Les économies des réformes de Xavier Darcos

Fabienne Guimont Publié le
Les économies des réformes de Xavier Darcos
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La réforme du lycée, dont Xavier Darcos doit annoncer ce mardi 21 octobre 2008 les premières mesures sur la classe de seconde, permettra-t-elle au ministère de faire des économies ? Le ministère de l’Education nationale s’est engagé parallèlement sur deux réformes d’ampleur –  réforme du lycée et recrutement des enseignants au niveau master – qu’il veut voir aboutir dans des délais très serrés. Même s’il affirme penser les réformes « au service des élèves » pour l’une et « avec l’objectif d’améliorer le recrutement des enseignants » pour l’autre, en se défendant de les envisager dans une perspective comptable, les deux chantiers ouverts pourraient, d’après les premières hypothèses formulées, conduire à économiser de nombreux postes. En contrepartie, le ministère se "dédouane" en revalorisant les débuts de carrière des enseignants.

Avec les suppressions prévues de 13 500 postes d’enseignants à la rentrée 2009 qui suivent celles de 11 200 à la rentrée 2008, les gestionnaires de l'Education nationale n’iraient quand même pas jusqu’à bouder leur plaisir si réformes rimaient avec une réduction des coûts. Les réformes joueraient-elles en faveur de cette hypothèse ?  

1. Moins d’heures pour les lycées, moins de profs ?

La réforme du lycée ne va pas abonder dans le sens d’une augmentation des postes enseignants. Avec 975 heures par an prévus pour les élèves de seconde – y compris l’accompagnement éducatif - au lieu de 1152 aujourd’hui (en moyenne), le nombre de postes économisés mécaniquement est évalué à 4800, selon le SE-Unsa. « C’est un minimum, car on n’a pas de réponse en terme d’horaire par enseignant, seulement le nombre d’heures par élèves pour le moment », analyse Guy Barbier, responsable des questions budgétaires dans ce syndicat. Pour son homologue du SNES-FSU, en passant de 28 à 32 heures pas semaine en moyenne actuellement à 27 heures maximum en seconde y compris l’aide individualisée comme l’envisage la réforme du lycée, le ministère pourrait économiser entre 2700 et 3600 emplois. En première ou en terminale, l’hypothèse d’une heure perdue pour les enseignants représenterait une économie de 1000 emplois.

Quid des heures d’accompagnement ?

Les économies ne peuvent encore être chiffrées avec précisions. Les modalités de la mise en œuvre de la réforme feront toute la différence. Les dédoublements de classes peuvent brouiller encore ces chiffres par exemple. Quelles seront au final les disciplines du tronc commun qui se font souvent en classes dédoublées ? Les sciences expérimentales, un temps écartées semblent avoir réintégré le tronc commun. Quid des heures d’accompagnement ? « Une heure de soutien faite par un assistant d’éducation à la place d’un enseignant permettra d’économiser des emplois », illustre Fabienne Bellin, en charge de la politique scolaire et des questions budgétaires au SNES.

Le ministère affirme de son côté vouloir appliquer la réforme avec la nouvelle seconde en 2009 à moyens constants pour le lycée, en tablant notamment sur les baisses démographiques des élèves. Le nombre de lycéens remonterait dès 2010, selon les dernières projections statistiques disponibles.

2. Mastérisation : la fin des stagiaires rémunérés  

Dans la forme actuelle du recrutement des enseignants, le concours est suivi d’une année où les lauréats sont stagiaires et suivent une formation en alternance. Dans ce cadre, ils sont devant une classe pendant huit heures en moyenne (pour les Capes) et rémunérés environ 1500 euros par mois. Avec la mastérisation du recrutement, l’année du concours – en master 2 – ne serait plus rémunérée. Après le concours, les jeunes lauréats feraient cours pendant 18 heures par semaine, en responsabilité devant les élèves, dès la rentrée suivante. A partir de septembre 2010, le ministère devrait pouvoir ainsi économiser le coût des postes de stagiaires dans le 1er et le 2d degrés. Avec une moyenne, sur les cinq dernières années, de 25 000 postes de stagiaires-fonctionnaires, l’économie se chiffrerait à quelque 750 millions d’euros (salaires, cotisations sociales, pensions incluses), selon les estimations de l’UNSA-Education. Une hypothèse haute car le nombre de postes mis au concours - et mécaniquement le nombre de postes de stagiaires - n’a cessé de diminuer depuis 5 ans. Pour le SNES-FSU, 3900 postes de stagiaires dans le second degré seraient récupérés dès la première année de cette réforme.  

Deux promotions d’enseignants à la rentrée 2010  

Cette année, 4000 postes d’enseignant stagiaires dans l’enseignement public (3000 en moins dans le 1er degré et 1000 dans le 2d degré) ont été supprimés. Un signe avant-coureur de futures diminutions des postes enseignants ou une simple conséquence ponctuelle de deux générations de lauréats prévues d’arriver sur le terrain en septembre 2010 ? En effet, le ministère pourrait à cette date compter sur deux viviers de lauréats : les candidats retenus en 2009 avec une licence en poche, après leur année de stage, et ceux recrutés en 2010 avec un master, qui seront directement affectés devant les élèves sans passer par l’année de formation en alternance. Un tutorat par des enseignants expérimentés est en revanche prévu pendant leur première année d’enseignement.

Fabienne Guimont | Publié le