Insertion des diplômés des grandes écoles : une sensible amélioration

Sophie Blitman Publié le
La reprise entamée en 2011 se confirme : tel est le constat qui ressort de l’enquête de la Conférence des grandes écoles (CGE) sur l’insertion professionnelle des jeunes diplômés. La proportion de jeunes ingénieurs et managers en activité progresse, tandis que les rémunérations augmentent, quoique cette hausse ne suive pas l’inflation.

Dans sa 20e édition de son enquête sur l’insertion des jeunes diplômés, la Conférence des grandes écoles (CGE) note globalement une amélioration de la situation, alors même que la crise économique continue de sévir et que les prévisions des écoles de commerce n’étaient pas très optimistes. Pour Bernard Ramanantsoa, directeur de HEC et président de la commission Aval de la CGE, cette résistance des jeunes ingénieurs et managers est le signe « d’une flexibilité et d’une capacité d’adaptation de nos élèves et de nos écoles ».

Ces bons résultats confortent aussi l’idée que le diplôme d’une grande école reste une barrière contre le chômage, comme en témoigne un marché de l’emploi relativement favorable pour les cadres. En outre, ils témoignent du fait que les diplômés de grandes écoles sont recrutés avant les autres, même en période de restriction d’embauches. A noter : l'enquête a été réalisée début 2012 auprès des diplômés 2011 et 2010.

Les taux d’emploi confirment une reprise 

Début 2012, seuls 13 % des diplômés des grandes écoles étaient en recherche d’emploi

Si l’amélioration des taux d’emploi est moindre que l’an passé, l’enquête de la CGE confirme l’inversion de tendance constatée en 2011. En effet, début 2012, seuls 13 % des diplômés des grandes écoles étaient en recherche d’emploi : c’est trois points de moins qu’en 2011, et six de moins qu’en 2010.
Autre indicateur, 70,6 % des diplômés 2011 des grandes écoles (69,2 % des ingénieurs et 73,8 % des managers) sont en activité professionnelle au 1er janvier 2012, contre 69,4 % un an plus tôt.
Le taux net d’emploi gagne, lui, près d’un point, en passant de 84 % à 84,9 %. Avec un net avantage du côté des ingénieurs qui gagnent 1,5 % (de 84,2 à 85,7 %) quand les managers sont en très léger recul, de 83,7 à 83,5 %.

Nombreuses poursuites d’études chez les ingénieurs

Expliquant notamment cet écart entre taux d’emploi et taux de diplômés en activité professionnelle, 12 % des jeunes issus de grandes écoles poursuivent leurs études, essentiellement des ingénieurs : ils sont 16 % de la promotion 2011 dans ce cas, contre 4 % dans les écoles de commerce.
Si les mastères spécialisés les attirent, témoignant selon le directeur de HEC Bernard Ramanantsoa d’une « appétence pour les formations de nos grandes écoles », c’est la recherche qui absorbe l’essentiel des flux. Le directeur de HEC y voit « le fruit de l’effort mené depuis plusieurs années par les écoles d’ingénieurs pour montrer l’importance de la recherche ».

Des relations écoles-entreprises cruciales 

82,5 % des diplômés sont en situation d’emploi moins de 2 mois après leur sortie d’école

Concernant la recherche d’emploi, la proportion d’étudiants qui ont signé un contrat avant la sortie de l’école est en hausse : 82,5 % des diplômés (84,1 % dans les écoles d’ingénieurs et 78,5 % dans les écoles de commerce) sont en situation d’emploi moins de 2 mois après leur sortie d’école.
Sur ce point, « l’enquête CGE fait apparaître l’importance de la relation des écoles avec le monde du travail », indique Bernard Ramanantsoa. En effet, 45 % des jeunes diplômés disent avoir trouvé leur emploi par l’intermédiaire de leur établissement, qu’il s’agisse d’un forum emploi, d’une offre diffusée par le service insertion, d’un contact avec un ancien de l’école…
En particulier, le stage de fin d’étude reste la principale voie d’accès à l’emploi, notamment pour les ingénieurs puisqu’ils sont 28 % à transformer leur stage en emploi, contre 19 % pour les managers.
D’autre part, à l’encontre de certaines idées reçues, le directeur de HEC souligne que « les relations personnelles ne permettent qu’à 11% des jeunes diplômés de trouver un emploi » (15 % en école de commerce, 10 % en école d’ingénieurs).

Davantage de CDI

Enfin, la stabilité des emplois est également plus grande, puisque 79,8 % des diplômés 2011 ont été embauchés en CDI, contre 76,2 % pour la promotion précédente. Si elle touche tous les diplômés, cette amélioration bénéficie particulièrement aux ingénieurs qui passent devant les managers, alors que la situation était comparable en 2011 : désormais, ils sont 80,2 % en CDI, contre 79,4 % pour les managers.

Face à ces résultats, la CGE souligne que « nous n’avons pas rejoint le sommet d’avant la crise, mais les niveaux actuels peuvent être considérés comme élevés ». Et de conclure : « cette situation tranche avec le pessimisme ambiant et l’augmentation constatée du chômage fin 2011 et début 2012 ».

Des rémunérations en hausse, mais pas en euros constants

Les salaires annuels bruts des diplômés de grandes écoles atteignent un niveau moyen de 37 268 € (primes comprises)

Qu’ils soient ingénieurs ou managers, les salaires annuels bruts des diplômés de grandes écoles augmentent, pour atteindre en 2012 un niveau moyen de 37 268 € (primes comprises), contre 35 840 € en 2011, soit une hausse de près de 4 %. Des rémunérations encore inférieures à celles de la promotion 2010, mais comparables à celles des diplômés de la promotion 2009.
Pour les ingénieurs, les salaires passent, en un an, de 34 800 € à 36 400 €. Dans les écoles de commerce et de management, ils augmentent de 38 400 € à 39 200 €.

