Politique de site : le projet de loi d’habilitation au Conseil d’État

Céline Authemayou Publié le
Politique de site : le projet de loi d’habilitation au Conseil d’État
Bon nombre de regroupements pourraient être intéressés par la possibilité d'expérimenter de nouveaux statuts, à l'image des établissements lillois. // ©  Centrale Lille
Étape indispensable avant l’ordonnance, le projet de loi d’habilitation permettant au gouvernement d’injecter plus de souplesse dans la politique de regroupement d’établissements a été déposé devant le Conseil d’État. Le document, que s’est procuré EducPros, confirme la création de statuts dérogatoires et fixe la durée des expérimentations à quinze ans maximum.

Attendue par bon nombre d'établissements et de regroupements, la possibilité d'expérimenter de nouveaux modèles de gouvernance devrait donc bel et bien passer par une ordonnance. Comme l'annonçait EducPros le 23 juin 2017, le gouvernement entend utiliser ce véhicule législatif pour modifier la loi existante.

Dans le projet de loi d'habilitation transmis au Conseil d'État, qu'EducPros s'est procuré, figure la stratégie choisie par le gouvernement pour apporter plus de souplesse aux règles en vigueur. Et l'expérimentation est la clé de ce nouveau système : les établissements et les regroupements d'établissements pourront en effet s'unir, sous deux formes possibles : l'EPCSCP (établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel) ou la Comue (Communauté d'universités et établissements), toutes deux bénéficiant d'un "régime expérimental".

Une expérimentation de quinze ans maximum

Cette expérimentation, aussi bien offerte aux nouveaux regroupements qu'à ceux déjà existants, pourra être portée "à un maximum de quinze ans", précise le projet de texte. "À charge pour les établissements qui s'y engagent de proposer la durée correspondant à leur projet, dans cette limite", poursuit le document.

Cette phrase permet notamment de répondre aux attentes de la CPU (Conférence des présidents d'université), qui plaidait pour une durée d'expérimentation fixée projet par projet. Pas sûr, en revanche, que ces quinze ans satisfassent les syndicats. En juin, le Sgen-CFDT s'inquiétait déjà d'un allongement possible de ce délai, aujourd'hui fixé à dix ans. "S'il s'agit d'aboutir aux préconisations du rapport Cytermann, à savoir un nouvel EPCSCP où les membres garderaient la personnalité morale, sans prévoir de limite temporelle, c'est hors de question !", commentait alors Franck Loureiro.

La personnalité morale conservée

Autre source de tension : la personnalité morale des établissements "regroupés" sera conservée le temps de l'expérimentation. "Ce qui leur permettra, le cas échéant, de mettre fin à l'expérimentation en reprenant leur forme d'établissement d'origine", analysent les auteurs du projet de loi d'habilitation. Or, "l'impact organisationnel est tellement lourd qu'il semble difficile d'imaginer un retour en arrière", estimait, fin juin, Stéphane Leymarie, secrétaire national de Sup'Recherche Unsa.

Pour juger de la pertinence de ces expérimentations, ces dernières seront évaluées par le HCERES (Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur), propose le projet de texte. Il remettra son rapport au Parlement au au gouvernement, "afin que ceux-ci puissent en tirer toutes les conséquences, y compris, le cas échéant, afin de faire évoluer le cadre législatif et réglementaire". Une façon d'assurer les acteurs d'une pérennisation possible des expérimentations, si ces dernières donnent satisfaction. Reste à savoir comment le gouvernement pourra faire évoluer le cadre si plusieurs regroupements expérimentent – avec succès – des modèles très différents.

Un an pour prendre l'ordonnance

Ce texte doit être présenté en Conseil des ministres dans les prochaines semaines. Une fois qu'il sera promulgué, le gouvernement disposera d'un délai d'un an pour prendre l'ordonnance, soit avant l'automne 2018. Un temps permettant de mener de "nécessaires concertations avec tous les acteurs de la communauté universitaire", précise le projet de loi.

Céline Authemayou | Publié le