Prime au mérite : ce qu'en disent les chefs d'établissement

Publié le
Les principaux de collèges et les proviseurs de lycées pourront avoir droit à une prime de résultats allant jusqu'à 6.000 euros tous les trois ans, a annoncé Luc Chatel, le 25 janvier 2011, sur France Info. « Je pense à la politique du projet pédagogique d’un établissement. Je pense aux performances, aux résultats scolaires par rapport aux prévisions qui ont été faites. Je pense à la capacité d’intégrer des élèves en difficultés" a détaillé le ministre de l'Education nationale. Réactions de chefs d'établissement à cette prime à la performance.


Une annonce surprise

Côté syndicats de chefs d’établissement, cette annonce a pour le moins surpris. Alors que le ministre a confirmé la signature d’un accord pour mettre en place cette prime sur objectifs, les organisations syndicales semblent n’avoir rien vu venir.

« Cette annonce est une grande surprise car nous n’avons encore rien signé, réagit Florence Delannoy, proviseur du lycée Fénelon à Lille et membre du bureau national de SNPDEN, syndicat majoritaire chez les personnels de direction. Le seul document que nous avons signé est un protocole d’accord qui met en place un cadre légal de discussions sur les rémunérations, les carrières, le recrutement, la formation ou encore les conditions d’exercice. » Pour cette représentante syndicale, le montant des primes « n’a jamais été abordé », et surtout « rien n’a été discuté concernant les objectifs à évaluer et la manière de les mesurer ».

Même réaction de Patrick Fournier, proviseur du lycée Raymond Poincaré à Nancy et secrétaire général d'Indépendance et Direction, le deuxième syndicat des personnels de direction : « Nous sommes certes d’accord sur le principe d’une prime de fonction et de résultats, mais reste à savoir comment vont faire les recteurs pour la mettre en place ». Et d’ajouter : « Nous demandons à ce que les modes d’attribution soient à la fois transparents et justes ».

Récompenser le chef ou son équipe ?

Sur le fond, le principe de la prime semble plutôt bien accueilli. « Jamais le travail d’un chef d’établissement n’a été gratifié par une quelconque prime. C’est une première et cela me semble légitime après les efforts engagés ces dernières années pour mettre en place des actions pédagogiques importantes », note avec satisfaction Pascal Charpentier, proviseur au lycée européen Charles de Gaulle à Dijon.

Une prime oui mais à quelles conditions ? Sur ce point les avis divergent. « L’effet chef d’établissement existe et peut être mesuré », estime Patrick Fournier qui milite pour une revalorisation du traitements des chefs d’établissement. « Oui, on peut mesurer sur trois ans l’efficacité d’une action pédagogique, souligne José Fouque, proviseur au lycée Vauvenargues à Aix-en-Provence. Mais pourquoi rémunérer le chef d’établissement et non pas chacun de ceux qui ont participé à un projet collectif, à la hauteur de leur engagement ? Tout le monde sait que les chefs d’établissement qui réussissent sont ceux qui parviennent à redonner confiance à une équipe. Dire que l’on va rémunérer uniquement le proviseur, c'est-à-dire jouer l’autorité du chef
d’établissement contre les profs c’est une erreur de management. C’est au conseil d’administration du lycée de décider des récompenses. »

Une annonce qui tombe mal

Reste enfin un point sur lequel les proviseurs interrogés se retrouvent : le timing de l’annonce jugé très mal venu. « Compte tenu du contexte actuel de réception des dotations, avec 16 000 suppressions de postes, cette annonce tombe très mal », note Patrick Fournier. « Non, notre prime n’est pas liée à des objectifs de suppressions de postes », tient à préciser Pascal Charpentier. « On ne peut pas s’empêcher de penser qu’il y a un lien entre une telle annonce et les mouvements de grève annoncés pour le 10 février 2011 », note enfin Florence Delannoy.

Une annonce plus politique qu'il n'y paraît. Aprèsla prime aux recteurs (jusqu'à 22000 euros sur trois ans), celles données aux chefs d'établissement montre que la rémunération à la performance est en passe de rentrer dans les moeurs de la fonction publique.

| Publié le