour où il aurait fallu embaucher à nouveau. Dans l'ensemble, les salariés en contrat à durée indéterminée ont été relativement épargnés.

Les précaires, variable d'ajustement
Le nombre d'intérimaires a dégringolé de 670 000 début 2008 à 440 000 un an plus tard. Les salariés en contrat à durée déterminée ont subi un sort similaire. Or, le recours à l'intérim a beaucoup augmenté depuis le début des années 1990. De même, la part des CDD dans les embauches atteignait 81 % en 2011, son plus haut niveau depuis dix ans. Et les contrats très courts ont tendance à se multiplier : ceux de moins d'un mois ont augmenté de 88 % entre 2000 et 2010 et ceux de moins d'une semaine de 120 % sur la même période.
Malgré cette part croissante de l'emploi précaire, la majorité des salariés a toujours un statut stable : 86 % d'entre eux sont en CDI. C'est donc un marché du travail à deux visages qui se dessine : ceux qui subissent les aléas de la conjoncture et ceux qui restent accrochés tant bien que mal à leur CDI…

Les CDI pas à l'abri
Car CDI ne rime pas avec emploi à vie. Les employeurs ont en effet toute une panoplie à leur disposition pour se séparer de leurs salariés s'ils le souhaitent. L'option la plus connue est le licenciement économique, qui s'accompagne parfois de la mise en œuvre d'un plan social (ou « plan de sauvegarde de l'emploi »). Seules les entreprises de plus de 50 salariés qui licencient au moins 10 personnes sur une période de trente jours sont contraintes d'y recourir. En décembre 2012, les licenciements économiques, à la fois individuels et collectifs, ne représentaient que 2,7 % des motifs d'inscription à Pôle emploi. Refroidis par la lourdeur et la lenteur des procédures à mettre en place et effrayés par la perspective de voir un juge annuler un dispositif qu'ils ont mis des mois à négocier, les employeurs privilégient d'autres moyens pour se séparer de leurs salariés. Et pour cela, ils ont l'embarras du choix.
La procédure de licenciement pour motif personnel, par exemple, est assez simple. Le nombre de personnes inscrites à Pôle emploi après avoir été licenciées de cette manière a d'ailleurs explosé en dix ans (+60 % entre janvier 1998 et janvier 2008). À cela s'ajoute la possibilité offerte depuis 2008 de rompre le contrat de travail à l'amiable. Ce dispositif, appelé « rupture conventionnelle », a connu un succès impressionnant depuis sa création. Car, d'un côté, il offre au salarié une indemnité et des droits à l'assurance chômage, ce dont il ne bénéficie pas s'il démissionne. Et, de l'autre, il permet à l'employeur de se prémunir contre tout risque de recours en justice.

Laurent Jeanneau
Source : Alternatives économiques, hors-série n° 096, février 2013.

Sujet corrigé d'éco-droit : la partie juridique.

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