
Alors que la loi du 11 février 2005 célèbre ses 20 ans, le bilan est "contrasté" estimait la Cour des Comptes, dans son rapport sur l'inclusion scolaire des élèves en situation de handicap, publié en septembre 2024.
Le texte de 2005, qui pose le principe de scolarisation en milieu ordinaire pour tous les élèves, est le fondement de la politique d'inclusion scolaire. Mais si la juridiction reconnaît "la pertinence et la cohérence" de cette politique publique, elle pointe "des faiblesses dans la mise en œuvre".
Pour corriger ses faiblesses, pourquoi ne pas s'inspirer de ce qui est mis en place au-delà des frontières ? Avec son rapport, l'institution publie un cahier de comparaisons internationales, permettant de mettre en lumière les dispositifs d'autres pays européens.
Le principe de l'inclusion totale : l'exemple italien
L'Italie fait figure de précurseur en matière d'école inclusive en ayant décidé, dès 1977, de fermer ses établissements spécialisés pour scolariser les élèves en situation de handicap dans les classes ordinaires.
Le système italien se caractérise par la création du métier d'enseignant de soutien. Cet enseignant spécialisé est affecté à la classe de l'élève handicapé pour faciliter l'intégration : "il n'est donc pas l'enseignant de l'élève handicapé, mais une ressource professionnelle affectée à la classe", explique le rapport.
Toutefois, des débats demeurent sur la formation de ces enseignants. Ceux-ci sont souvent sélectionnés sur les "listes de programmes" destinées à combler le manque de personnel spécialisé et ne bénéficient donc pas de formation spécifique. "Au global, moins d'un enseignant de soutien sur trois est spécialisé et moins d'un sur quatre a suivi une formation sur l'inclusivité."
La question de la formation des enseignants
La question de la formation se pose aussi en Hongrie. Dans ce pays où une longue tradition de ségrégation existait dans l'enseignement, le changement de régime en 1989 a engendré une politique d'inclusion.
Mais les enseignants qui suivent une formation générale ne reçoivent pas de formation à l'éducation inclusive, déplore le rapport. "Or, sans celle-ci, ils ont des difficultés non seulement à gérer les problèmes professionnels quotidiens liés à l'enseignement aux enfants ayant des besoins particuliers, mais aussi à interpréter l'avis d'un expert de l'éducation spéciale."
Idem en Allemagne où, selon des études, 89% des enseignants allemands indiquent ne pas avoir été "suffisamment" préparés à l'enseignement inclusif au cours de leurs études et de leur formation.
Des équipes mixtes et pluridisciplinaires
Au Portugal, depuis 2018, la loi relative à l'inclusion scolaire a abandonné le système de catégorisation des élèves pour une vision plus large, impliquant une approche globale de l'école.
Dans chaque école, une équipe multidisciplinaire est constituée avec pour mission de soutenir l'éducation inclusive. Cette équipe, composée de l'enseignant de l'élève, de ses parents, d'un éducateur spécialisé et d'un psychologue, propose des mesures de soutien et de suivre leur mise en œuvre.
De son côté, l'Allemagne se démarque par une coopération importante entre l'école et le médico-social. Pour chaque élève en situation de handicap, les professionnels de l'éducation et du médico-social établissent, avec les parents, un plan d'intégration individuel qui détaille les besoins spécifiques de l'élève.
Par ailleurs, les écoles "travaillent en étroite collaboration avec des professionnels de la santé (thérapeutes, médecins), afin de garantir la prise en charge des besoins médicaux des élèves".
La coexistence d'établissements spécialisés
À l'instar de la France, plusieurs pays ont gardé les établissements spécialisés. Ceux-ci complètent les dispositifs d'inclusion scolaire. C'est le cas de l'Angleterre où des écoles spécialisées proposent des pédagogies qui visent à répondre aux besoins spécifiques dans quatre domaines : communication et interaction, cognition et apprentissage, santé mentale, émotionnelle et sociale ou besoins physiques et sensoriels.
En Suède, dans les établissements dédiés aux enfants avec un handicap physique "grave", l'accent est mis sur la langue et la communication. Il en existe également dédiés aux sourds et malentendants.
Mais des dispositifs spécialisés sont parfois intégrés au sein des écoles ordinaires ou spécialisées. C'est le cas des "groupes d'enseignement spécial ou encore des classes d'éducation spécialisée pour ceux ayant des déficiences intellectuelles sévères. Un modèle qui n'est pas sans rappeler les dispositifs français que sont les Ulis (unités localisées d'inclusion scolaires).
Une hétérogénéité de la politique d'inclusion au niveau local
Dans plusieurs pays, comme en Suède ou en Angleterre, ce sont les autorités locales qui ont la compétence de mettre en œuvre les politiques éducatives.
Mais c'est en Allemagne que l'hétérogénéité est la plus importante, du fait de la décentralisation de l'État. Chaque Land définit sa loi sur l'école et décide ainsi quelles mesures d'inclusion mettre en place. Ces mesures peuvent recouvrir aussi bien des aménagements matériels au sein des écoles que la fermeture progressive des établissements spécialisés.
De fait, certains Länders continuent de faire reposer leur stratégie de prise en charge des élèves en situation de handicap encore davantage sur les écoles spécialisées que sur les écoles inclusives. "Les politiques en faveur de l'inclusion sont très hétérogènes, et ce malgré les textes internationaux ratifiés par l'Allemagne", déplorent les sages de la rue de Cambon.