EdTech : EvidenceB met les sciences cognitives à portée de clic

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EdTech : EvidenceB met les sciences cognitives à portée de clic
La start-up a créé deux prototypes : un chatbot et le jeu Kidscode. // ©  plainpicture/Till Melchior
En s'appuyant sur les dernières recherches en matière de sciences cognitives et d'intelligence artificielle, EvidenceB conçoit et vend des modules numériques d'apprentissage aux éditeurs de contenus. Thierry de Vulpillières, fondateur de la start-up et ancien directeur des partenariats éducation chez Microsoft France, détaille son projet. Nouveau portrait de start-up EdTech française.

Quel est votre concept et son modèle économique ?

Nous produisons des modules d’exercice à partir des recherches menées en sciences cognitives et en intelligence artificielle sur les difficultés d’apprentissage. Nous les commercialisons auprès des éditeurs et nous envisageons une première levée de fonds en 2018 afin de financer notre développement international.

Thierry de Vulpillières
Thierry de Vulpillières © Photo fournie par le témoin

Quelles formes prennent-ils ?

Nous avons créé en juillet 2017 deux prototypes. L’un prend la forme d’un chatbot, disponible sur Messenger, la messagerie de Facebook. L’autre, Kidscode, se présente sous le format d’un jeu pouvant s’adosser à une plate-forme choisie par l’éditeur, telle que Maskott pour Hatier.

Notre solution permet également de générer des données sur les apprentissages des enfants : cette approche permet de repérer s’ils ont bien lu la consigne, s’ils éprouvent une émotion ou un stress particulier pouvant gêner dans leurs acquisitions. Nous partons du matériau des sciences cognitives et le combinons avec l’intelligence artificielle pour personnaliser l’apprentissage et apporter à l’enseignant des données précises sur la progression de chaque enfant.

Comment identifiez-vous les recherches susceptibles d’être appliquées au domaine éducatif ?

Nous nous sommes rapprochés du département d’études cognitives de l’ENS (École normale supérieure) Ulm. Nous travaillons également avec des enseignants et des didacticiens pour appliquer les résultats de cette recherche à un contexte d’apprentissage.
Au final, notre apport est proche de celui d’un éditeur : nous proposons aux laboratoires de valoriser leurs travaux, via une licence d’exploitation.

Notre apport est proche de celui d’un éditeur : nous proposons aux laboratoires de valoriser leurs travaux, via une licence d’exploitation.

Vous avez été directeur des partenariats éducation chez Microsoft France. Que pensez-vous de l’influence croissante des GAFAM sur nos systèmes éducatifs ?

Il me semble qu’il y a, depuis une dizaine d’années, un déplacement du débat sur l’éducation numérique. Désormais, on présente les soft skills comme les "compétences du 21e siècle", indispensables à acquérir. Il faudrait savoir communiquer, collaborer, développer le "social learning", savoir chercher et non plus seulement mémoriser, développer sa créativité, et, enfin, apprendre à coder… Qui serait contre ?

Derrière cette évolution, il y a un double problème. Le premier, c’est qu’à entendre ce discours, bon nombre d’acquis multiséculaires semblent être devenus obsolètes. Qu’en est-il des curriculums traditionnels ? De la compréhension de l’histoire et de la géographie des hommes, de la littérature et de la complexité du monde et des cultures, et même de l’abstraction mathématique qui permettra de pousser plus loin l’algorithmie ?

Ces compétences du 21e siècle, qu’on retrouve au cœur de toutes les conférences et initiatives sur le numérique éducatif, sont porteuses d’un silence assourdissant sur tout ce qui fait l’expertise des enseignants et des missions des systèmes éducatifs. N’aurait-on plus besoin de ces connaissances fondamentales, puisqu’elles seraient toutes à une portée de clic ? Les discours de rupture ne sont pas les meilleures approches d’accompagnement du changement.

Le second problème est que derrière la plupart de ces compétences, on trouve très facilement un outil porté par un GAFAM. L’enjeu n’est pas de retomber dans un débat binaire sans intérêt entre compétences et connaissances, mais de faire l’effort de réfléchir à l’articulation entre l’indispensable éducation à l’appétit de tous les savoirs du monde et la force que viennent y ajouter ces softs skills. Il est important que les priorités de l’agenda éducatif soient bien celles des politiques et des éducateurs…

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