Hésam Université dans le brouillard

Morgane Taquet Publié le
Hésam Université dans le brouillard
L'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne est la seule université membre du regroupement Hésam. // ©  Xavier Popy / R.E.A
À la suite du nouvel échec d'Hésam lors de la deuxième vague d'appels à projets Idex et Isite annoncé le 24 juin 2016, se pose à nouveau la question de l'avenir du regroupement francilien. Le tout, sur fond de tensions budgétaires.

"Je ne voulais pas regretter de ne pas avoir candidaté", commente Jean-Luc Delpeuch, président de la Comue Hésam, suite à l'annonce, vendredi 24 juin 2016, des projets présélectionnés pour candidater à la vague 2 des Idex et Isite. Après trois tentatives infructueuses, le projet présenté par le regroupement a été une nouvelle fois retoqué.

Pour autant, "ce dossier, monté extrêmement rapidement, a été bien mieux noté que notre précédente candidature", se rassure Jean-Luc Delpeuch, élu à la tête d'Hésam en février 2016. "Notre volonté de mettre l'Homme et les sciences humaines et sociales au cœur des défis sociétaux est sans doute quelque peu déconcertante pour un jury qui vient des sciences dures, et qui a une vision plus conventionnelle d'une grande université de recherche", juge le président.

Quant aux questions de gouvernance, étudiées de près par le jury international, Jean-Luc Delpeuch se veut rassurant. "Nous avons beaucoup avancé en signant nos statuts fin 2015. En outre, nous sommes le seul regroupement à ne compter qu'une seule université (Panthéon-Sorbonne), ce qui simplifie considérablement notre organisation. D'ailleurs, le nœud du problème porte sur les questions de fusion. À Hésam, il n'y a aucune redondance, nous sommes sans doute la communauté la plus cohérente, de par nos complémentarités."

"SOIT ON SE RENFORCE, SOIT ON SE QUITTE"

Laurent Carraro, directeur général d'Arts et métiers et ancien président d'Hésam, n'est pour sa part pas surpris du résultat. Il n'avait d'ailleurs pas souhaité qu'un nouveau dossier de candidature soit déposé. "Jean-Luc Delpeuch a fait de cette nouvelle candidature un outil de mobilisation des établissements de la Comue, analyse Laurent Carraro. Mais Hésam n'est absolument pas un modèle fusionnel : notre projet ne correspond structurellement pas aux exigences des appels à projets Idex ou Isite. Nous pourrions candidater 15 fois, cela ne changerait rien. Nous ne sommes pas dans la cible." Et de regretter que le Programme d'investissements d'avenir privilégie ce modèle unique.

"Il faut écouter la demande et aller vers plus de cohérence", soutient de son côté Olivier Faron, administrateur général du Cnam, qui se dit très déçu par cet échec. "Soit nous modifions fondamentalement nos modes de gouvernance et nous acceptons un projet impliquant plus de synergies, de subsidiarités, pour aller à long terme vers un grand établissement unique, soit Hésam se délitera lentement. À l'image du Brexit : soit on se renforce, soit on se quitte." 

Nous pourrions candidater 15 fois, cela ne changerait rien. Nous ne sommes pas dans la cible.
(L. Carraro)

VERS UNE PÉRIODE DE VACHES MAIGRES 

Se pose désormais la question cruciale des financements pour l'avenir d'Hésam. "Notre projet construit autour de sept instituts pluridisciplinaires ne change pas, indique Jean-Luc Delpeuch. Hésam permet de faire ce qu'aucun établissement membre ne pourrait réaliser seul. Évidemment, une allocation nous permettrait d'aller plus vite..."

Un sentiment partagé par Laurent Carraro. "Il n'y a pas de remise en question d'Hésam, mais il y a clairement des questions financières qui se posent. Hésam vit encore en 2016 sur les derniers crédits attribués en 2012 [14,5 millions d'euros sur trois ans avaient été attribués à Hésam en 2012, dans le cadre du projet Paris Nouveaux Mondes]. À partir de 2017, Hésam ne vivra que sur ses propres ressources, et celles fournies par les établissements, outre les postes attribués par l'État", explique Laurent Carraro.

"Arts et métiers continuera de contribuer à la même hauteur, mais aucun établissement ne pourra faire plus qu'il ne fait actuellement. Nous entrons donc dans une période de vaches maigres. Mais nous apprendrons à fonctionner de façon encore plus ascétique."

Dans ce contexte, quid du PIA3 ? "Il y aura forcément des appels à projets, peu importe le label qu'on met dessus. Hésam continuera de candidater. Cela finira par payer", affirme Jean-Luc Delpeuch, toujours optimiste.

Morgane Taquet | Publié le