Les efforts des établissements pour s’emparer du développement durable

Pauline Bluteau Publié le
Les efforts des établissements pour s’emparer du développement durable
Des campus plus verts et plus respectueux de l'environnement : un vœu pieux qui tarde à se mettre en place. // ©  Nicolas Tavernier/REA
Depuis quelques années, de nombreux établissements s’activent pour créer des campus plus impliqués dans la transition écologique. Au-delà des stratégies de communication, les grandes écoles et les universités ont dû développer leur propre méthode pour s’emparer du sujet.

C'est un fait : les établissements sont de plus en plus nombreux à agir en faveur du développement durable sur leurs campus. Le 19 février dernier, 30 projets ont d'ailleurs été présentés au ministère de la Transition écologique et solidaire. Ecoles de commerce, d'ingénieurs et universités, principalement, ont été récompensées à l'occasion de la remise des trophées des campus responsables. C'est deux fois plus que lors de l'édition précédente.

Les démarches autour de l'écologie prennent de l’ampleur, comme le confirme Valérie Le Chenadec, chargée de mission DD&RS (développement durable et responsabilité sociale) à l’université Paul-Valéry de Montpellier : "On constate une véritable marche en avant de la part des établissements et c’est très appréciable." Grandes écoles et universités l’affirment : tout l’enjeu est de créer des campus plus verts et responsables. Pour cela, chaque établissement a sa propre stratégie.

Une prise de conscience très récente

"Tout a commencé en 2015 : la COP 21 a donné une impulsion aux établissements qui ont alors décidé de s’emparer du sujet", juge Valérie Le Chenadec. Dans de nombreux établissements, ce n’est qu’à partir de 2016 que les chargés de missions DD&RS ont véritablement vu le jour. À l’université de Nanterre, le service RSU-DD (dédié à la responsabilité sociétale des universités et au développement durable) a été lancé en 2017 par la volonté du président de l’université, Jean-François Balaudé. "Cela permet de donner plus de visibilité à nos actions et de mutualiser les forces", explique Arnaud Exbalin, responsable du service.

L’INSA Lyon fait partie des exceptions. Dès 2001, l’école d’ingénieurs met le sujet de l’écologie au centre des discussions. "Le développement durable est très vite devenu un enjeu stratégique pour l’établissement, estime Mathieu Bouyer, responsable développement durable. En 2015, tout s’est accéléré. Nous avions d’un côté des étudiants en quête de sens, des entreprises qui ne parvenaient pas à convaincre nos étudiants de rester et des enseignants qui n’étaient pas formés pour répondre à toutes ces problématiques. Nous avons donc signé une charte d’engagement dans le but d’obtenir le label DD&RS, c’est chose faite depuis 2019."

Les établissements de plus en plus acteurs du développement durable

Ce label permet aux établissements de tenir une feuille de route sur la question du développement durable. Les actions se multiplient pour créer des campus éco-responsables. À l’université de Montpellier, l’objectif est avant tout de former les enseignants et le personnel administratif.

Les établissements ont compris la nécessité d'agir, toutes les composantes des universités prennent des initiatives en ce sens. (V. Le Chenadec)

Outre la sensibilisation, les établissements privilégient aussi les actions très concrètes : distribution de gourdes, installation de poubelles de tri et de cendriers, bilan carbone, plantation d’arbres, création d’éco-jardins, gestion des eaux pluviales, valorisation de la biodiversité…

"On profite de nos 40 hectares d’espaces verts pour mettre en place différentes actions environnementales et sociétales, indique le responsable de l’université de Nanterre. Les ruches nous ont par exemple permis de modifier nos pratiques : nous n’utilisons plus aucun pesticide. Nous allons aussi former les étudiants qui le souhaitent au métier d’apiculteur. Nous sommes dans une logique circulaire."

De son côté, l’IESEG est parvenue à éliminer 85% des déchets plastiques, notamment au niveau de la restauration. L’école de commerce est aussi attentive au respect des normes environnementales concernant la construction d’un nouveau bâtiment sur le campus lillois.

Des grandes écoles en avance

Bien que toutes ces initiatives aillent dans le bon sens, force est de constater que les grandes écoles semblent avoir plus de facilité à agir sur la transition écologique. À titre d’exemple, depuis 2016, 21 grandes écoles se sont vu attribuer le label DD&RS, l’un des plus importants et des plus connus, contre seulement six universités. "C’est une réalité, les universités vont moins vite que les grandes écoles pour ce qui est du développement durable", confirme Valérie Le Chenadec.

Plusieurs facteurs freinent les universités dans leur démarche : le fonctionnement complexe et ralenti de l’administration, une faible voire inexistante valorisation des actions, un manque de moyen humain et la taille des universités qui ne facilite pas la mise en place des actions. "Le développement durable est un sujet transversal, tous les services de l’université sont donc concernés mais pour avoir plus légitimité, un appui fort de la gouvernance est indispensable", explique Valérie Le Chenadec.

Le soutien des étudiants est aussi nécessaire mais là encore, tout dépend de l’établissement. "Leur implication est fondamentale, affirme Mathieu Bouyer. Ils sont à l’origine de toutes les démarches entreprises au sein de l’INSA. Jusqu’à présent, ils n’avaient pas conscience de leur légitimité pour intervenir sur ces questions alors qu’ils ont un réel pouvoir de changement." Un fonctionnement rendu possible grâce à la très grande proximité des étudiants vis-à-vis de leur campus.

Des projets ambitieux dans les universités

Selon Loïc Ingea, responsable campus au REFEDD (réseau français des étudiants pour le développement durable), la plupart des établissements avancent de manière positive sur la transition écologique mais avec des stratégies bien différentes. "D’un côté, certaines écoles en profitent pour paraître plus attractives envers les étudiants, d’autres privilégient des actions coups de poing très ciblées alors que les universités, elles, sont moins visibles mais ont des projets nettement plus ambitieux qui vont sur le long terme."

Ce n'est pas parce que nous ne candidatons pas aux différents labels et trophées que nous ne faisons rien. (A. Exbalin)

D’après le responsable de l’université de Nanterre, tout l’enjeu sera de mesurer les effets des différentes actions dans les années à venir pour savoir s’il s’agissait d’une simple stratégie de communication ou d’une réelle avancée.

Pauline Bluteau | Publié le