Une alliance entre l'Essca et l'Efrei Paris pour mixer les compétences

Cécile Peltier Publié le
Une alliance entre l'Essca et l'Efrei Paris pour mixer les compétences
L'Efrei et l'Essca parlent rapprochement mais pas fusion. // ©  Essca-Efrei
Face aux nouveaux défis technologiques et économiques, l'école de commerce et l'école d'ingénieurs postbac ont signé, mi-février 2018, un accord-cadre où elles s'engagent à former une alliance. Celle-ci se concrétisera notamment par l'ouverture à la rentrée 2018 d'un Bachelor en marketing digital, des synergies en matière de recherche et des mutualisations de ressources.

"L’avenir d’une école de commerce ne peut pas se faire aujourd’hui sans l’apport d’une école d’ingénieurs", estime Samir Ayoub, directeur général de l'Essca. Et inversement. C’est ce constat, aujourd'hui largement partagé, qui a poussé l'Essca et l’Efrei Paris, née de la fusion récente de l'Efrei et de l'Esigetel à se rapprocher.

Alors que la double compétence est devenue une évidence et les conventions de partenariat entre écoles de commerce et d’ingénieurs presque banales, les deux établissements postbac ont décidé de pousser le curseur un peu plus loin en formant une "alliance". De par leur expérience – l’Essca a 110 ans, l’Efrei 80 –, ainsi que par leur statut d'EESPIG (établissement d'enseignement supérieur privé d'intérêt général) et leur recrutement postbac, les deux institutions, assez modestes sur un marché où prévaut la concentration, ont beaucoup en commun. Et tout intérêt à jouer les synergies.

"Nous avions déjà des partenariats avec des écoles de management, mais [...] aujourd’hui, nos écoles ont besoin de se renforcer pour apporter cette hybridation et construire un ensemble cohérent face à la concurrence constituée d’écoles publiques consulaires et d'un nouveau modèle à but lucratif", analyse le directeur général de l'Efrei Paris, Frédéric Meunier.

Un Bachelor en marketing digital

Dans l’accord-cadre, signé le 12 février 2018, elles s’engagent à coopérer à tous les niveaux ou presque. Le volet pédagogique constitue le premier étage de la fusée, avec pour principale concrétisation, l'ouverture, à la rentrée 2018, d'un Bachelor en marketing digital. Cette formation, qui capitalise sur la spécialisation sur ce thème offerte par l’Efrei Paris depuis plusieurs années, a été entièrement pensée et édifiée en commun. "Nous aurions pu le monter chacun de notre côté, mais nous avons trouvé ça plus intéressant pour nos étudiants de la concevoir ensemble", précise Frédéric Meunier.

De son côté, l'école d'ingénieurs va profiter de l'ancrage en région de son partenaire. Le nouveau Bachelor sera proposé Villejuif, à l'Efrei Paris, et sur les campus de l'Essca à Boulogne-Billancourt, ainsi que Bordeaux et Lyon. Au total, ils visent un peu plus d'une centaine d'élèves par promotion. La cible ? Des étudiants issus d’un bac scientifique ou technologique, avec une forte curiosité pour l’entreprise. La troisième année sera accessible en alternance. Un moyen d’encourager l’insertion professionnelle dès la fin du diplôme.

Un double diplôme en six ans

Autre chantier prévu pour la rentrée : le lancement d'un programme de master manager-ingénieur. L’originalité de ce programme en six ans ? Sa dimension, totalement intégrée, et son ampleur. Il devrait accueillir un groupe de 35 à 40 étudiants par an, composé pour moitié de managers et d’ingénieurs. Alors que ce type de programme démarre en général en master 1, ici, les étudiants se formeront à la double compétence dès la première année grâce à des modules supplémentaires, des projets, des études cas ou des jeux sérieux mélangeant les deux profils d'étudiants.

Les deux écoles visent aussi des synergies en recherche et en innovation. "Nos équipes se sont rencontrées, nous attendons maintenant qu'elles nous proposent des axes ou des projets sur lesquels travailler en commun", indique Frédéric Meunier. "Même s’il est un peu prématuré pour en parler, on peut facilement imaginer des collaborations autour du digital ou de l’intelligence artificielle", suggère Samir Ayoub.

Les échanges porteront aussi sur l'innovation pédagogique et l’entrepreneuriat, sur lesquelles les partenaires peuvent faire profiter l'autre de leur savoir-faire : l'Essca compte un institut de pédagogie avancée, et l’Efrei un écosystème de création d’entreprises efficace.

Un projet d'implantation en Afrique subsaharienne

Cette alliance doit aussi servir leur développement à l'international, et en particulier en Afrique. L'école d'ingénieurs compte plusieurs classes préparatoires montées avec des établissements locaux. "Nous ne ferons pas tout ensemble, mais il semble naturel de faire profiter l’autre de ces partenariats précieux que l'on met des années à construire", confie Frédéric Meunier. Dans les cartons, plusieurs projets, parmi lesquels une implantation en Afrique subsaharienne francophone.

Plus prosaïque, mais oh combien stratégique le dernier axe de l’alliance concerne la mutualisation des ressources. Systèmes d’information performants, gestion des ressources humaines, campus et équipements pédagogiques de haut niveau... Autant de défis communs et coûteux que les deux écoles vont tenter de relever de concert.

Pas de fusion à l'horizon

Mais, pour autant, pas question de parler de "fusion". "Non ! Ce n’est pas l’objectif, il n’y aurait pas d’intérêt compte tenu de notre statut et chacun de nos établissements a les moyens d'être indépendant", assurent en chœur les intéressés. "Nous ne savons pas de quoi l’avenir sera fait, mais aujourd’hui, une fusion apporterait plus de complexités que de certitudes", ajoute Samir Ayoub. "Sinon, de savoir qui va manger l’autre", ironise son homologue de l’Efrei Paris.

À ce jeu-là, si l'on raisonne en termes de taille, on imagine qui pourrait gagner : avec ses 4.100 étudiants et 39 millions d'euros de budget annuel, l’Essca fait presque le double de l’Efrei Paris.

Cécile Peltier | Publié le