Formation des enseignants : la place du concours toujours en débat

Isabelle Maradan Publié le
Formation des enseignants : la place du concours toujours en débat
V. Peillon // © 
Les travaux du groupe de la concertation pour la refondation de l’école planchant sur la formation des enseignants se sont achevés le 28 septembre 2012. Soixante-dix personnes, dont les syndicats d’enseignants, ont participé régulièrement aux réunions. Leurs conceptions de la place et de la nature du concours de recrutement des enseignants divergent. Le ministre va devoir trancher.

Le ministre de l’Éducation nationale a décidé de l’ouverture d’un second concours en fin de master 1 pour parvenir à recruter 21.350 enseignants en plus des 22.100 postes déjà prévus pour remplacer les départs à la retraite de la rentrée 2013 . Vincent Peillon a également annoncé la mise en place de prérecrutements de 6.000 emplois d’avenir de professeurs rémunérés pendant trois ans, de la licence 2 au… master 1.

Le concours en fin de M1 : place transitoire ou tranchée ?


Pour certains membres de la concertation pour la refondation de l’école, ces annonces prouvent que la place du concours est déjà tranchée. Le ministre s’en défend. Dans un entretien publié le 2 octobre 2012 dans le quotidien Les Echos , Vincent Peillon estime ne pas avoir de position figée sur le recrutement des enseignants en première année de master et déclare que « la discussion doit avoir lieu sans a priori ».

Selon Daniel Robin, cosecrétaire général du SNES, «le problème du concours transitoire en 2013, c’est qu’à partir du moment où le ministre a décidé de siphonner le M1, on se demande comment il pourrait proposer un concours en fin de M2 l’année suivante...». Pour d’autres, ces mesures sont transitoires et doivent être distinguées du travail de concertation. Une certitude : la place du concours n’a pas fait consensus au sein du groupe chargé de débattre de la formation des enseignants.

Un concours en fin de M1 : le SNUIPP et le SNES en désaccord


Au sein de la FSU (Fédération syndicale unitaire), les positions des deux syndicats d’enseignants divergent encore. Le SNUIPP, syndicat majoritaire du premier degré, initialement favorable à un concours en fin de licence 3, estime que le concours de recrutement pourrait avoir lieu en fin de première année de master, alors que le SNES, majoritaire dans le second degré, juge cette hypothèse «inacceptable» et défend l’idée d’un concours en fin de master 2.

SGEN et SNES : un accord sur la place du concours différemment motivé


Si le SGEN-CFDT et le SNES s’accordent sur la place du concours en fin de M2, leurs motivations divergent totalement. Les deux syndicats n’envisagent en effet ni le même master, ni le même concours. Le SNES insiste toujours sur la nécessité pour les enseignants d’être recrutés à un niveau disciplinaire élevé «pour faire face aux évolutions du métier et des connaissances», avance Daniel Robin, du SNES. Alors que le SGEN n’adhère à l’idée d’un concours en fin de M2 que par «principe de réalité». Son idéal : un concours permettant de recruter des enseignants stagiaires en fin de licence 3 pour les former au métier pendant deux ans, ayant buté sur les moyens financiers.

L’UNSA Éducation déplace le débat


Partageant à la fois l’idéal et le réalisme budgétaire du SGEN, l’UNSA Éducation choisit de déplacer le débat. «La question de la place du concours devient moins fondamentale s’il est entendu comme un moment dans le long processus de formation, débutant avec des modules préprofessionnels dès la L2, L3, et se poursuivant après la titularisation», tempère Luc Bentz, secrétaire national de l’UNSA Éducation. Ce syndicat considère même que le concours en fin de M1 peut être un «bon compromis».

Pour la CDIUFM, le concours en M1 dévalorise le master

Une idée rejetée par la Conférence des directeurs d’IUFM (CDIUFM) pour laquelle «placer le concours de recrutement en master 1 dévalorise d’entrée de jeu le master» et soulève deux questions : «comment considérer le passage de M1 en M2 ou la délivrance du master dès lors que les étudiants auront réussi un concours de recrutement ? Comment une université pourrait refuser l’entrée en M2 à un étudiant ayant réussi le concours ou refuser la délivrance du master à un étudiant qui serait fonctionnaire stagiaire ?» Lors des travaux de la concertation, un recteur d’académie a même été plus loin en remettant en cause l’opportunité du maintien du concours si les futures ESPE (écoles supérieures du professorat et de l’éducation) délivrent un master professionnel d’enseignement.

Consensus sur une formation mêlant théorie et pratique


Selon plusieurs participants réguliers aux réunions, une idée importante a fait l’objet d’un consensus : celle d’une formation initiale mêlant savoirs et savoir-faire relevant de la professionnalité des enseignants. Mais les modalités d’articulation entre connaissances disciplinaires et compétences professionnelles n’ont pas été davantage tranchées que la place et la nature du concours ou encore le statut des futures ESPE.

Après la concertation, Vincent Peillon entre dans l’ère des arbitrages et des prises de décision. Au ministre de se confronter au principe de réalité.

Isabelle Maradan | Publié le