La réforme de la taxe d’apprentissage peu favorable aux grandes écoles

Jessica Gourdon Publié le
La réforme de la taxe d’apprentissage peu favorable aux grandes écoles
Argent // © 
Nicolas Sarkozy a annoncé une réforme de la taxe d’apprentissage , qui selon la CGE (Conférence des grandes écoles), va diminuer les ressources des grandes écoles. La part de la taxe directement affectée aux établissements de formation sera désormais plafonnée en valeur absolue. Explications.

La réforme de la taxe d’apprentissage fait grincer des dents la Conférence des grandes écoles (CGE). Les mesures annoncées le 1er mars 2011 par Nicolas Sarkozy vont entrainer une perte de ressources pour ces établissements. De l’ordre de 3 à 4% par an chiffre Pierre Tapie, le directeur de l’Essec et président de la Conférence, dans « Les Echos ».

Plafonnement du "barème"

De quoi s’agit-il ? Le « barème », c’est-à-dire la part de la taxe d’apprentissage que les entreprises peuvent affecter aux écoles de leur choix, sera désormais figée en valeur absolue, sur la base de l'année 2011. Elle était jusqu'à présent fixée à 48% du total de la taxe. Seule la partie « quota » - les 52% restants -  pourra augmenter à l’avenir, à savoir la partie destinée à financer les CFA et les contrats d’apprentissage proprement dits. D’après l’Elysée, cette réforme vise à financer davantage de contrats d’apprentissage, en dégageant des ressources supplémentaires : 350 millions d’euros attendus d’ici à 2015.

Pour comprendre l’enjeu de cette énième réforme, il faut savoir que la taxe d’apprentissage (2,1 milliards d’euros) représente aujourd’hui 10% en moyenne du budget d’une grande école, « et dans certaines, cela peut monter jusqu’à 20% », souligne Pierre Aliphat, délégué général de la CGE. Sachant qu’environ 10% des étudiants en master dans les grandes écoles sont des apprentis.

Des conséquences  « dramatiques »

Avec la réforme actuelle, « la partie barème ne peut que se tarir, car toute augmentation future sera affectée au quota », regrette Pierre Aliphat. « Pour les grandes écoles, c’est dramatique, car leurs marges budgétaires sont hyper étroites, et les exigences internationales de plus en plus fortes ». Reste que, grâce à son lobbying, la CGE a évité le pire : l’hypothèse d’une baisse du barème à 28%, un temps évoquée, a été écartée.

L’impact de cette réforme risque néanmoins d’être important. En effet, contrairement au barème, qu’elles récoltent directement auprès des entreprises, les écoles ont peu de marges de manœuvre pour augmenter leurs ressources issues de la partie « quota ». Ce segment de la taxe est tributaire du nombre d’apprentis, lui même dépendant du nombre d’entreprises qui acceptent ces jeunes.

« Avec la crise, les entreprises sont plus réticentes à prendre des alternants, et les fonds disponibles sont moins importants, dans la mesure où la taxe d’apprentissage est fonction de la masse salariale », décrypte Pierre Aliphat. Une situation d’autant plus difficile que dans les écoles d’ingénieurs, la CTI (commission des titres d’ingénieurs) impose que l’apprentissage se déroule sur les trois années du cursus : « il est très difficile de trouver des entreprises qui s’engagent sur un si long terme », ajoute-t-il.

La CGE aimerait réduire l'aléa politique

De même, le nombre d’apprentis dans les grandes écoles dépend des priorités de formation fixées par les conseils régionaux, qui participent au financement des CFA par différents canaux. « Les politiques sont très variables d’une région à l’autre. Certaines misent principalement sur les niveaux IV et V (bac, BP, CAP), dans une perspective de cohésion sociale. D’autres panachent », constate Pierre Aliphat.

Afin de réduire l’aléa politique et sécuriser le financement des formations en apprentissage de niveau I (bac+5), la CGE demande une suppression du FNDMA (fonds national de développement et de modernisation de l’apprentissage, créé en 2005), ainsi que d’autres fonds qui "saucissonnent" cette taxe d'apprentissage (CSA, CDA). Avec un objectif : donner plus de marges aux entreprises afin qu’elles fléchent leur contribution « là où elle le veulent ».

Jessica Gourdon | Publié le