Menaces de départs en série dans les IUT de l’université de Caen

Morgane Taquet Publié le
Menaces de départs en série dans les IUT de l’université de Caen
Les responsables d'IUT ont repoussé leur ultimatum au 4 avril. // ©  Benoit Decout/REA
En Normandie, des chefs de départements d'IUT menacent de démissionner afin de protester contre la perte d'autonomie de leurs instituts. Le président de l’université de Caen-Normandie, leur établissement de rattachement, doit les rencontrer à partir du 4 avril.

Ils avaient prévu de déposer leur démission le 28 mars. Ils ont finalement repoussé l’ultimatum au 4 avril, date à laquelle ils doivent rencontrer le président de leur université. Dans la région de Caen, ex-Basse-Normandie, 19 chefs de départements d'IUT sur 21 menacent de quitter leur poste, pour protester contre la perte d'autonomie de leurs instituts. "Si nous sommes fiers de faire partie de l’université, nous avons également des spécificités en tant qu'IUT, et nous demandons plus de marge de manœuvre pour les accomplir", résume Carine Travert, directrice de l'IUT de Caen.

Outre les chefs de département, des responsables d'études et des responsables de licence professionnelle ont également mis leur démission dans la balance, portant ainsi le nombre de potentielles démissions à plus d'une vingtaine. Trois IUT dépendent de l'université de Caen-Normandie : Caen (11 départements), Alençon (quatre départements) et Cherbourg (six départements), soit environ 3.500 étudiants.

Investissements et heures complémentaires

Si les responsables de formation se mobilisent, c’est qu’ils craignent pour l'autonomie budgétaire de ces IUT. "Au niveau des éléments budgétaires, c'est désormais l'université qui gère l'enveloppe des heures complémentaires, regrette la directrice, qui assure également que l'université a fait le choix de diminuer l'investissement en leur faveur. En 2018, les IUT de Caen et Cherbourg ont ainsi vu leur part investissement diminuer de 100.000 euros chacun, "alors que nous avons du matériel et des machines à changer et que nos bâtiments ont 50 ans !", regrette Carine Travers.

"Globalement, sur 2018, le budget investissement des IUT n'a pas diminué, précise le président de l'université de Caen, Pierre Denise. Mais il est vrai que l'augmentation de 100.000 euros, demandée par les IUT, n'a pas pu être accordée. Nous sommes en plein débat d'orientation budgétaire pour 2019. Dans ce cadre, nous prévoyons un million d'euros supplémentaires en investissement. Évidemment les IUT seront aussi bénéficiaires de ces augmentations."

Quant à la question des heures complémentaires, Pierre Denise s'interroge : "Qu'appelle-t-on autonomie budgétaire ? Sur les heures complémentaires, elles doivent être attribuées là où il y a des besoins dans l'université et ses composantes".

Une fusion des IUT qui ne passe pas

Autre point de crispation : le lancement, contre l'avis des instituts, d’une réflexion portant sur la fusion des trois IUT. "Nous avons conscience que nous devons travailler davantage ensemble, mais le cadre nous semble très contraint. On ne nous parle que de fusion, et nous n'avons aucune marge dans le type de regroupement choisi", avance Carine Travers. Une décision qu'assume Pierre Denise. "Le conseil d’administration décide et est responsable de l'organisation interne de l'université, comme le permet la loi LRU. Nous souhaitons une fusion, oui, mais nous laissons aux IUT le soin d'organiser le projet comme ils le souhaitent."

Pour la directrice de l’IUT de Caen, c'est la particularité même des instituts qui est en jeu. "L'université est dans une période d'harmonisation. Elle entend gommer toutes les spécificités, craint-elle. Dernier exemple en date : dans un référentiel sur les charges administratives que prépare l'université pour la rentrée 2018, elle avait fait disparaître les chefs de départements spécifiques aux IUT, pour les remplacer par des directeurs de départements, comme à l'université. Cela a depuis été corrigé, mais cet exemple montre que progressivement, l'autonomie de nos instituts est rognée."

Des réunions dans chacun des IUT doivent être organisées à partir du 4 avril. Pierre Denise a prévu de rencontrer les responsables de départements puis les personnels. "Ces démissions, qui sont suspendues jusqu’aux rencontres avec le président, n'ont pour l'instant pas de répercussion sur les enseignements mais pourraient, à terme, impacter les jurys d’examens de fin de semestre", menace Carine Travers.

Morgane Taquet | Publié le