Échos du colloque de la CPU : quel modèle français d’autonomie des universités ?

De notre envoyé spécial à Marseille, Franck Dorge Publié le
Échos du colloque de la CPU : quel modèle français d’autonomie des universités ?
CPU 2012 - Colloque autonomie // © 
Vifs débats autour de l’autonomie des universités lors du colloque de la CPU qui se tient à Marseille du 8 au 10 février 2012. Après l’étude menée par l’EUA sur les universités en Europe, les intervenants s’interrogent sur l’efficience de l’autonomie en France, mais également sur le(s) modèle(s) d’universités de demain : quelle masse critique des établissements ? Quelles relations doivent lier État-universités-régions ? Quels moyens pour les universités ?

Si «l’autonomie ne se décrète pas mais se pratique», pour reprendre les termes d’Alain Beretz, président de l’université de Strasbourg, l’autonomie dépend pour Marie-Hélène Nazaré, future présidente de l’EUA, d’un faisceau d’indicateurs portant sur l’efficience de celle-ci en matière de gouvernance, de recrutement des personnels, mais également de financement des établissements.

Quels financements pour les universités ?

Le débat s’est rapidement cristallisé autour des financements récurrents de l’État et des résultats aux Investissements d’avenir. «À côté des financements extrabudgétaires des Investissements d’avenir qui se concentrent sur quelques sites à vocation internationale, il faut le maintien des moyens récurrents des établissements pour garantir l’égalité d’accès à l’enseignement supérieur sur l’ensemble du territoire français», lance Gérard Blanchard, président de l’université de La Rochelle. Patrick Hetzel, directeur général de l’Enseignement supérieur (DGESIP), nuance le constat sur les Investissements d’avenir : «Il y a plus de Labex en dehors des Idex que dans les Idex. Le financement de l’excellence ne se limite pas aux Idex», avant d’ajouter «alors que l’État a augmenté considérablement le financement des universités ces dernières années, les ressources propres des universités ont stagné».

Dans cette quête de ressources propres, Patrick Hetzel avance deux pistes : le développement des relations avec les entreprises, mais également la formation continue. «Dans certains pays scandinaves, 50% des étudiants sont en formation continue, effectuent des VAE. Il faut que nous facilitions la diversité des parcours, la reprise d’études afin que l’université fasse société», interpelle le représentant de l’État.

Emmanuel Ethis, président de l’université d’Avignon soulève, quant à lui, la question de la taxe d’apprentissage et demande à ce que les universités deviennent organismes collecteurs.

Quelle relation avec les collectivités territoriales ?

Patrick Hetzel insiste d’autant plus sur les ressources propres des universités, qu’il met en garde contre une trop grande proximité de celles-ci avec les régions : «Avec l’autonomie, le joug de l’État est moindre. Cependant, n’allez pas vous [universités] jeter dans les bras des régions. Si vous le faites, les missions nationales ne seront plus prises en compte. La somme des schémas régionaux d’enseignement supérieur et de recherche ne peut constituer une politique nationale.»

Quelle politique commune et quel modèle pour les universités ?

Gérard Blanchard indique, au nom de la CPU, que trois caractéristiques doivent rester communes aux universités : le statut de fonctionnaire des personnels de l’université, l’habilitation nationale des diplômes et le maintien de droits d’inscription modestes pour les étudiants, fixés par l’État. S’engage ensuite un débat autour du ou des modèles universitaires. Faut-il atteindre une taille critique de 40.000 à 50.000 étudiants à l’instar de Saclay, des universités fusionnées françaises ou encore de l’UCLA, ou y a-t-il également de la place pour de petites universités à forte valeur ajoutée sur des thématiques de recherche comme Limoges, Saint-Étienne, Avignon, La Rochelle ou encore Le Havre ?

Sans être tranché, le débat se poursuit également dans d’autres pays européens, indique Marie-Hélène Nazaré. C’est le cas de l’Espagne, de l’Allemagne, du Danemark ou de la Suède. Jean-Pierre Guesson, président de l’université de Poitiers, reste, quant à lui, attentif au devenir de l’autonomie à la française : «Est-elle un collier plus serré avec une laisse plus longue ?» ou permettra-t-elle aux universités d’avoir les moyens de leur stratégie ? Quoi qu’il en soit, «la perception des universités a changé et les présidents d’université doivent assumer leurs responsabilités».

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