À Tours, l'université se mobilise pour ses étudiants transgenres

Émilie Weynants Publié le
À Tours, l'université se mobilise pour ses étudiants transgenres
La réflexion, engagée depuis plusieurs années, s'est accélérée grâce au dialogue entre la chargée de mission diversité, égalité et handicap et un étudiant transgenre. // ©  Émilie Weynants
Prise en compte du prénom d’usage, réédition des diplômes et bulletins de notes, toilettes non genrées… L'université de Tours fait de la lutte contre les discriminations liées au genre l'une de ses priorités. Depuis la rentrée 2017, l'établissement multiplie les initiatives, avec un objectif : adoucir la vie de ses étudiants.

En cette rentrée 2017, l'université François-Rabelais de Tours a décidé de prendre un sujet à bras le corps : la lutte contre les discriminations liées au genre. La réflexion, engagée depuis plusieurs années, s'est accélérée le jour où Charly a frappé à la porte de Concetta Pennuto, chargée de mission diversité, égalité et handicap au sein de l'établissement.

Inscrit en licence de psychologie, le jeune transgenre lui raconte ses problèmes quotidiens, liés notamment à l'absence de son prénom d'usage sur les documents administratifs. Emprunt de livres à la bibliothèque, carte d'étudiant, appel lors des examens… Sa vie étudiante fait sans cesse résonner son prénom de naissance, lui qui s'était astreint à ne jamais le dévoiler. "La situation présentait une double difficulté : pour les étudiants et pour le personnel", concède Concetta Pennuto.

Les textes de loi en appui

Pour faire évoluer les documents administratifs de l'étudiant, il aura fallu près d'un an pour démêler les rouages d'un système informatique complexe et automatisé, mobilisant le service des études et de la formation, les affaires juridiques, la vice-présidence à la vie étudiante...

Sans toucher à l'état civil, les étudiants peuvent désormais faire figurer leur prénom d'usage sur leur carte d'étudiant, sur simple demande. Et obtenir une attestation du président de l'université prenant en compte leur nouvelle identité. "Nous nous sommes appuyés sur une résolution européenne d'avril 2015 relative au droit à la reconnaissance de l'identité des genres, mais aussi sur la loi de novembre 2016 qui permet le changement du prénom d'usage à l'état civil en simplifiant la démarche administrative", souligne Concetta Pennuto.

Nous avons rencontré les autres universités, réfléchissant ensemble à ces problématiques. Et les bonnes volontés sont visibles partout.
(C. Pennuto)

"Nous pouvons rééditer bulletins et diplômes avec le prénom d'usage une fois que celui-ci a été modifié à l'état civil", souligne Concetta Pennuto, qui vient d'être sollicitée par un ancien étudiant, diplômé dans les années 90. "On accompagne nos élèves à l'issue des études. Un étudiant qui cherche un emploi ou qui souhaite partir à l'étranger doit avoir des documents cohérents les uns avec les autres."

Des toilettes "tout court"

Et l'université de Tours ne s'arrête pas à l'aspect administratif : depuis la rentrée 2017, l'écriture inclusive est aussi de rigueur. Désormais, le masculin ne l'emporte plus sur le féminin. Les deux genres commencent à être mentionnés dans les documents universitaires ou les courriels. "Ce matin, nous avons reçu un mail où il était écrit 'chèr.e.s étudiant.e.s'", rapporte Charly.

Désormais, c'est sur le "volet toilettes", que planche Concetta Pennuto, entourée des autres services concernés. "L'idée est de laisser en place les toilettes genrées classiques" et d'en ouvrir de nouvelles. Ne les appelez ni mixtes, ni transgenres, mais toilettes tout court. "Il s'agit de donner plus de facilités aux personnes qui le souhaitent. Tout le monde doit pouvoir y aller", insiste Charly.

Dans les cartons depuis juillet, l'initiative devrait être proposée sur les sites et campus de l'université avant la fin de l'année 2017. Au SUAPS (service universitaire des activités physiques et sportives) aussi, l'établissement veut en finir avec les genres, dans un secteur où les différences hommes-femmes sont encore très marquées. Toute l'année devrait être rythmée par des actions de sensibilisation. "Tours a acté le projet sur le terrain, mais nous n'avons pas mené le travail dans notre coin. Nous avons rencontré les autres universités, réfléchissant ensemble à ces problématiques. Et les bonnes volontés sont visibles partout", assure Concetta Pennuto.

Émilie Weynants | Publié le