Manifestation du 7 octobre : paroles de profs en colère

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Manifestation du 7 octobre : paroles de profs en colère
Manifestation du 7 octobre 2008, à Paris. // © 
A l’appel du SNES, de la FSU, de l’UNSA, de la CFDT, de la CGT, de l’UNSA et de la CFE-CGC, les enseignants du primaire et du secondaire ont manifesté le 7 octobre 2008, à Paris et en province. Si ce mouvement qui a été relativement peu suivi fait figure de ballon d’essai pour la manifestation nationale du 19 octobre 2008, dans le cortège parisien, les doléances des enseignants étaient nombreuses. Témoignages. 

Bernard Galin, professeur de mathématiques au lycée Romain Roland d’Ivry-sur-Seine (94)

« Cinq postes supprimés cette année, cinq l’an passé… Cette rentrée n’est pas pire que les deux précédentes. Nous sommes simplement dans un lent processus de dégradation des conditions d’enseignement, toujours plus en flux tendu. Les classes chargées c’est devenu la règle. Pour l’anecdote, la semaine dernière j’ai dû donner ma chaise et mon bureau à un élève pour que tout le monde soit assis. Avec 35 élèves par classe, je sais pertinemment que la dizaine d’élèves qui ne suivent pas ne peuvent pas être suffisamment aidés. On nous parle d’autonomie des lycées mais tout est calculé au plus serré. On ne dispose de marge de manœuvre pour, par exemple, organiser des soutiens scolaires alors même que notre lycée compte un grand nombre d’élèves en grandes difficultés. »  

Philippe Achart, professeur de mathématiques au lycée Frédéric Mistral à Fresnes (94)

« Le pire c’est que l’on s’habitue à la dégradation des conditions de travail. Je suis dans un lycée très réputé qui attire de plus en plus d’élèves suite à la quasi suppression de la carte scolaire, mais les moyens ne suivent pas. Certes on s’arrange. On gère au quotidien. On ne compte pas les heures de présence que l’on fait sans être payé. On nous dit que le nombre d’élèves par classe n’est pas déterminant sur la réussite. Je peux vous dire que l’an passé j’ai fait l’expérience d’une classe en filière STG à 17 élèves. Ca change tout. Les conditions d’enseignement sont bien meilleures. On peut se permettre d’être moins répressif. Les élèves sont moins sous pression. Le travail d’accompagnement individualisé devient possible et les résultats suivent. »   

Pascale Balme, professeur de SVT (Sciences de la vie et de la Terre) au lycée Turgot à Paris

« Comme nous sommes dans l’un des lycées parisiens qui connaît le plus d’élèves en difficulté, nous avons heureusement été épargnés par la suppression des postes. Seulement la situation n’est pas pour autant satisfaisante. Nous sommes inquiets sur le devenir de notre matière, la SVT, qui risque, comme la physique et la chimie, d’être optionnelle avec la réforme du lycée dès l’année prochaine. Autant dire que l’on va tout droit vers une réduction des heures et une réduction des postes dans ces matières. Je ne suis pas sûre que cela soit la meilleure solution pour attirer les candidats vers les filières scientifiques… »  

Catherine Benazeraf, professeur d’anglais au lycée Turgot

« Avec 33 élèves par classe à raison de deux heures par semaine en terminale, comment voulez-vous que l’on forme correctement nos élèves à l’anglais ? Impossible que chacun s’exprime à l’oral. La priorité est censée être donnée à l’apprentissage des langues étrangères. Mais, dans les faits, rien ne change. En langue vivante 2, je me retrouve avec une classe qui est composée des trois filières : des L, des ES et des STG, de la première à la terminale. Non seulement ce ne sont pas les même niveaux mais en plus ils ne préparent pas les mêmes épreuves au bac, les uns ayant des oraux, les autres de l’écrit. Le pire c’est qu’on s’habitue à la pénurie. »  

Julien Sergène, professeur d’histoire et de lettres au lycée professionnel Eugène Delacroix à Drancy (93)

« Dans mon lycée la rentrée a été marquée par une semaine de grève. Parce que des postes étaient non pourvus, parce qu’il manquait des surveillants et des salles pour faire cours. Je me suis retrouvé à faire cours dans une salle de 22 places avec 26 élèves. C’est ma première rentrée et j’ai l’impression de faire face à une gestion strictement comptable. Ce n’est qu’en se mobilisant que l’on arrive à faire bouger les choses. J’ai plein de collègues qui se retrouvent en temps partagés sur plusieurs postes. C’est grâce à la mobilisation des enseignants qui l’an passé dans mon lycée ont refusé des heures supplémentaires que l’on a pu garder un poste complet. C’est le poste que j’occupe aujourd’hui. Mais attention aux pressions. Ceux qui n’acceptent pas les heures sup’ se retrouvent avec les pires emplois du temps. »

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