Campus managers : ce qu’ils attendent des établissements d’enseignement supérieur

Propos recueillis par Sophie Blitman Publié le
Campus managers : ce qu’ils attendent des établissements d’enseignement supérieur
Sophie Cluzel et Nicolas Béguët-Guerrero // © 
Rapprocher et faire dialoguer les entreprises et les établissements d’enseignement supérieur : c’est la mission que s’est donnée l’association Synergie campus entreprises , créée en 2008 et qui regroupe aujourd’hui les campus managers de 29 grands groupes internationaux. Sylvie Cluzel, présidente de l’association et campus manager chez France Télécom-Orange, et Nicolas Béguët-Guerrero, campus manager à la Société générale, détaillent leurs attentes vis-à-vis des établissements d'enseignement supérieur avant la conférence EducPros du 12 janvier intitulée "Relations entreprises : comment être plus efficace ?"

Comment évoluent à vos yeux les relations entre les entreprises et les écoles ou universités ?

Sylvie Cluzel. Dans les universités, l’organisation se structure indéniablement. En témoignent des initiatives comme celle du Cedipre [Cercle des directeurs de l’insertion professionnelle et des relations entreprises], qui souhaite constituer un guichet unique sur ce sujet pour les universités d’Île-de-France. Avoir un seul interlocuteur devrait faciliter les relations ; cela correspond bien à nos attentes.

Nicolas Béguët-Guerrero. Nous avons par ailleurs dans les entreprises une volonté forte d’expliquer nos métiers de manière très concrète et pratique, parce que les jeunes ont une vision parfois faussée de la réalité. En outre, certains métiers bénéficient d’un effet de mode, contrairement à d’autres qui sont moins recherchés alors qu’il existe parfois de vrais besoins de recrutement, comme pour les technico-commerciaux.

Voilà pourquoi nous sommes à la recherche de moments plus qualitatifs pour entrer en relation avec des étudiants et avoir des moments d’échange avec eux. Au-delà des forums entreprises qui sont assez formels, participer à une table ronde sur une profession peut ainsi être l’occasion de refléter ce que sont nos métiers au quotidien.

Dans quelle mesure la thématique « métier » est-elle pour vous le point d’entrée dans un établissement ?


« La relation avec un établissement part souvent d’un besoin en termes de métier »

Sylvie Cluzel. C’est effectivement un socle de travail. La relation avec un établissement part souvent d’un besoin en termes de métier, notamment sur des secteurs de niche. C’est le cas, par exemple, de l’architecture réseaux et service intégrant les technologies et les conditions de leur utilisation par les clients, une compétence clé pour Orange. Cela a pu donner naissance à un master spécialisé en partenariat avec Télécom ParisTech, d’abord en formation continue, puis en formation initiale.


« Les universités devraient être davantage proactives »

Nicolas Béguët-Guerrero. De même, la Société générale a participé avec d’autres banques à la création du master en alternance « banque d’investissement et de marché » de l’université Paris-Dauphine. Pour nous, c’est une manière de nous engager dans un accompagnement de l’insertion professionnelle des étudiants dans la durée. Cette relation à long terme nous intéresse davantage que des interventions ponctuelles dans telle ou telle formation.

Sylvie Cluzel. Autre exemple, nous avons contribué, avec la Société générale d’ailleurs, à créer la chaire Media & Entertainment de l’ESSEC : Orange entrait à ce moment-là sur les contenus audiovisuels et nous avions besoin de personnes formées sur ces thématiques, ce qui nous a permis de dégager des financements.

Quant aux établissements qui deviennent nos partenaires, il faut savoir que l’entreprise va au plus évident, au plus visible. Il existe certainement des pépites que nous ne connaissons pas, c’est pourquoi les démarches proactives nous intéressent ! Les écoles ne s’en privent pas, les universités devraient le faire davantage…

Comment se construit une relation durable avec un établissement d’enseignement supérieur ?

Nicolas Béguët-Guerrero. Il existe une gradation dans les différentes actions que l’on peut mener avec un établissement : la participation à son forum emploi, des interventions pédagogiques dans une formation, l’organisation d’un événement de recrutement, et enfin le mécénat avec éventuellement l’entrée dans la fondation et la signature d’un partenariat institutionnel.

Sylvie Cluzel. Mais tout cela prend du temps ! La première année, c’est surtout de l’observation. Il faut deux ou trois ans pour construire une relation durable. Mais cela ne se décrète pas car c’est beaucoup une question de personnes.

Par ailleurs, si un rendez-vous formel avec le responsable des relations entreprises nous permet d’élaborer notre planning de présence, en fonction du rythme et du calendrier de l’établissement, il faut que les établissements nous informent régulièrement de leurs activités car nous sommes extrêmement sollicités : cette continuité de la communication a vraiment son importance.

Propos recueillis par Sophie Blitman | Publié le