L’École de design de Nantes s’exporte à Shanghai

Sophie de Tarlé, envoyée spéciale à Shanghai Publié le
L’École de design de Nantes s’exporte à Shanghai
Shangai // © 
Contrairement aux écoles de commerce et d’ingénieurs, les écoles d’art sont encore peu présentes en Chine. Implantée depuis 2008 dans l’Empire du milieu, l’École de design Nantes-Atlantique fait figure de pionnière. Et vient de signer un nouveau partenariat de trois ans avec l’université de la municipalité de Shanghai. Reportage.



«Je souhaite avant tout offrir de nouvelles opportunités professionnelles aux étudiants», a annoncé Christian Guellerin, directeur de l’École de design Nantes-Atlantique , en signant une nouvelle convention de trois ans avec le vice-président de l’université de Shangha i.

En septembre 2012, 27 étudiants français ont fait leur rentrée dans le master «design et interculturalité» de l’école de design hébergé par la faculté des beaux-arts de Shanghai. Ce cursus de deux ans en anglais comprend deux stages de six mois, ainsi que des conférences et ateliers avec des professionnels venus des quatre coins du monde. Élèves de quatrième année, Kévin Bichaud, 22 ans, et Arnaud Le Devehat, 21 ans, sont à peine arrivés qu’ils commencent déjà un stage dans des agences de design asiatiques. «Les Français sont très appréciés ici, et le pays en plein essor économique est friand de talents occidentaux», mentionne Kévin.
 
Soutenue par la chambre de commerce et d’industrie de Nantes-Saint-Nazaire, l’École de design Nantes-Atlantique a d’abord noué en 2008 un partenariat avec l’université de Qingdao dans le Shandong, avant de s’implanter en 2010 à Shanghai, plus porteur en termes de débouchés professionnels. L’école y dispose d’une équipe de quatre permanents et occupe gracieusement plusieurs salles, soit environ 200 m2 de la faculté des beaux-arts, l’un des 28 instituts de l’université de la municipalité de Shanghai. Le budget de fonctionnement de cette antenne chinoise est de l’ordre de 80.000 à 120.000 € par an.

L’université chinoise veut tisser plus de liens avec les entreprises…


Si l’université de Shanghai accueille gracieusement les étudiants français dans ses locaux, c’est qu’elle y voit un intérêt. En effet, l’enseignement aux Beaux-Arts de Shanghai étant très classique, les responsables chinois aimeraient profiter de l’expérience de l’École de design de Nantes pour nouer davantage de liens avec le milieu professionnel. «Actuellement, déclare l’un des responsables de l’université de Shanghai, venu accueillir en grande pompe la délégation nantaise, nos quatre objectifs sont de développer l’international, d’attirer des étudiants étrangers, de développer la recherche et de nouer plus de liens avec les entreprises.»

… et accueillir davantage d’étudiants étrangers


 Sur son campus de 9 km2, l’université de Shanghai accueille actuellement 3.000 étrangers (sur 30.000 étudiants) venus essentiellement de pays proches, avec, par ordre d’importance, la Corée, la Thaïlande et le Japon. L’objectif est aujourd’hui d’accueillir plus d’étudiants européens et américains. Seul frein à cette entreprise : la barrière de la langue. Le partenariat avec l’École de design de Nantes est un moyen d’y remédier. La création d’un diplôme commun entièrement en anglais pourrait se faire jour dans les années qui viennent. Aujourd’hui, les étudiants français du master «design et interculturalité» n’ont pas de cours avec des étudiants chinois, hormis quelques workshops ponctuels.

Pouvoir dupliquer le modèle à l’étranger


Pour l’école de Nantes, l’intérêt de ce partenariat est plus évident : «Il s’agit pour nous d’apprendre la culture chinoise et d’offrir des opportunités économiques pour nos étudiants au-delà du simple voyage culturel de quelques mois. Enfin, cet ancrage en Chine participe au rayonnement de l’école», indique Christian Guellerin, le directeur, qui est aussi président de Cumulus (association internationale d’écoles de design).

«Mais, à terme, explique-t-il, si nous voulons accueillir plus de 60 étudiants à Shanghai, nous devons imaginer une entité juridique plus solide afin d’assurer la pérennité de notre école, pour pouvoir éventuellement dupliquer ce modèle à l’étranger.» L’école de design est bien partie… Elle possède déjà une autre antenne en Inde avec la Srishti School of Art de Bengalore .


Cinq clés pour réussir un partenariat avec une université chinoise

Comment l’école de design Nantes-Atlantique a réussi à nouer un partenariat avec la faculté des Beaux-arts de Shanghai ? Revue de détail en cinq points clés.
 
1. Miser sur ses distinctions. En tant que président de Cumulus, une association internationale d’école de design, Christian Guellerin a d’abord croisé plusieurs fois le doyen de l’école à une convention, ce qui l’a beaucoup aidé à se rapprocher par la suite de l’université de Shanghai.

2. Mettre en avant les liens avec les entreprises. Le fait que l’école française soit si liée au milieu professionnel a été un sérieux atout. La faculté des Beaux-arts de Shanghai, très traditionnelle, souhaitait justement se rapprocher des entreprises.

3. Recruter quelqu’un sur place. Un VIE (volontariat international en entreprise) qui vivait sur place et qui parlait chinois a permis de déblayer le terrain, de savoir qui rencontrer, et de préparer la venue de Christian Guellerin en Chine.

4. Se montrer patient. En Chine, tout projet de qualité est un projet qui se construit sur le long terme.

5. Respecter le protocole et la hiérarchie. Tout est ouvert en Chine, mais il faut toujours prévenir à l’avance ses hôtes du contenu d’une prochaine discussion. « Il faut faire très attention à ne pas poser une question à laquelle l’interlocuteur serait susceptible de ne pas pouvoir répondre. Il faut être vigilant à ne pas lui faire perdre la face », explique Christian Guellerin.

Sophie de Tarlé, envoyée spéciale à Shanghai | Publié le