« Dès que j’ai accédé à un poste de pouvoir, je me suis sentie attaquée. En tant que directrice des parcs et jardins de la Ville de Paris, j’avais une majorité d’hommes sous ma responsabilité. Lorsqu’on est une femme, il faut toujours en faire plus, prouver qu’on est meilleure car on ne nous pardonne rien », déplore Isabelle Duchefdelaville, diplômée de l’ENA, membre du réseau « Grandes écoles au féminin » (GEF). Les différences entre hommes et femmes perdurent, tel est le constat dressé par l’étude « Parcours professionnel des diplômés des grandes écoles : regards croisés hommes/femmes » , menée par GEF (CCI de Paris) auprès de neuf grandes écoles.
À études et à âge égal, seules 28 % des femmes siègent à des comités de direction, contre 43 % pour les hommes. L’encadrement aussi reste très masculin : à 76 %, contre 63 % pour les femmes. Quant aux salaires, l’écart s’établit à 18 % dès le premier emploi pour les moins 30 ans, et il s’accentue pour atteindre 24 % pour les 46-50 ans. Si les femmes pointent ces décalages, les hommes, eux, ne les perçoivent pas. Seuls 37 % d’entre eux ont remarqué des différences, contre 65 % des femmes. Et ils ne sont que 49 % à penser que leurs consoeurs issues des grandes écoles sont ralenties dans leur carrière (contre 77 % des femmes).
Autre surprise : ce ne sont pas tant la maternité et le manque de mobilité qui sont considérés comme des freins, mais le fait que les femmes ne « valorisent pas leur travail, ne demandent pas de promotions et ont moins le goût du pouvoir ». Véronique Ezratty a ainsi quitté son poste à la RATP pour créer sa société de conseil : elle se voyait bloquée au bout de quatorze ans d’ancienneté. « J’étais considérée comme un bon élément, mais je n’ai jamais eu de promotion, alors que les hommes en ont obtenu, explique l’ancienne diplômée de l’École centrale. Je n’ai sûrement pas su me vendre comme ils le faisaient. »