Médecine : les inspections préconisent l'ouverture d'une banque publique d'épreuves ECN

Martin Rhodes Publié le
Médecine : les inspections préconisent l'ouverture d'une banque publique d'épreuves ECN
En juin 2017, les étudiants en médecine avaient manifesté devant le ministère de l'Enseignement supérieur, suite à l'annulation de deux des épreuves classantes nationales. // ©  Aurore Abdoul-Maninroudine
Commandé à la suite de l'annulation de deux des épreuves classantes nationales en juin 2017, un rapport conjoint Igas-IGAENR vient d'être remis aux ministères. S'il identifie les dysfonctionnements à l'origine de ce que les étudiants ont appelé un "fiasco", le document propose également des évolutions du système. Parmi elles, la création d'une banque publique d'épreuves accessible à tous.

Un "défaut global d’organisation, couplé à une absence d’analyse des risques" dans la phase de conception des sujets. C'est ce que relèvent l'Igas (Inspection générale des affaires sociales) et l'IGAENR (Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche), dans leur enquête sur les annulations, en juin 2017, de deux des ECN (épreuves classantes nationales), venues remplacer l'ancien concours de l'internat.

Ce "fiasco" avait alors soulevé un tollé parmi les étudiants en médecine, poussant le ministère des Solidarités et de la Santé et celui de l'Enseignement supérieur, de la Recherche à demander l'ouverture d'une enquête conjointe Igas-IGAENR.
Près de six mois plus tard, le rapport des deux inspections est sur la table des ministères. Dans la synthèse détaillée du document, que s'est procuré EducPros, les causes de ces problèmes sont clairement identifiées.

L'impossible traçabilité des sujets

Si l'informatisation des épreuves et les avancées techniques opérées au cours des dernières années ne sont pas remises en cause, le rapport fustige en revanche le CSM (conseil scientifique de médecine, composé de professeurs d'université-praticiens hospitaliers) chargé de composer les sujets des ECN, pointant du doigt un contournement des procédures de sécurité par les experts et membres de ce conseil.

La synthèse constate que ces derniers disposaient de peu de temps pour produire et intégrer dans l'application nationale Ipomen (internat, pharmacie, odontologie, médecine numérique) un volume important d'épreuves (réelles, tests, de secours).

Pour gagner du temps, ils déléguaient le travail d'écriture à un seul et même membre familier de l'application, et utilisaient les identifiant du président, ce dernier bénéficiant des droits utilisateur les plus larges. Ces pratiques "ont rendu la traçabilité d'ensemble des sujets impossible", regrettent les inspections.

"La faiblesse du management du CSM" est également pointée du doigt. Les inspecteurs ont constaté que "le suivi individuel des experts a été faible, et l'organisation du travail non formalisée". Par exemple, aucun règlement intérieur n'a été mis en place par le CSM.

Des leçons à tirer pour 2018 ET 2019

Au-delà des constats, l'Igas et l'IGAENR émettent, comme il le leur avait été demandé par les ministères, une série de propositions pour améliorer les prochaines sessions. Dans l'immédiat, les inspections recommandent de passer de 200 à 500 experts, afin que le CSM puisse "encadrer davantage leurs travaux".

Pour une meilleure traçabilité, "la constitution des sujets sera réservée à l'année en cours, et le reliquat actuel de la banque Ipomen supprimé". Les experts travailleront uniquement sur la conception des sujets, qui seront saisis par un secrétariat. Un logiciel antiplagiat et une charte contraignante doivent également être rapidement mis en place.

La mission opte enfin pour une "refonte plus drastique" du système, en vue des ECN 2019. Les sujets pourraient ainsi être tirés au sort par le CSM dans une banque publique d'épreuves, accessible à tous. Selon les inspecteurs, il semble en effet impossible de concevoir des sujets originaux sans aucune similarité avec des sujets déjà traités.

Sans l'ouverture de cette banque publique d'épreuves, le risque serait donc réel de voir "les épreuves, et donc l'affectation des 8.000 internes, contestées de façons récurrente" au nom d'une rupture d'égalité de traitement entre les candidats, prédisent les inspections.

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