Rapport annuel de la Cour des comptes : la Chancellerie des universités de Paris vouée à disparaître ?

Sophie Blitman Publié le
Rapport annuel de la Cour des comptes : la Chancellerie des universités de Paris vouée à disparaître ?
Place de la Sorbonne à Paris © S.Blitman // © 
Supprimer la Chancellerie des universités de Paris : c'est ce que demande la Cour des comptes dans son rapport annuel, rendu public le 11 février 2014, qui dénonce une gestion défaillante, à l'heure où l'État cherche à faire des économies.

"Un opérateur de l’État inutile." La Cour des comptes ne mâche pas ses mots pour qualifier la Chancellerie des universités. Un chapitre de son rapport annuel est consacré à l'organisme sous tutelle du ministère de l'Enseignement supérieur, qui rassemble 60 agents et dont le budget de fonctionnement s'élève à 14 millions d'euros.

À l'issue d'un contrôle mené en 2012-2013, les magistrats de la rue Cambon dénoncent les "nombreuses carences" de la gestion de ce "patrimoine indivis des 13 universités". Et réclament purement et simplement la suppression de la plus importante des 30 Chancelleries des universités – après avoir demandé en vain, plusieurs fois par le passé, celle des plus petites.

"Un gestionnaire de patrimoine inefficace"

Le rapport souligne les "défaillances de la gestion immobilière" de la Chancellerie des universités de Paris, propriétaire de plus de 15.000 m2 de locaux dans la capitale.

Le parc locatif parisien, dont la valeur a été estimée à 123 millions d'euros en 2011, rapportait, en 2012, 3,22 millions. Mais la Cour note que "les loyers pratiqués par la Chancellerie sont, en moyenne, à un niveau inférieur à la valeur basse du marché pour les appartements de type F1 ou F2 et légèrement au-dessus de ce niveau pour les appartements de type F3 ou F4 et plus". Soit un manque à gagner de 14 à 34 %, selon que l'on prend en compte la fourchette haute ou basse des loyers.

Au-delà du volet financier, "la procédure d’affectation des logements apparaît peu transparente". Ancien secrétaire d’État à l’Enseignement supérieur, inspectrice générale de l’administration de l'Éducation nationale et de la Recherche, fils d’un recteur aujourd’hui décédé… En définitive, "une dizaine de locataires de ces appartements ont un lien avec les ministères chargés de l’Éducation nationale ou de l’Enseignement supérieur et ont pu accéder au parc locatif de la Chancellerie grâce à leurs fonctions".

Traitement privilégié du recteur de Paris

Par ailleurs, le texte dénonce une prise en charge injustifiée des frais liés à la fonction de recteur, qui préside le conseil d'administration de la Chancellerie : outre la "gestion complaisante [de son] logement de fonction", "les avantages en nature dont ont bénéficié les recteurs depuis 2000 n’ont pas fait l’objet des déclarations sociales et fiscales réglementaires".

Enfin, alors que réglementairement, "seuls les frais liés aux activités du recteur dans ses fonctions de chancelier des universités devraient être pris en charge par le budget de l’établissement public", "c’est l’ensemble des frais de représentation du recteur qui est financé par la Chancellerie, soit un budget annuel d’environ 100.000 €, comprenant la rémunération d’un maître d’hôtel".
Autant de dérogations et irrégularités auxquelles la rue Cambon entend mettre un terme.

Seule activité à trouver grâce aux yeux des magistrats, l'attribution de bourses aux étudiants, financées essentiellement par des legs. Une petite cinquantaine de prix ont ainsi été décernés en 2011 et 2012, pour un montant de 430.000 €. Insuffisant, cependant, pour peser dans la balance, d'autant plus que, souligne le rapport, "le positionnement de la Chancellerie est devenu anachronique tant par rapport à l’État que vis-à-vis des universités dont l’autonomie est aujourd’hui renforcée". D'où la volonté réitérée de la Cour de supprimer l'institution créée il y a plus de quarante ans.

 

La villa Finaly, un joyau qui grève le budget de la Chancellerie
Patrimoine culturel prestigieux, la villa Finaly à Florence appartient aujourd'hui à la Chancellerie des universités de Paris, qui la met à disposition des professeurs pour l'organisation de congrès et des chercheurs pour leurs séjours d'études.
Mais la Cour des comptes relève qu'en 2012, "le taux d’occupation de la villa ne dépasse pas 24 %". Il en résulte un budget de fonctionnement "structurellement déficitaire", "bien que les treize universités franciliennes propriétaires de la villa apportent chacune une cotisation annuelle de 7.500 €". Et le rapport de calculer que "de 2007 à 2011, le déficit cumulé s’est élevé à 1,84 M€, soit une moyenne annuelle de 367.070 €".

Le CNDP également menacé de disparition
"Production éditoriale dépassée", "distribution surdimensionnée", "gestion coûteuse"... Le CNDP (Centre national de la documentation pédagogique) est aussi dans le viseur de la Cour des comptes, qui prône une réorganisation d'ampleur ou, à défaut, sa suppression.
Lire l'article sur lexpress.fr : "Cour des comptes : l'éditeur du monde enseignant menacé de disparition"

Sophie Blitman | Publié le