Bourses : la chasse aux "étudiants fantômes" est ouverte

Aurélie Gerlach Publié le
Bourses : la chasse aux "étudiants fantômes" est ouverte
Le sénateur de l'Aube Philippe Adnot milite pour la mise en place d'un émargement des élèves avant chaque épreuve de fin de semestre. // ©  EducPros
Renforcer le contrôle d’assiduité des étudiants boursiers, y associer une obligation de résultats, transférer la gestion des bourses sociales vers les Crous. Dans un rapport publié le 29 juin 2016, le sénateur Philippe Adnot en appelle à mettre fin au "scandale des copies blanches".

Il faut réduire le nombre d'"étudiants fantômes" recevant chaque année des bourses sur critères sociaux. Dans un rapport présenté le 29 juin 2016 devant la commission des Finances du Sénat, Philippe Adnot appelle à une réforme des conditions de maintien des droits pour les boursiers. À travers douze propositions, le sénateur entend limiter les abus. Tout en se défendant d'essayer de réduire les aides sociales directes versées aux étudiants.

Selon le ministère de l'Éducation nationale, 3 % des 660.000 des bénéficiaires de bourses – dont le montant annuel varie de 250 à 4.500 euros par an selon les échelons – sont déclarés non assidus. Parmi eux, 8 sur 10 sont inscrits à l'université. "Contrairement aux IUT, lycées ou écoles, un certain nombre d'universités ne contrôlent que très partiellement l'assiduité des étudiants", regrette le sénateur de l'Aube. Dans de nombreux cas, ce contrôle se limite uniquement à une présence aux examens". En cause, la circulaire relative aux modalités d'attribution des bourses, que l'élu juge trop "imprécise".

Et Philippe Adnot de dénoncer ce qu'il appelle le "scandale des copies blanches". Selon lui, le contrôle d'assiduité devrait, par exemple, se faire au sein des travaux dirigés et des travaux pratiques. Un émargement devrait également être exigé avant toutes les épreuves de fin de semestre. L'obligation de résultats est aussi une piste à étudier en imposant, une moyenne minimale ou un certain nombre de crédits ECTS à chaque semestre.

Un transfert de la gestion des bourses vers les Crous

La "dilution des responsabilités" et la "lenteur de mise en œuvre" de la gestion des bourses est également dans le viseur de Philippe Adnot. "Quatre acteurs interviennent dans la gestion des bourses, dans le cadre du contrôle d'assiduité : les rectorats, les Crous, les universités et la Dgesip. C'est pourquoi, il faut étudier la possibilité de transférer des rectorats vers les Crous la gestion complète des bourses et autres aides sociales directes."

Toujours dans une optique de gestion plus fluide, il propose également la possibilité pour les universités de suspendre elles-mêmes les versements.

la dotation des universités dans le viseur ?

Pour inciter davantage les universités à s'investir sur le sujet, le sénateur émet l'idée d'un indicateur de performance au sein du programme "vie étudiante", qui influerait sur la détermination de leur dotation annuelle.

Cette idée "ne peut pas fonctionner", rétorque Jean-Loup Salzmann. " Ce que propose Philippe Adnot ne peut que donner naissance à une usine à gaz..." Pour le président de la CPU (Conférence des présidents d'universités), "l'assiduité est déjà contrôlée en université", même s'il concède que " les choses pourraient être améliorées".

"Nous ne pouvons être que favorables à toute mesure qui permettra de mieux utiliser l'argent du contribuable. Mais il faut que l'on réfléchisse à des règles de contrôle plus efficaces et que le législateur définisse précisément la marche à suivre".

Une priorité : améliorer l'orientation des étudiants

Parmi les autres préconisations, figurent "l'interdiction de l'attribution d'une nouvelle bourse aux étudiants non assidus faisant l'objet d'un ordre de reversement non encore remboursé", ou celle de "faire bénéficier un étudiant déclaré non assidu d'un nouveau droit à bourse pour suivre la même formation".

Mais pour le sénateur de l'Aube, la priorité est l'amélioration du système d'orientation, afin de réduire le nombre des étudiants peu assidus : "Bien des jeunes sont inscrits dans une formation qui ne leur convient pas, car ils étaient mal renseignés ou indécis, ou qui ne constituait pas leur premier choix."

Une proposition qui trouve un écho particulier, alors que, le 29 juin 2016, était remis au Sénat un autre rapport, consacré à l'orientation scolaire.

Aurélie Gerlach | Publié le