Entrepreneuriat : la formation à l'américaine

Sylvie Lecherbonnier Publié le
Entrepreneuriat : la formation à l'américaine
L'université de Stanford - Californie - octobre 2014 // ©  Bénédicte Lassalle
Stanford et Berkeley, les deux prestigieuses universités de la Silicon Valley, ne se contentent pas de récolter les fruits de cet écosystème unique. Elles renouvellent leur pédagogie afin de continuer à faire émerger une nouvelle génération d'entrepreneurs. Avec toujours un temps d'avance.

"Ici, c'est dans l'air. C'est comme un virus." Mike Lyons, professeur associé à l'école d'ingénieurs de Stanford, file la métaphore pour décrire l'esprit d'entreprendre qui règne sur les campus de la Silicon Valley. Google, Yahoo ou Linkedin sont nés ici. Et lorsqu'on interroge des étudiants au hasard des larges allées de Stanford ou Berkeley, beaucoup ont une idée de start-up en tête.

Pour autant, les deux universités californiennes ne se reposent pas sur leurs lauriers et réinventent sans cesse leur manière d'enseigner l'entrepreneuriat. Des centres dédiés ont vu le jour et développent formation et recherche autour de la création d'entreprise.

Susciter l'esprit d'entreprendre plutôt que la création d'entreprise

Ainsi, l'école d'ingénieurs de Stanford compte en son sein le STVP, Stanford Technology Venture Programs, dont l'objectif est d' "accélérer l'enseignement de l'entrepreneuriat à Stanford et à travers le monde". Outre des cours, de la formation d'enseignants et des programmes de recherche, cette entité a lancé eCorner, pour Entrepreneurship Corner, qui rassemble 3.000 vidéos et podcasts gratuits sur le sujet.

STVP se défend pourtant d'avoir des objectifs chiffrés en matière de création d'entreprise. "Nous ne sommes pas un incubateur, nous sommes une université", affirme avec force Mike Lyons. "Nous voulons simplement aider les étudiants à lever les barrières mentales qui existent, à acquérir les compétences, les attitudes et le savoir qui leur permettront de transformer les problèmes en opportunités, renchérit Rebecca Edwards, global programs manager à STVP. Nous ne les aidons pas à monter leur société mais à exprimer leur potentiel." Une manière malgré tout de "créer une nouvelle génération d'entrepreneurs pour soutenir l'économie américaine", selon Mike Lyons.

UC Berkeley - Etats-Unis - octobre 2014

UC Berkeley // ©B. Lassalle

Un cocktail de pédagogies innovantes

De l'autre côté de la baie, UC Berkeley n'est pas en reste. "Nous avons réalisé des changements significatifs dans la manière d'enseigner l'entrepreneuriat sur les cinq dernières années", insiste David Charron, directeur exécutif du laboratoire sur l'entrepreneuriat de l'université californienne.

Principale innovation : la "Lean LaunchPad Class", également proposée à Stanford et largement inspirée par les méthodes du Lean Start-up.

Le principe ? Partir des besoins des clients plutôt que d'enseigner l'entrepreneuriat en débutant par "comment rédiger un business plan", approche jugée dépassée aujourd'hui. La "Lean Launch Pad Class" dure dix semaines. Des équipes d'étudiants venus de différents horizons vont tester leur business model sur le terrain et reviennent une fois par semaine en cours pour débriefer. Chaque groupe est assisté d'un mentor, entrepreneur chevronné. Classe inversée, pensée design, méthodes agiles héritées des projets de développement informatique... Cette classe d'un nouveau genre utilise un cocktail de pédagogies innovantes. "C'est compliqué à organiser mais les résultats sont fantastiques", se réjouit David Charron.

De l'incubateur à l'accélérateur

Les incubateurs aussi sont en profonde mutation : ils se rebaptisent peu à peu accélérateurs. Un changement de nom qui dépasse le simple coup marketing. StartX est ainsi "l'accélérateur" des projets des étudiants et alumni de Stanford. Depuis sa création en 2010, il a aidé 2.000 d'entre eux à créer 500 compagnies. Mentorat, rencontres informelles entre entrepreneurs ou avec des investisseurs, StartX joue à fond la carte de la communauté et de l'open innovation. Le tout pour activer le processus d'incubation. L'un des responsables de l'accélérateur, Andrew Scheuermann, l'affirme sans détour : "Les start-up des technologies de la communication restent trois mois à StartX puis n'ont plus besoin de nous." Dans la Silicon Valley plus qu'ailleurs, le temps c'est de l'argent !

Sylvie Lecherbonnier | Publié le