Une « jeunesse coupée en deux » : tel est le constat de départ dressé par le sociologue Olivier Galland et les économistes Pierre Cahuc, Stéphane Carcillo et André Zylberberg, qui s’attachent à analyser les causes de cette fracture. Pointant le « rôle exorbitant du diplôme dans l’insertion professionnelle », ils rappellent, enquêtes à l’appui, les difficultés des non-diplômés à trouver un emploi : « au bout de trois ans de vie active, le taux de chômage des sans-diplôme s’élève à 30 %, soit trois fois plus que celui des titulaires d’une maîtrise et dix fois plus que celui des anciens élèves d’une école de commerce ou d’ingénieur ».
En cause, le fonctionnement du système scolaire, et surtout ses dysfonctionnements. Revenant sur les résultats de l’évaluation internationale Pisa, les auteurs montrent comment l’école, loin de réduire les inégalités sociales, les accroît au contraire : le poids de la famille reste prépondérant, tandis que les programmes, voire les méthodes pédagogiques ainsi que, plus tard, le processus d’orientation, pénalisent les élèves issus des milieux les plus défavorisés.
Les chercheurs prônent ainsi une réforme du système scolaire (réduction du « primat des disciplines », allègement des programmes, révision des méthodes d’évaluation), accompagnée de mesures sociales comme l’extension du RSA aux moins de 25 ans avec davantage de contreparties, ou l’instauration d’un contrat unique de travail. Quant au financement de cette politique, il résulte selon eux avant tout d’un choix politique, face à celui de baisser la TVA dans la restauration ou de défiscaliser les heures supplémentaires.
La Machine à trier. Comment la France divise sa jeunesse, par Pierre Cahuc, Stéphane Carcillo, Olivier Galland, André Zylberberg, Paris, Eyrolles, 2011, 12 €.