Emplois d'avenir professeur : les leçons des anciens aides-éducateurs

Fabienne Guimont Publié le
Présentés lors du conseil des ministres du 29 août 2012, les 18 000 emplois d’avenir professeur seront une des sources de recrutement pour atteindre les 60 000 postes supplémentaires dans l’éducation sur le quinquennat. Encore faudra-t-il leur donner des conditions de formation, de professionnalisation et d’accompagnement favorables vers ces carrières. L’expérience des aides-éducateurs (ex-emplois jeunes de l’Education nationale), entre 1998 et 2003, donne de précieuses réponses en la matière. Bilan des réussites et des échecs de ces précédents contrats censés conduire les jeunes vers l’emploi.


Il y a près de 10 ans, les derniers aides-éducateurs salariés dans les établissements de l’Education nationale signaient leur emploi jeune. Plusieurs études avaient alors tiré le bilan des conditions de succès dans l’accès à un emploi pérenne de leurs bénéficiaires. Leurs contrats étaient plus longs que les futurs emplois d’avenir professeur annoncés (cinq ans contre trois). Et bien plus nombreux aussi : 105 000 contre 18 000 sur trois ans.

Très diversifiées, les missions des aides-éducateurs – surveillance des élèves, activité informatique, animation de la bibliothèque, ou encore soutien scolaire – avaient fini par jouer un rôle complémentaire à celles des enseignants très apprécié... Et même regretté à leur disparition. Des missions que pourraient reprendre les futurs emplois d’avenir professeur . Elles sont censées évoluer entre la L2 et le M1 en commençant par des études surveillées jusqu’à du soutien scolaire. Vincent Peillon a néanmoins précisé lors de sa conférence de rentrée, mercredi 29 août 2012, que ces emplois d’avenir ne pourraient remplacer des enseignants devant les classes.

Une condition de réussite : anticiper la suite

Les aides-éducateurs n’ont pas tous eu un parcours d’insertion professionnelle facile après ce contrat. Le premier emploi occupé après ce contrat aidé a été dans le secteur public pour plus de la moitié d’entre eux. 55% travaillent sur des emplois mobilisant des compétences proches de celles des aides-éducateurs.

Les jeunes qui s’en sont le mieux sortis sont ceux ayant rompu leur contrat avant les cinq ans pour lesquels ils avaient signé, le plus souvent parce qu’ils avaient trouvé un emploi ailleurs. Cet emploi a été le plus souvent sous forme de CDI ou comme fonctionnaires. Avantage supplémentaire sur les aides-éducateurs ayant suivi leur contrat à terme, ces sortants étaient aussi souvent plus diplômés et avaient eu un parcours moins chaotique. Au bout des cinq ans de contrat, 76% ont en revanche pointé au chômage. Quelques mois plus tard, ce pourcentage tombait à 52%. Pour eux, les emplois-jeunes ont constitué une « porte de sortie provisoire » notait alors pudiquement le Céreq.

Une note d’information du ministère de l’Education nationale indiquait par ailleurs qu’« être resté au moins trois ans [dans le dispositif] améliorait significativement les chances d’obtenir un emploi, notamment par concours ».

L’enseignement : un tremplin pour près d’un quart des aides-éducateurs

Les contrats d’aides-éducateurs ont permis à deux tiers des jeunes de suivre parallèlement une formation, mais seul un quart d’entre eux a obtenu un diplôme. Sans effet sur la recherche d’un emploi dans le secteur privé, cette période de formation a eu des effets positifs pour ceux qui ont passé des concours de l’enseignement ou de la fonction publique. 20% à 25% des aides-éducateurs sont devenus enseignants, titulaires ou non, à 80% dans le 1er degré. Les aides-éducateurs exerçant dans des collèges ont eu de moins bons résultats aux concours.

La majorité avait formulé ce projet professionnel pendant leur contrat d’aide-éducateur et les deux tiers étaient titulaires d’un bac+3 avant d’entrer dans le dispositif. L’ouverture temporaire du « troisième concours » aux aides-éducateurs avait été la clé de leur accession à ces métiers. L’accès au professorat se faisait alors à bac+3. Pour les futurs sortants des emplois d’avenir professeur, le bac+5 désormais requis sera une difficulté supplémentaire.

Une expérience professionnalisante

Les anciens aides-éducateurs considéraient majoritairement que leur entrée dans les métiers de l’enseignement avait aussi été facilitée par leur professionnalisation acquise dans les établissements scolaires fréquentés, notamment en matière de gestion des groupes d’élèves et de connaissance de l’environnement de leur futur métier. Des compétences que les futurs emplois d’avenir professeur pourraient également acquérir pendant leur mi-temps (durée maximale) dans les écoles, collèges ou lycées.  

Emplois-jeunes et emplois d’avenir : quelles différences ?

Quinze ans après les emplois-jeunes, les emplois d’avenir du gouvernement de Jean-Marc Ayrault remettent un dispositif de contrats aidés visant les jeunes au goût du jour. Même objectif final : faire baisser la tension sur le front du chômage des jeunes alors qu’un sur cinq est sans emploi.

La voilure a été cependant réduite en 2012 puisque 150 000 de ces contrats pourront être financés à 75% par l’Etat sur trois ans. C'était alors plus de 400 000 emplois jeunes sur cinq ans. Les 16-25 ans sont visés par les emplois d’avenir, en priorité dans les Zones urbaines sensibles (ZUS) et avec des profils peu ou pas qualifiés.

Les emplois d’avenir professeur, eux, seront atypiques par rapport à ce profil puisque destinés à des étudiants en deuxième année de licence. Seront prioritaires les étudiants venant d’académies manquant de candidats au concours de professeurs des écoles et les étudiants de disciplines comme les mathématiques, la physique ou les langues anciennes où la relève est difficile.

De manière plus globale, les jeunes « rencontrant des difficultés particulières d’accès à l’emploi » sont visés. Comme pour les emplois jeunes destinés aux 18-26 ans, les emplois d’avenir bénéficieront au secteur public ou non-lucratif (collectivités, associations…).

Le projet de loi des emplois d’avenir sera examiné par les parlementaires à partir du 10 septembre lors d’une session extraordinaire. Les premiers contrats devraient être signés avant la fin de l’année 2012.   

En savoir plus

Aides-éducateurs : à l'issue du dispositif emploi-jeunes, que reste-t-il des activités ? Que sont devenus les jeunesRelief n° 10, 2005

Que deviennent les aides-éducateurs? L’accompagnement vers l’emploi stable en question
Bref Céreq n°211, septembre 2004

Que sont devenus les bénéficiaires d’un contrat emploi-jeune de l’Éducation nationale ? Note d’info septembre 2005

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