Écoles d’ostéopathie : le bal des agréments

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Agréées, plus agréées, de nouveau agréées… Plusieurs écoles d’ostéopathie ont été cet automne dans l’incertitude de pouvoir délivrer une formation reconnue (et le titre d’ostéopathe) à leurs étudiants. L’histoire, juridique, commence en 2007. Durant l’été 2010, une quinzaine d’établissements reçoivent pour la première fois un agrément du ministère de la Santé. La nouvelle réglementation met fin à quarante ans de formation non contrôlée.

35 autres écoles, qui avaient présenté un dossier, restent sur le pavé. La plupart entament des recours juridiques. « L’administration chargée de statuer, la DHOS [Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins], aujourd’hui renommée DGOS [Direction générale de l’offre de soins], agrée alors à tout-va à cause de pressions politiques locales et d’un manque de précision dans la procédure. 47 établissements, dont une vingtaine dispensant une formation initiale, reçoivent l’agrément », raconte Philippe Sterlingot, président du SFDO (Syndicat français des ostéopathes).

Autant d’écoles en France qu’en Europe

Le nombre d’écoles d’ostéopathie en France atteint alors celui de l’Europe entière. « Résultat : on est confronté à une hétérogénéité dans la formation – cela va du médiocre à l’excellent – et à un problème d’emploi. On recense aujourd’hui 14.000 ostéopathes en France, contre à peine 4.000 en Angleterre pour une population équivalente. 2.500 nouveaux ostéopathes sortent de formation par an », ajoute-t-il.

Agrément retiré sans délai

Pour éviter la saturation, le SFDO décide de mener à son tour des actions en justice. Objectif : faire annuler les agréments des écoles bénéficiaires après la première phase de l’été 2007. En mars 2010, 5 établissements perdent leur agrément. En août 2010, la cour d’appel de Bordeaux retire celui du COS (Collège ostéopathique Sutherland) Bordeaux, sur sa formation professionnelle. « Lors des cinq dernières minutes de la plaidoirie, on nous a indiqué qu’il manquait deux CV de professeurs à notre dossier – qui, de toute façon, ne font plus partie de l’école depuis deux ans. Nous n’avons rien pu faire. À cause de ces deux pièces administratives, notre agrément a été retiré sans délai », pointe Charlotte Robelin, responsable presse du COS Bordeaux.

À chaque école son territoire

L’établissement n’en reste pas là et apporte les pièces manquantes au ministère. « Le COS est l’une des plus anciennes écoles d’ostéopathie. Il offre une formation équivalente à celle dispensée par les écoles agréées au départ. Nous ne faisons pas de cours à l’hôtel(1) », indique Jacques Weischenck, son directeur général. Et glisse une autre explication à l’affaire : « Le SFDO est proche du SNESO [Syndicat national de l’enseignement supérieur en ostéopathie], qui regroupe 9 écoles de formation initiale agréées en août 2007 [et imposant un minimum de cinq années d’études, NDLR]. Ils ont anticipé la reconnaissance, travaillé ensemble, échangé ensemble avec le ministère. Aujourd’hui, ils souhaitent que chaque établissement ait son territoire. Pour eux, dix écoles reconnues, cela doit suffire. »

Retour d’agréments

Au début du mois d’octobre 2010, le ministère de la Santé redonne leur agrément à 5 écoles (dont le Collège ostéopathique Sutherland). Prétexte invoqué : « On ne peut pas laisser des étudiants sur le carreau. » Mais la plupart de ces établissements avaient perdu leur agrément sur la formation continue. Les élèves concernés étaient donc des professionnels déjà en emploi. Derrière cette décision, il y a un signal : le ministère ne veut pas que le syndicat intervienne dans les affaires d’agrément », déclare Philippe Sterlingot.

Un rapport de l’IGAS confidentiel

Pour le SFDO, il ne faudrait pas plus de 10 ou 12 écoles agréées en France, comme en Angleterre. De son côté, Jacques Weischenck reconnaît que le nombre d’agréments ne doit pas dépasser 40, mais affirme que les établissements « qui ont 15-30 ans d'existence doivent être respectés ». Comment va réagir le ministère – qui n’a pas donné suite à notre demande d’informations – à l’avenir ? L’IGAS (Inspection générale des affaires sociales) a rendu un rapport en avril 2010 resté sur le bureau du ministre et dont elle ne veut rien dévoiler. « L’administration sait donc que les choses vont mal. Mais on ne voit pas venir de réforme des critères d’agrément », déplore Philippe Sterlingot. À voir en 2011, puisque l’agrément n’est attribué aux établissements que pour une durée de quatre ans.

(1) À l’origine, il y a une trentaine d’années, l’ostéopathie s’apprenait lors de séminaires qui se déroulaient dans des lieux loués, comme des hôtels. Les établissements de formation professionnelle ont parfois continué à enseigner de cette façon.

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