Études de santé : en Île-de-France, la Paces victime de son succès

Virginie Bertereau - Mis à jour le
Études de santé : en Île-de-France, la Paces victime de son succès
Environ 1.880 bacheliers ont voulu s'inscrire à Paris-Descartes en 2015, soit au moins 100 de plus qu'en 2014. // ©  Virginie Bertereau
La première année commune aux études de santé attire toujours autant les bacheliers. Trop ? À la rentrée 2015, les problèmes d’inscription rencontrés par les étudiants à l’université Paris-Descartes ont révélé les limites du système d’affectation du rectorat de Paris.

Le système d'affectation des étudiants en Paces (première année commune aux études de santé) en Île-de-France : un modèle idéal à copier dans toutes les filières universitaires sous tension, comme le proposait l'Unef dernièrement ? Pas si sûr... À la rentrée 2015, une quarantaine d'étudiants affectés en juillet à Paris-Descartes ont dû être réaffectés en urgence par le rectorat de Paris dans les six autres facultés de santé franciliennes. L'université n'avait pas de place pour eux.

En effet, pour la Paces en Île-de-France, le système APB (Admission-postbac) est un peu particulier : les futurs étudiants en médecine ne demandent pas telle ou telle université, ils émettent un vœu "UFR de santé en Île-de-France", en indiquant quatre établissements dans lesquels ils espèrent avoir une place. Ensuite, la répartition doit se faire équitablement, en s'assurant qu'il y ait dans chaque fac une même proportion de mentions au baccalauréat.

Mais, "cette année, environ 1.880 bacheliers ont voulu s'inscrire à Paris-Descartes, soit au moins 100 de plus qu'en 2014. Or, notre situation, dont j'avais parlé au rectorat, était déjà très compliquée : nous nous sommes lancés dans l'expérimentation alter-Paces [30 places préréservées en deuxième année pour les étudiants qui rejoignent les filières santé sans passer par la Paces], plusieurs salles du site des Saints-Pères doivent être remises en sécurité, donc sont inutilisables, et nous sommes déjà complet avec des groupes de TD de 330 étudiants qui tournent de 8 heures à 20 heures", assure Frédéric Dardel, le président de l'université Paris-Descartes.

À la recherche d'un Plan B

Face à des étudiants désorientés, le rectorat et l'université ont donc pris des mesures communes. "Les premiers inscrits sur notre site vers le 20 juillet ont été les premiers servis. Nous avons mis en place un suivi de leur nombre heure par heure. Pour les autres, après l'évaporation des étudiants qui ont préféré d'autres filières entre-temps (moins nombreux que prévus), il a fallu trouver un plan B", raconte Frédéric Dardel.

"La réaffectation a tenu compte des vœux en UFR de santé exprimés par les candidats", assure le rectorat. Par groupe de quatre à dix, ils se sont vus proposer une place par-ci, par-là. L'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines fait partie des établissements "d'accueil".

Elle aussi a vu le nombre de demandes en Paces augmenter (+6% entre 2014 et 2015) mais a mieux "digéré" ce surplus, puisqu'aucun de ses étudiants n'a dû être réaffecté. "Nous avons 100 inscrits en Paces en plus cette année. Nous arrivons donc à un total de 938 étudiants. À 951, les pompiers nous font fermer", affirme Philippe de Mazancourt, vice-doyen de la faculté de médecine en charge de la Paces à l'UVSQ.

Pour le moment, tout étudiant en Île-de-France voulant s'inscrire en Paces trouve une place, mais cela ne va pas durer.
(F. Dardel)

Un système au bord de la rupture

Finalement, tous les étudiants ont effectué leur rentrée dans les temps. Le problème d'affectation – sans rapport avec le bug informatique qui s'était produit en juillet, selon l'Unef – est donc résolu pour 2015. Mais ensuite ? "On atteint les limites du système dans les universités parisiennes intra-muros. Le nombre d'étudiants augmente sans que l'on touche au numerus clausus. C'est envoyer plus de jeunes au casse-pipe, déclare Frédéric Dardel. L'an prochain, il faudra aussi compter avec les étudiants en kiné qui devront passer par la Paces avant d'intégrer une école. Cette question doit être anticipée."

"Pour le moment, tout étudiant en Île-de-France voulant s'inscrire en Paces trouve une place, mais cela ne va pas durer", prédit le président de Paris-Descartes. Pour Philippe de Mazancourt, "les amphis ne sont pas extensibles et instaurer des quotas reviendrait à offrir une chance de réussite sur deux aux candidats au lieu d'une chance sur sept. D'un autre côté, je ne sais pas comment je ferai pour dire à certains qu'ils ne sont pas pris... Se baser sur la mention ne serait pas juste."

Les alter-PACES comme solution

L'Unef, elle, est catégorique sur la question. "Cela donnerait la possibilité aux facs de faire leur marché d'étudiants. Ce serait déplacer la sélection à l'entrée de l'université", juge Cassandre Bliot, la responsable des questions universitaires du syndicat étudiant. Sa solution : augmenter le nombre de places en Paces et le numerus clausus.

Frédéric Dardel propose une alternative : "Je suis un chaud partisan de l'expérimentation en Paces. Je ne serai pas opposé à l'idée que l'on ne recrute plus que par ce biais dans dix ans". En attendant, les étudiants devront se serrer sur les bancs des amphis.

#MaSalleDeCoursVaCraquer
L'Unef et L'UNL (Union nationale lycéenne) ont lancé, le 21 septembre 2015, un tumblr pour dénoncer les conditions d’études de la rentrée : http://masalledecoursvacraquer.tumblr.com. Les deux syndicats appellent lycéens et étudiants à transmettre leurs photos de salles de cours ou d'amphis pleins, tandis que 65.000 étudiants supplémentaires sont inscrits à la fac et 27.000 lycéens de plus.

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