Bruno Jeauffroy (président de l’UPS) : « Nous voulons une vraie évolution des programmes de classes prépas scientifiques »

Propos recueillis par Sophie Blitman Publié le
Alors que les nouveaux programmes du lycée vont entrer en vigueur pour les élèves de terminale à la rentrée 2012, l’Union des professeurs de spéciales (UPS) s’impatiente. L’association souhaite que les travaux reprennent sur la réforme des programmes des classes préparatoires, pour que celles-ci soient prêtes à accueillir les nouveaux bacheliers en septembre 2013. Etat des lieux avec Bruno Jeauffroy, président de l'UPS.

Pourquoi est-il, selon vous, urgent de réformer les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) ?

« En raison de la réforme du lycée, le bachelier 2013 sera brutalement très différent de celui de 2012 »

La dernière grande réforme des CPGE date de 1995-1996, avec notamment la création de la filière PSI et des TIPE (Travaux d'initiative personnelle encadrés). Celle de 2003 n’a été qu’une légère rénovation. Il est normal aujourd’hui de se dire que les jeunes et la société ont changé, et que les attentes des grandes écoles ont évolué. Désormais, il s’agit de mettre en avant non seulement les connaissances mais aussi les compétences des élèves. L’esprit est donc différent et il faut réécrire les programmes de classe prépa en ce sens.
D’autre part, et c’est pour cela qu’il y a urgence, la réforme du lycée a pour conséquence que le bachelier 2013 sera brutalement très différent de celui de 2012. Je ne reviens pas sur le contenu de la réforme, que nous avons sévèrement critiquée, avec d'autres, notamment en raison de la baisse des volumes horaires en première et terminale S . Notre problème aujourd’hui, c’est de savoir ce que nous devons enseigner à ces nouveaux bacheliers qui, si l’on ne modifiait pas les programmes de prépa, seraient complètement perdus.
En effet, dès lors que des notions comme le barycentre, le centre le gravité ou la dérivée d’une composition de fonctions ont disparu des programmes du lycée, faut-il compenser ou abandonner ces compétences perdues ? A l’inverse, les probabilités sont entrées en force ; il paraîtrait logique de les intégrer en prépa scientifique, mais au détriment de quoi ? C’est pour répondre à toutes ces questions que nous avons besoin de réunions pour rénover les programmes. Car nous ne voulons pas un simple toilettage, mais une vraie évolution.

Lors de votre dernière assemblée générale, le 2 juin 2012, vous avez dénoncé le retard pris dans le processus de réforme des programmes. Où en êtes-vous aujourd’hui ?

« Les travaux doivent reprendre avant l’été pour que les programmes puissent être finalisés à l’automne »

Les premières réunions au ministère ont eu lieu en janvier 2012, mais elles ont été interrompues en avril en raison de la campagne et des élections présidentielles. Le travail commencé va probablement être poursuivi par le nouveau gouvernement, mais il faut maintenant aller vite ! Pour l’instant, nous avons effectué environ un tiers du travail. Il reste donc beaucoup à faire. Les travaux doivent reprendre avant l’été pour que les programmes puissent être finalisés à l’automne.
En effet, il y a ensuite des délais administratifs nécessaires à la publication des textes. En outre, il faut que les enseignants aient le temps de s’y plonger et éventuellement de se former. Dans le cadre des stages LIESSE (Liaison interdisciplinaire avec les écoles d’enseignement supérieur pour une structuration des échanges), nous allons mettre l’accent, en 2012-2013, sur les points nouveaux des programmes, mais encore faut-il savoir où placer le curseur.

Avez-vous d’ores et déjà quelques pistes ?

Pour garder la confiance des grandes écoles, qui se montrent aujourd’hui satisfaites de nos élèves et dont les exigences restent inchangées, nous souhaitons maintenir le volume horaire en maths, physique et chimie. De plus, nous demandons d’y ajouter une heure d’informatique, matière plus que nécessaire pour de futurs ingénieurs.
D’autre part, nous voulons, comme je le disais, insister sur les compétences des étudiants, mais celles-ci sont peut-être parfois trop redondantes d'une matière à l'autre et l’on pourrait gagner du temps intelligemment en évitant, par exemple, de donner quatre fois les mêmes méthodes de travail. L’idée serait de donner le même socle de compétences à tous les étudiants de classes préparatoires scientifiques puis, selon les filières, de creuser dans une ou deux directions spécifiques, avec une approche plutôt mathématique ou davantage pratique. Loin d’être un système sclérosé, les prépas sont prêtes à changer leurs programmes, leur structure. Mais il faut se remettre au travail rapidement.

Propos recueillis par Sophie Blitman | Publié le