Je suis un président en colère." Les conditions de la rentrée 2017 ne passent pas pour Georges Haddad, président de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. "Je trouve inacceptable qu'un grand pays comme le nôtre mette nos universités dans une telle situation", expose-t-il, lors d'une conférence de presse, mardi 26 septembre 2017, afin d'"attirer l'attention de la tutelle ministérielle sur les difficultés quotidiennes qu'affrontent les étudiants et le personnel de l'université".
Un appel solennel
Face à cette situation "urgente", Georges Haddad lance un "appel solennel" en Île-de-France pour organiser "très rapidement" une rencontre entre les trois recteurs des académies de Créteil, Paris et Versailles, les présidents des 17 universités de la région, sous l'égide du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation. L'objectif de ce groupe de travail : mieux gérer le flux d'étudiants accueillis dans les universités et permettre d'en scolariser davantage. "Chaque jour, je suis harcelé, à juste titre, par des associations d'étudiants pour me demander d'inscrire des étudiants supplémentaires", déplore-t-il.
Je ne vois pas une seule filière qui ne soit pas en tension.
"Nous avons dépassé marginalement nos capacités d'accueil. Toutes les formations sont concernées : droit, économie, sciences humaines... Je ne vois pas une seule filière qui ne soit pas en tension", poursuit Georges Haddad. Au total, son université accueille 42.000 étudiants, mais ne communique pas encore sur le nombre d'inscrits par filière ou par année. "Avec les redoublants, les triplants qui s'annoncent tard, nous ne sommes pas fixés sur le nombre total d'étudiants que nous aurons cette année."
Instaurer une solidarité interuniversitaire
À la différence d'autres universités, pas question pour le président de Paris 1 de pratiquer "le surbooking". "Si, dans un amphi de 800 personnes, j'accueille 1.000 étudiants, que se passe-t-il en cas de problème de sécurité ? Vous imaginez la responsabilité en cas d'incendie ?" interroge-t-il. Pas question non plus d'attendre l'évaporation des étudiants dans quelques semaines : "Ce serait un échec. Mon but est de garder un maximum d'étudiants jusqu'au diplôme", martèle-t-il.
La rencontre qu'appelle de ses vœux le président de Paris 1 en Île-de-France doit permettre "d'instaurer une solidarité interuniversitaire", "comme c'était le cas il y a 27, 28 ans..." "Je pense qu'il y a encore des places" dans les formations de certaines universités, avance-t-il. L'occasion aussi de se pencher sur le cas des étudiants "mal casés". "Nous avons énormément d'étudiants inscrits dans des formations qu'ils n'ont pas choisies..." regrette-t-il. Un constat partagé par l'Unef, qui demande au niveau national "des mesures d’urgence", afin de "trouver une solution d’inscription" aux 3.000 jeunes encore sans affectation, mais également pour ceux inscrits dans une formation"par défaut".
Si dans un amphi de 800 personnes, j'accueille 1.000 étudiants, que se passe-t-il en cas de problème de sécurité ?
Pour le président de Paris 1, cette solidarité interuniversitaire devrait également s'accompagner de moyens financiers. "Si les universités font des efforts pour prendre des étudiants supplémentaires, il faut que les moyens suivent", souligne-t-il. "En juillet, le ministère nous a demandé de prendre 600 étudiants en droit, soit une hausse de 50 % de nos inscrits et sans contrepartie. Les locaux, c'est une chose, on peut en trouver, mais un enseignant-chercheur ça ne se produit pas comme un Big Mac !"
Cette question des moyens devrait trouver une certaine résonance mercredi 27 septembre 2017, date de présentation du budget 2018 par le gouvernement. Une hausse de 700 millions d'euros est déja annoncée pour le ministère de l'Enseignement supérieur, mais le suspens reste entier quant à la répartition des crédits.
Sorbonne Alliances : Paris 1 s'associe à l'ESCP Europe
L'université de Paris 1 et l'école de commerce ESCP Europe vont se rapprocher dans le cadre d'une association, baptisée Sorbonne Alliances. "Il ne s'agit ni d'une fusion, ni d'une mutualisation. Chacun garde sa liberté, son ADN", insiste Georges Haddad, qui voit dans les Comue "une organisation affreuse, impossible à expliquer ou à faire comprendre". "Il faut laisser les gens se réunir et avoir plaisir à être ensemble", ajoute-t-il.
Cette association "est une alliance par essence évolutive et basée sur la volonté d'être ensemble". Plusieurs axes de collaboration se dessinent : "une dimension internationale affirmée", les domaines de la recherche et de la vie étudiante et le numérique. L'idée ? Travailler sur des projets spécifiques, en explorant le modèle de l'association. "Nous sommes aussi en négociation avec Paris 2, qui avance à son rythme. Et je rêve aussi que Paris 3 nous rejoigne... J'ai eu des appels... Il ne manquerait qu'une belle école d'ingénieur et je serai heureux", confie Georges Haddad.