Rémy Challe : "La clarification réglementaire est indispensable à un climat de confiance"

Guillaume Mollaret Publié le
Rémy Challe : "La clarification réglementaire est indispensable à un climat de confiance"
Rémi Challe a été nommé directeur général d'EdTech France le 14 novembre 2018. // ©  Guillaume Mollaret
Au salon Educatec Educatice, l’association des entreprises du secteur a présenté, un an après sa création, une feuille de route en cinq points pour améliorer la visibilité de la filière. Elle les présentera prochainement au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Rencontre avec Rémy Challe, le directeur d’EdTech France.

Parmi vos cinq propositions, laquelle vous semble la plus urgente ?

Ces cinq propositions naissent d’un constat que j’ai dressé très rapidement : je ne suis en poste que depuis une semaine. J’ai découvert un univers bouillonnant, avec une profusion d’acteurs et de solutions innovantes, qui a toutefois beaucoup d’obstacles à surmonter. Il y a notamment une méconnaissance de l’offre EdTech.

Le mot lui-même est relativement méconnu, y compris par des acteurs de l’enseignement supérieur. Nous devons clarifier l’offre pour que chacun puisse mesurer la réalité de ce secteur en France. Si l’offre n’est pas claire, cela complique l’acte d’achat.

À l’inverse, les entreprises connaissent-elles bien le tissu de l’enseignement supérieur et ses process d’acquisition pour s’adresser aux bonnes personnes ?

Il y a, vous avez raison, une vraie difficulté à identifier les acheteurs potentiels. En fonction des territoires, des niveaux d’enseignement ou du type d’établissement, les pratiques sont différentes.

Cela pose par ailleurs la question de la rupture d’égalité de l’usager du service public de l’éducation. Sur certains territoires, des solutions innovantes à forte valeur ajoutée seront adoptées alors que, sur d’autres, par méconnaissance ou par crainte, ces solutions ne seront pas choisies.

Dans les grandes écoles, les solutions EdTech n’ont pas encore pénétré le cœur de la pédagogie.

C’est vrai pour l'enseignement primaire et le secondaire. Quid de l’enseignement supérieur ?

Je connais bien le secteur des grandes écoles de management [Rémy Challe a été directeur à l’Inseec], et elles sont souvent pionnières dans ce domaine. Le mot EdTech y a toutefois fait récemment son apparition, notamment grâce à EducPros, qui a été un des premiers médias à en parler.

Cependant, les grandes écoles n’ont pas encore fait leur mutation. Les solutions EdTech se résument souvent à du service à l’étudiant. Elles n’ont pas encore pénétré le cœur de la pédagogie. Or, l’enjeu, c'est bien la transmission des savoirs. C’est là que se trouve le territoire à conquérir.

Votre président, Benjamin Viaud, n’est pas tendre avec les normes actuelles. Partagez-vous son constat ?

L’idée d’un Code EdTech, même si le terme de code peut paraître un peu présomptueux, vient d’une nécessité de compiler a minima toutes les règles applicables car celles-ci sont souvent méconnues, y compris des acteurs institutionnels. Cette méconnaissance n’incite pas à la prise de risque. Elle peut par ailleurs orienter le choix vers les GAFAM, qui peuvent apparaître comme plus rassurants qu'une start-up qu'on ne connaît pas.

Mais cet a priori n'est jamais certain, et nous avons un savoir-faire à défendre. La clarification du cadre réglementaire est indispensable à la création d’un climat de confiance.


Les cinq propositions d’EdTech France
1. Clarifier l’offre des entreprises en enrichissant l’Observatoire des EdTech [dont EducPros est partenaire], en y ajoutant notamment les services proposés par les entreprises et des commentaires d’usagers.
2. Valoriser les usagers en créant un label EdTech.
3. Créer un Code EdTech recensant les réglementations.
4. Faciliter l’achat public par la création d’un "chèque EdTech", dont les enseignants auraient le libre usage.
5. Conquérir les marchés internationaux par la mise en place d’un réseau d’ambassadeurs EdTech.

Guillaume Mollaret | Publié le