Par :
Mathilde Grandadam-Nicot, François Fromont, Vianney Loriquet
Publié le 15.05.2025
Le logement représente la moitié des dépenses d'un étudiant selon l'Unef en 2024, un quart des dépenses d'un ménage de moins de 25 ans* selon l'Insee en 2017. Dans un contexte de concentration des étudiants dans des villes où les logements sont toujours plus chers et toujours plus difficiles à trouver, la rédaction de l'Etudiant a décidé de s'intéresser à cette problématique. Le baromètre répartit les 47 villes de plus de 8.000 étudiants en 4 catégories (de A à D) selon un ensemble de critères à retrouver ci-dessous.
C'est le Logiscore : plus il est élevé, moins il est complexe pour un étudiant de trouver à se loger pour un prix attractif dans la ville concernée. Au contraire, s'il est faible, cela signifie que le marché du logement, notamment étudiant, est particulièrement tendu dans cette ville. Les initiatives des collectivités pour faciliter l'accès à un logement digne et abordable, pour aider dans leurs recherches les étudiants sans domicile ou pour leur trouver une solution de logement d'urgence ont été étudiées.
*Les étudiants représentent une part non négligeable de cette population : 79% des jeunes de 18 ans sont étudiants, 45% des jeunes de 21 ans et 12% des jeunes de 25 ans.
Les villes les moins bien notées dans notre Logiscore sont généralement des métropoles congestionnées caractérisées par une forte pression sur le parc diffus (Paris, Lyon, Bordeaux, Strasbourg) et des villes touristiques ou du littoral caractérisées par une forte proportion de résidences secondaires (Nice, Vannes, Annecy...). La carte ci-dessous illustre bien la tendance évoquée précédemment. Le Logiscore des villes est représenté par les disques de couleur (rouge à verte). La taille des disques correspond au loyer mensuel moyen pour un studio étudiant.
Les étudiants, premières victimes des difficultés de logement
Le logement étudiant, malgré l'existence d'un dispositif d'habitat social dédié (Crous), est indissociable de la dynamique générale du logement. En clair, les étudiants connaissent a minima les mêmes difficultés à se loger que le reste de la population. Leur faible pouvoir d'achat les fait apparaître par nature plus fragile.
une forte mobilité, liée au parcours universitaire et notamment aux stages ;
et à une faible attractivité du profil de l'étudiant pour les bailleurs.
Le Crous ne permet pas à tous les ayant droit de bénéficier d'un logement : en 2023-2024, les boursiers représentaient en effet 33% des étudiants et le Crous ne disposaient que de six lits pour 100 étudiants.
En 2021-2022, on comptait 174.000 places de logements disponibles pour 728.000 boursiers, ces derniers devant se rabattre sur des offres privées. D'après une étude de la fondation pour le Logement, en France, "l’offre totale de logements en résidences gérées par les Crous ne permet de loger qu’environ 25% des boursiers et 6% de l’ensemble des 2,7 millions d’étudiants.
L’offre de logement en résidences universitaires est structurellement déficitaire." Selon l'association Aires 27, il manquerait au moins 250.000 logements étudiants pour répondre à la demande. Le Sénat va plus loin encore dans un rapport rendu en 2021, et décrit l'offre de logement en résidence comme "structurellement insuffisante par rapport à la population étudiante". Ainsi, la tension locative sur le parc diffus - et les prix - restent les indicateurs de prédilection pour analyser l'accessibilité au logement pour les étudiants sur un territoire.
Les associations dénoncent l'impact de la baisse des APL
"Il y a un abandon des étudiants et de la jeunesse mal logée en général. Les classes populaires et moyenne sont délaissées", s'inquiète la fondation pour le logement des défavorisés. Toujours d'après cette dernière, la politique de l'État notamment sur les coupes des APL initiée en 2017 aurait eu un impact important sur la production de logements sociaux et sur la capacité des étudiants à se loger. Renaud Payre, vice-président de la métropole de Lyon en charge du logement, abonde : "Ce sont les bailleurs sociaux qui ont subi la coupe des APL. Cela a affaibli leurs fonds propres, les empêchant d'investir et donc de créer du logement." Ce constat est partagé à des degrés divers par les autres élus locaux que nous avons pu interroger à Nice et à Paris.
Coût des loyers : une augmentation continue depuis 10 ans
Evolution du loyer médian :
En 2016
383€
En 2025
453€
Depuis 2016 et le premier classement des villes étudiantes, l'Etudiant se penche chaque année sur le prix moyen d'un logement étudiant dans les villes de plus de 8.000 étudiants. Ce prix ne cesse d'augmenter, dans des proportion diverses, dans une grande majorité des collectivités observées. Le loyer médian mensuel était de 383€ en 2016, il est monté à 453€ en 2025. Dans le graphique ci-dessus, vous pouvez sélectionner des villes à comparer sur leur évolution entre ces deux dates.
Nous avons fait le choix de baser en priorité notre calcul sur des éléments se rapportant au logement à destination des étudiants. Le reste des critères s'intéressent à des éléments permettant de dresser un tableau du marché global in extenso, ce qu'on appelle le "parc diffus". Ces critères permettent d'apprécier la réalité du logement étudiant et de contrebalancer l'analyse des implantations du Crous. Ce dernier, bien que principal bailleur social, ne gère qu'une toute petite partie du parc dans lequel se logent les étudiants et se baser dessus induirait des constats erronés sur la situation.
"Le logement social [n'est qu'un] élément du tableau. L'enjeu porte plus largement sur le logement abordable", explique Chloé Morhain, enseignante dans différentes écoles de l'agglomération lyonnaise dont l'ENTPE ou l'ENS. "Il y a une cristallisation du débat autour du logement dédié et identifié pour les étudiants", avance celle dont la thèse portait justement sur les politiques publiques à destination des étudiants, dont le logement. "Au final, cela représente une très petite partie du logement étudiant. La majorité se loge dans le parc diffus [...]."
Pour certaines villes, comme Mulhouse, l'analyse des indicateurs quantitatifs que nous relevons peut présenter des limites aux vues du contexte local particulier. Cette situation peut se répéter dans d'autres communes. Notons que ce classement porte sur le parc locatif. Ainsi, même si dans certaines agglomérations le marché de l'achat se porte bien, celui de la location peut être encombré.
Les critères du Logiscore sont les suivants :
Prix d'un studio étudiant d'après les données de LocService et celles relevées par l'Etudiant entre 2024 et 2025 sur un ensemble de site de location, pour un studio de moins de 20m² (coeff 3)
Tension locative sur le marché privé du logement étudiant dans la ville observée entre 2024 et 2025 (données LocService) (Coeff 3).
Nombre de lits Crous pour 100 étudiants dans l'unité urbaine observée à la rentrée 2024 (Données Crous) (coeff 2)
Nombre de logements sociaux pour 100 habitants dans l'unité urbaine en 2024 (Données ministère du Logement) (coeff 1)
Part des logements privés en situation de suroccupation en 2021 dans l'unité urbaine observée (Données Insee) (coeff 1)
Part de résidences secondaires en 2021 dans l'unité urbaine observée (Données Insee) (coeff 1)
Aides déployées par la collectivité (ville, EPCI, métropole) afin de venir en aide aux étudiants pour se loger en 2024-2025 (données récoltées et vérifiées par la rédaction de l'Etudiant auprès des villes) (un point bonus)
Prix d'annonce médian du loyer au m² en 2024 (données ministère de la transition écologique / logement) (coeff 1)
