Philippe Reclus (Croissance responsable) : “On effraie les responsables d’entreprises en leur disant que l’alternance est une bonne façon de prérecruter des jeunes après les avoir formés”

Propos recueillis par Sandrine Chesnel Publié le
Philippe Reclus (Croissance responsable) : “On effraie les responsables d’entreprises en leur disant que l’alternance est une bonne façon de prérecruter des jeunes après les avoir formés”
Philippe Reclus // © 
À l’occasion du forum organisé par la Fondation Croissance responsable, le 26 mai 2011, sur le thème “Comment relancer l’ascenseur social”, trois questions à Philippe Reclus, son délégué général.

Quelle est l’origine de la Fondation Croissance responsable ?

La fondation a été créée, le 13 avril 2010, par des chefs d’entreprise qui ont dirigé dans le passé Croissance Plus, rejoints par une quinzaine de grandes entreprises donatrices, et un certain nombre de représentants de la société civile. L’objectif est d’initier des réflexions sur les pratiques des entreprises et réconcilier l’opinion française avec l’entreprise. Nous sommes abrités par l’Institut de France.

Quelles sont vos propositions pour relancer l’ascenseur social ?

Nous avons cinq propositions à faire, tirées de sept mois d’auditions et d’échanges avec de nombreux représentants de l’entreprise et de lycées.

La première proposition part du constat que les jeunes ne connaissent pas assez concrètement l’entreprise. Nous voulons mobiliser les entreprises pour qu’elles les accueillent plus souvent en stage, si possible dès la seconde, et pour qu’elles accueillent aussi des enseignants, une à deux semaines par an, afin de leur permettre de mieux les connaître.

Nous souhaitons ensuite une évolution de la façon dont on communique sur les formations en alternance. On effraie les responsables d’entreprises en leur disant que l’alternance est une bonne façon de prérecruter des jeunes après les avoir formés. En conséquence, ceux qui n’ont pas suffisamment de perspectives pour savoir s’ils vont embaucher à six mois ou un an n’osent pas s’y lancer. Il faut redire que l’alternance est d’abord une façon de former les jeunes, qui n’implique aucune contrainte d’embauche pour les entreprises à l’issue des contrats.

Tout comme l’alternance, la création d’entreprise est un formidable vecteur d’ascension sociale. Mais pour les jeunes créateurs le problème du capital est souvent un obstacle. Pour y remédier nous pensons qu’il faut “flécher” une partie des fonds issus de l’application de la loi TEPA (1) vers les jeunes créateurs d’entreprise.

Autre obstacle à la relance de l’ascenseur social, le peu de diffusion de la formation continue auprès des publics qui en ont le plus besoin. Aujourd’hui, les principaux bénéficiaires du DIF sont les anciens diplômés des grandes écoles. Ce n’est pas normal. Pour permettre aux personnes qui n’ont pas fait beaucoup d’études de se former, nous aimerions que soit développé le principe du crédit formation inversé : plus on sort tôt de l’école, plus on a de droits à se former par la suite.

Enfin nous avons identifié le logement comme un frein évident à l’insertion. Nous proposons que soit expérimentée la possibilité, pour les entreprises, de récupérer en partie le 1 % logement afin de faciliter le logement de leurs jeunes recrues, salariés ou apprentis.

Que vont devenir ces propositions ?

Nous souhaitons d’abord les faire connaître le plus largement possible, pour que le dialogue s’engage avec de nouveaux interlocuteurs, et pour rallier à notre manifeste davantage d’entreprises. Nous réfléchissons aussi à des mises en œuvre pratiques : ainsi, pour améliorer la connaissance de l’entreprise par les jeunes et leurs professeurs, nous pourrions envisager de créer une plateforme de mise en contact entre les enseignants et les entreprises.

Site de la Fondation Croissance Responsable

(1) Loi TEPA permet notamment aux contribuables qui investissent dans les PME de bénéficier de réductions d’impôts.

Propos recueillis par Sandrine Chesnel | Publié le