AgroParisTech révolutionne son offre

Sylvie Lecherbonnier Publié le
AgroParisTech révolutionne son offre
INA PG site de Grignon // © 
Fusion des formations d’ingénieurs en un cursus unique, lancement d’une gamme de formation continue… AgroParisTech démontre que la fusion n’est pas qu’un affichage médiatique. Derrière cette mutation, elle poursuit un objectif : figurer parmi les leaders mondiaux dans les sciences du vivant. Retour d’expériences.

Janvier 2007 : AgroParisTech naît de la fusion de trois écoles, l’INA P-G, l’ENSIA et l’ENGREF . Septembre 2010 : la fusion touchera l’offre de formations avec la mise en place d’un cursus unique d’ingénieurs. Jusqu’à présent, les cursus étaient restés distincts. « La formation d’ingénieurs doit refléter les problématiques du vivant au sens large : écologie, alimentation, maîtrise des ressources en eau. Des enjeux au cœur du XXIe siècle, assure Rémi Toussain , directeur général d’AgroParisTech. Pendant des siècles, les agriculteurs et les forestiers se sont opposés. Désormais, nous allons leur proposer une culture commune. »

Un tronc commun suivi d’une « piscine à UV »

Les étudiants commenceront leur cursus par un tronc commun d’une année. En deuxième et en troisième années, ils se spécialiseront peu à peu vers quatre grands domaines : « productions agricoles et forestières durables, territoires, filières » ; « alimentation, biomatériaux et énergies » ; « gestion et ingénierie de l’environnement » ; et « ingénierie et santé ». Rémi Toussain résume les parcours possibles : « Selon leur projet professionnel, les étudiants pourront être très focalisés ou très polyvalents. Nous avons créé une “piscine à UV”, dans laquelle ils pourront choisir les modules qui conviendront à leur parcours. Les élèves intéressés par les aspects forestiers pourront dès le début de la seconde année se spécialiser sur ces questions. Les étudiants moins sûrs d’eux pourront opter pour une thématique plus progressivement. » Une nouvelle organisation en modules qui permet également de renforcer les synergies avec les 33 spécialités de masters de l’école.

À cursus unique, concours unique pour les élèves de prépa. 350 étudiants vont être recrutés par cette voie pour septembre. Une manière de rebattre les cartes et de monter en gamme, alors que le cursus INA P-G était considéré jusqu’à présent comme le plus coté.

La création d’une marque : AgroParisTech executive

Autre mutation : la montée en puissance de l’offre de formation continue. Pour Laurent Rosso, directeur de l’école interne ENGREF qui porte désormais cette gamme « executive », c’est une évidence : « Le vivant est au cœur de l’intérêt général. Nous ne pouvions pas nous intéresser qu’à la formation initiale. » L’établissement comptait déjà plusieurs mastères spécialisés et la formation du corps du GREF (Génie rural des eaux et forêts). « Une offre morcelée et sans cadrage stratégique, résultat de l’action publique et d’initiatives individuelles », selon Rémi Toussain.

AgroParisTech s’est inspirée de ce que font les business schools pour structurer ses programmes. Première étape : la création d’une marque, « AgroParisTech executive ». « Une marque compréhensible à l’étranger et par les professionnels, affirme le directeur adjoint de l’école. Nous parlons aussi de gammes et de produits. Nous prenons les codes du marché concurrentiel sur lequel nous entrons. »

Doubler le chiffre d’affaires en trois ans

Cursus diplômants à temps plein ou non, programmes certifiants ou formations courtes qualifiantes… AgroParisTech va explorer les différents formats de la formation continue. Avec trois publics prioritaires : les jeunes diplômés, les cadres en activité et les cadres dirigeants. Elle compte ainsi passer de 1.700 auditeurs aujourd’hui à 3.000 dans trois ans et doubler dans le même temps son chiffre d’affaires. Pour Rémi Toussain : « l’État devient un client comme les autres ». Emblématique, le cursus du corps du GREF est intégré dans l’offre exécutive. Une formation profondément revue du fait de la fusion des corps des Ponts et des Eaux et Forêts.

Pour ce lancement, l’école affiche une politique tarifaire assez basse par rapport aux prix du marché avec des mastères spécialisés entre 6.000 et 7.000 €. Des tarifs défendus par Rémi Toussain : « La marque AgroParisTech ne doit pas être associée à une machine à faire du fric. Même si nous nous lançons dans une démarche commerciale avec la formation continue, nous sommes attachés à la notion de service public. »
    
Restera ensuite à AgroParisTech à poser la dernière pierre de l’édifice : le regroupement des quatre sites franciliens sur le plateau de Saclay. « Une traduction immobilière de notre projet stratégique », s’enthousiasme Rémi Toussain. Les études d’aménagement sont en cours, tout comme le montage financier, de l’ordre de 230 millions d’euros. Déménagement prévu courant 2015.

Une fusion qui prend son temps
Mettre en place un cursus unique ne se fait pas en un jour. AgroParistech a mis deux ans pour aboutir. « Nous voulions que les différentes communautés de travail aient appris à se connaître. Il fallait ensuite qu’elles s’approprient la réforme », détaille Rémi Toussain. Comité de pilotage, groupes de travail, assemblée générale tous les trois ou quatre mois avec les enseignants-chercheurs et les personnels de l’école… La rénovation des cursus a été âprement discutée. « Nous avons effectué un gros travail pour nous comprendre. Les trois cursus n’avaient pas la même structuration pédagogique. Au final, chacun a dû faire des compromis », témoigne Laurent Rosso. Des compromis mis en musique à la rentrée 2010.

Sylvie Lecherbonnier | Publié le