Classement des universités : pourquoi la première université de France n'y figure pas

Mathieu Oui et Camille Stromboni Publié le
Classement des universités : pourquoi la première université de France n'y figure pas
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Première du palmarès de Shanghaï, l'UPMC (université Pierre et Marie Curie) est étrangement absente de la première enquête nationale d'insertion professionnelle des diplômés de master , publiée par le ministère de l'Enseignement supérieur le 15 octobre 2010. Une enquête qui permet d'établir un classement général des universités en fonction de ce critère. Résultat : Paris 11,  Lyon 1, Paris 13, Rennes 1 et Le Mans tiennent la tête du palmarès. En queue de peloton, La Réunion, Perpignan, Toulouse 2, Aix-Marseille 1 et Montpellier 3. L'UPMC fait partie des 12 établissements (sur 83) qui n’y figurent pas. D'autant plus surprenant que l’établissement réalise depuis des années ses enquêtes d’insertion des étudiants. Explication.

"Nous n’étions pas très partant pour participer à l’enquête demandée par le ministère car nous réalisons déjà des enquêtes d’insertion à 18 mois", raconte Patrick Porcheron, vice-président Formations et insertion de l'établissement, tandis que l'enquête du ministère  établit ses résultats à trente mois.

"Quand on voit le mal que se donnent les observatoires pour recueillir des informations [...] et ce qui ressort de l'article du Figaro, cela est très décevant"

"Devant l’insistance de la DGESIP [Direction générale pour l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle - ex-DGES], qui a mis en avant l’importance des statistiques en terme de pilotage et de démarche qualité, nous avons donc envoyé ces questionnaires copieux à des étudiants que nous sollicitons déjà largement", poursuit le responsable.

Faible retour des anciens

Conséquence : un faible taux de retour (Patrick Porcheron parle de 30% de réponses). Ce qui serait à l’origine du choix ministériel de ne pas retenir l’université dans le classement, estime-t-il.

"Ce qui devait être un outil de travail est transformé en entreprise de communication"

Le vice-président se dit désolé de n’avoir eu aucun retour du ministère avant publication  et de découvrir l’enquête dans les médias.

"Quand on voit le mal que se donnent les observatoires universitaires pour recueillir des informations précises et que l'on voit ce qui ressort de l'article du Figaro , cela est très décevant. Ce qui devait être un outil de travail est transformé en entreprise de communication. Au final les conditions et la méthode ne sont pas satisfaisantes : c’est un travail nul et non avenu qui ne mérite d’ailleurs pas qu’on en parle."

Un groupe Facebook sur l'absence de l'UPMC

"Ne cherchez pas l'UPMC dans le classement des universités françaises publié samedi prochain ds le Figaro, elle n'y est pas ! À votre avis, pourquoi ?". Voici le débat lancé sur la page Facebook de l'UPMC aujourd'hui.

Avec des réponses humoristiques, mais aussi celle de l'UPMC : "Intéressé(e)s par la réponse ? Lire le post de Pierre Dubois [blogueur Educpros]". Ce qu'Educpros ne peut que vous recommander !

Un problème de timing pour Dauphine

L'université Paris Dauphine est également absente de l'enquête ministérielle. La raison ? "Dauphine n'a pas participé à cette enquête parce qu'elle a été lancée au moment ou nous avons publié les résultats de notre propre enquête conduite avec l'APEC sur la même promotion. Nous avons donc refusé d'enquêter une nouvelle fois la même population", déclare Véronique Prax, responsable administrative du service Dauphine Entreprise. L'an prochain, l'établissement fera coïncider les deux enquêtes.

L'UPEMLV venait - elle aussi - de terminer sa propre enquête

Absente de l'enquête nationale, l'UPEMLV (université Paris-Est Marne-la-Vallée) a elle aussi refusé de renvoyer les questionnaires du ministère à ses jeunes diplômés. "Lors de la sollicitation du ministère, l'OFIPE [Observatoire de l'insertion professionnelle de l'établissement] venait de réaliser sur la même population son enquête et commençait à diffuser ses résultats", indique-t-elle dans un communiqué .

"Comme l'expérience de Paris 6 [UPMC] le montre, nous avions raison", estime Francis Godard , président de l'établissement, qui insiste sur l'impossibilité de comparer les résultats de son enquête avec ceux du ministère. "Notre étude a été faite à 18 mois après l'obtention du diplôme, contre 30 mois pour celle du ministère, et la population de référence n'est pas la même", explique-t-il.

Son établissement participera à l'enquête du ministère l'année prochaine. "C'est une bonne chose d'avoir des données comparables au niveau national, estime-t-il. Nous sommes favorables à la démarche mais elle doit être améliorée". Notamment en tenant compte des différents types de population d'étudiants des universités.

Un classement pas toujours apprécié...

"Premier palmarès", "jamais vu", "exclusif" ! Le Figaro magazine a sorti la grosse artillerie dans son édition du 16 octobre 2010, pour annoncer la diffusion du classement des universités sur le taux d’emploi à bac+5. Une "exclusivité" qui donne l'occasion à Valérie Pécresse d'assurer une opération de promotion médiatique, avec son interview sur trois pages  qui accompagne les classements effectués par le journal.

Mais la transformation des résultats d’insertion en classement, comme l’a fait le magazine, a irrité une partie de la communauté universitaire. "Le sens de l'enquête est perverti dès lors qu'on publie un palmarès", estime Francis Godard, président de l'université Marne-la-Vallée.

"En matière d’insertion, un classement unidimensionnel est surprenant pour ne pas dire autre chose, met en garde Stéphane Jugnot statisticien spécialiste des enquêtes d’insertion. Retenir le taux d’emploi comme seul critère pour mesurer l’insertion est réducteur car ce taux ne dit rien de la réelle qualité de l’emploi occupé."

De plus, derrière les écarts de résultats de 0,1% entre deux universités se cachent des réalités extrèmement contrastées. D’ou l’intérêt de se plonger dans le détail des tableaux et de ne pas s’en tenir à une hiérarchie unique trop simplificatrice.

Sur les interrogations quant à la méthodologie de l'enquête...
Lire aussi sur l'article sur letudiant.fr : Classement des universités selon l'insertion des diplômés : l'enquête ministérielle
Et la réaction du Resosup , le réseau qui fédère les observatoires de l’Enseignement supérieur.

Les 12 universités absentes de l'enquête du ministère

- Amiens
- Antilles-Guyane
- Cergy-Pontoise
- CUFR JF Champollion
- Dijon
- Evry val d'Essonne
- Lyon 3
- Marne-la-Vallée
- Nîmes
- Paris Dauphine
- UPMC (Paris 6)
- Paris 8

Mathieu Oui et Camille Stromboni | Publié le