Petit bémol à ces bons résultats, si l’on prend en compte les rémunérations en euros constants, on observe une baisse des salaires des diplômés des grandes écoles depuis 2000, prise comme année de référence par la CGE.

Les secteurs d’activité les plus attractifs

D’une manière générale, l’enquête de la CGE fait apparaître une nette tendance à l’externalisation, comme en témoignent les proportions importantes de diplômés qui débutent dans les bureaux d’études et sociétés de conseil. En forte hausse chez les jeunes managers, ce taux représente désormais 15 % de leurs premiers emplois. Et s’il baisse chez les ingénieurs, ils sont encore 16,5 %, soit un sur six dans ce cas.

> Pour les jeunes ingénieurs
Pas de surprise concernant les secteurs d’activité finale dans lesquels les diplômés d’écoles d’ingénieurs trouvent leur premier poste : l’industrie des transports confirme sa place de premier employeur en accueillant 19 % des diplômés, devant le BTP qui progresse également, rassemblant 11,7 % des jeunes diplômés. Le secteur de l’énergie, lui, repart sans revenir, cependant, aux niveaux d’avant 2010 ; il représente désormais 10,2 % des emplois.

> Pour les jeunes managers
Malgré la crise financière, le secteur de la banque et de l’assurance est toujours le premier recruteur de jeunes managers (16,9 % des emplois des diplômés 2011), suivi par les cabinets d’audit et l’expertise-comptable à égalité avec le commerce et la distribution (10,9 %).
A noter aussi qu’en dehors des secteurs traditionnels et quoique représentant des flux plus marginaux, les médias et la culture, ainsi que le luxe attirent de plus en plus les diplômés d’écoles de commerce et de management, rassemblant respectivement 4,7 % et 4,1 % des diplômés 2011.

Les écarts hommes / femmes perdurent

L’insertion professionnelle des jeunes femmes diplômées des grandes écoles reste moins favorable que celle des jeunes hommes. Raison majeure évoquée par la CGE : les secteurs d’activité choisis par les jeunes filles sont d’une manière générale assez peu rémunérateurs.

Une femme ingénieure gagne 2800 € de moins qu’un homme par an. Un écart qui atteint même 5700 € pour les managers

Ainsi, alors qu’elles sont en moyenne minoritaires dans les écoles d’ingénieurs, les jeunes filles investissent massivement les écoles de chimie ou d’agroalimentaire, secteurs où les salaires sont plus bas… De même, dans le secteur du BTP, comme le souligne Florence Darmon, directrice de l’ESTP, elles optent « davantage pour la conception et les bureaux d’études que pour la construction qui paie mieux ». Quant aux diplômées d’écoles de commerce, elles aiment travailler dans des agences de pub ou le luxe, qui rémunèrent nettement moins que les grandes banques…
Résultat : une femme ingénieure gagne 2800 € de moins qu’un homme (en salaire brut annuel, primes et avantages inclus). Un écart qui atteint même 5 700 € pour les managers.

Cependant, affirme Florence Darmon, « à poste équivalent, la rémunération est équivalente : pour peu que les femmes choisissent le même métier que les hommes, les salaires sont rigoureusement identiques ». Et de souligner qu’ « à la sortie de l’école, les entreprises jouent le jeu ». Même si, par la suite, les évolutions de carrière sont souvent différentes, en raison notamment de facteurs culturels et sociaux.
Au-delà de la rémunération, c’est au niveau de la stabilité de l’emploi que les différences de sexe sont les plus visibles, puisque 24 % des jeunes femmes diplômées sont en CDD, soit deux fois plus que les jeunes hommes.

L’international attire surtout les jeunes managers  

88% des diplômés démarrent sa carrière en France

Si l’international attire globalement les jeunes, cela ne se traduit pas nécessairement tout de suite par un emploi à l’étranger : l’enquête de la CGE montre ainsi que la très grande majorité des diplômés (88 %) démarre sa carrière en France. Et ce, alors que les salaires sont souvent plus élevés à l’étranger et que les jeunes actifs expatriés manifestent en moyenne une grande satisfaction vis-à-vis de leur situation professionnelle.
Mais dans ce domaine, les différences sont grandes selon le type d’établissement. En effet, 18,2 % des diplômés d’écoles de commerce partent à l’étranger pour leur premier emploi, contre seulement 9,7 % de leurs homologues d’écoles d’ingénieurs. On peut également souligne que l’international attire davantage les hommes que les femmes.

Pour les 12 % qui choisissent de s’expatrier après l’école, les destinations les plus lointaines ne sont pas les plus pourvoyeuses d’emploi : c’est en effet la Suisse qui accueillent le plus de jeunes diplômés, suivie du Royaume-Uni et de l’Allemagne.

Cependant, débuter en France ne ferme pas les perspectives internationales, au contraire ! Comme le souligne le directeur de HEC Bernard Ramanantsoa, « beaucoup d’entreprises françaises sont prêtes à envoyer des jeunes à l’étranger une fois qu’ils ont passé un ou deux ans en France ».

 Lire l'intégralité de l'enquête 2012 Insertion jeunes diplômés de la CGE.

Sophie Blitman | Publié le