Finance : les "quants" n’ont plus la cote

Géraldine Dauvergne Publié le

« Nous avons dans notre master une centaine d’étudiants sans stage. En 2008, tous avaient un stage à cette époque de l’année… ». Celle qui formule ce constat, c'est Nicole El Karoui lors d’une conférence sur sa spécialité, les mathématiques financières, destinée au grand public sur le campus de Jussieu, mi-mars 2009.

Pour cette professeur mondialement connue pour le master 2 « probabilités et finance » qu’elle dirige à l’université Pierre et Marie Curie (Paris 6), qui a formé la crème des « quants » - ces ingénieurs financiers spécialistes des méthodes quantitatives - recherchés de la City à Wall Street, le constat est amer. Ses anciens élèves, polytechniciens pour la plupart et qui représentaient jusqu’en septembre 2009 l’aristocratie de la finance, n’ont décidément plus la cote.

"Ils se mettent à jouer comme au casino"

Sur la défensive et un brin désabusée, Nicole El Karoui répète qu’elle est entrée dans le secteur bancaire comme « technicienne », « en commençant tout en bas et avec naïveté ». Elle laisse entrevoir aujourd’hui l’immense malentendu qui s’est installé entre elle et ses élèves. « Il y a des questions qu’ils ne se posent plus, quand ils sont dans l’univers de l’argent, explique-t-elle. Ils se mettent à jouer comme au casino. Mais je pense qu’il est essentiel de continuer à former des techniciens de très haut niveau, capables de maîtriser les outils mathématiques pour la finance, avec un regard éthique. Même si je ne suis pas sûre qu’il y ait eu beaucoup d’éthique chez ces étudiants. »

"Pendant quinze ans une aventure extraordinaire"

Avant de conclure, à un an de la retraite : « Malgré le désastre de cette crise, j’ai vécu pendant quinze ans une aventure extraordinaire. J’ai aussi eu la chance d’avoir des étudiants, du moins au début, passionnés de mathématiques. Puis la question des salaires est apparue… »




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