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Un tiers des étudiants a été témoin de violences sexistes et sexuelles lors d'un événement d'intégration

Léa Fournier Publié le
Un tiers des étudiants a été témoin de violences sexistes et sexuelles lors d'un événement d'intégration
Près de 40% des participants à des événements d'intégration affirment surconsommer de l'alcool. // ©  Adobe Stock/mariiaplo
Dans son enquête sur les événements d'intégration, l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles dans l'enseignement supérieur met en lumière des faits récurrents de violences sexistes et sexuelles – couplés à du bizutage et à une forte consommation d'alcool. Un répondant sur trois dit avoir été témoin de VSS.

Soirées, week-ends d'intégration… Les événements festifs sont un moment-clé de l'intégration dans sa formation du supérieur : plus de neuf étudiants sur dix y voient une opportunité de tisser des liens et de renforcer la solidarité au sein des promotions.

Pourtant, plus d'un étudiant sur trois ne se sent pas en sécurité lors de ces événements. C'est ce que révélait le baromètre 2023 de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles dans l'enseignement supérieur (OBVSS). L'association dressait alors un constat inquiétant : 59% des viols commis lors des études le sont au cours d'un événement festif. Elle a donc choisi d'enquêter sur ce sujet.

Dans une enquête publiée lundi 16 septembre, l'OBVSS revient plus précisément sur les événements d'intégration qui marquent le début de la vie étudiante, afin de "mettre en lumière l'ampleur des violences sexistes et sexuelles (VSS), des discriminations et du bizutage lors des événements d'intégration".

Des violences qui touchent d'abord les femmes

Les résultats de l'enquête, menée auprès de 4.000 étudiants, sont alarmants. Si les événements d'intégration visent à créer du lien social et à promouvoir l'inclusion, la réalité est tout autre pour de nombreux participants.

Plus de 37% des répondants affirment ainsi avoir été témoins ou victimes d'au moins une forme de violence pendant ces rassemblements. Ils sont un sur vingt à déclarer en avoir été victime. "Ces violences genrées touchent plus fortement les femmes et minorités de genre, qui ont deux fois plus de risque d’en être victimes", ajoutent les auteurs de l'enquête.

Seul un tiers des victimes a reçu une aide extérieure lors de l'agression. Parmi les victimes de viol, aucune n'en a reçu. 

Les premiers jours de la vie étudiante sont particulièrement sensibles

Le début de la vie étudiante est une période sensible : parmi les étudiants interrogés, une victime d'agression sexuelle sur six a été agressée lors de la première semaine de sa première année d'étude. Ce type d'événements est considéré comme un terrain propice aux VSS par plus d'un répondant sur deux.

Les violences ont lieu "en très large majorité lors d'événements festifs en soirée ou lors des week-ends d'intégration", précise l'OBVSS. "Mais sont aussi fréquemment survenues lors d'événements festifs en journée, les soirées privées faisant suite à ces événements organisés, ainsi que dans les résidences universitaires."

Près d'une femme sur cinq a choisi de ne pas se rendre à un événement d'intégration à cause de la consommation d'alcool ou de drogues illicites (l'OBVSS)

Parmi les personnes faisant état de violences sexistes et sexuelles, 13,7% ont déclaré que celles-ci se produisaient fréquemment, c'est-à-dire à chaque événement ou soirée.

"Bien que les violences se produisent dans tous les types d’établissements, elles sont encore plus fréquentes dans les écoles, les instituts et les grands établissements universitaires", ajoute l'OBVSS.

Des circonstances propices aux abus

L'OBVSS montre par ailleurs que le bizutage, bien qu'interdit par la loi depuis 1998, est "encore monnaie courante lors des événements étudiants et mènent à de graves abus". Les actes de bizutage incluent dans les deux tiers des cas "des pratiques humiliantes", mais aussi parfois "des comportements violents, dégradants et des actes sexuels non consentis". 11% des étudiants sont touchés par cette pratique – et plus particulièrement les étudiants de milieux sociaux défavorisés ou en situation de handicap.

La majorité des étudiants estime par ailleurs que l'alcool est "la source principale des problèmes de violence et d'agression". Ainsi, parmi les participants, près de 40% affirment surconsommer de l'alcool lors des événements d'intégration. Cette consommation est plus forte chez les hommes. L'OBVSS précise que "près d'une femme sur cinq a choisi de ne pas se rendre à un événement d'intégration à cause de la consommation d'alcool ou de drogues illicites".

Une réponse aux violences jugée insuffisante

Seuls 5% des témoins et victimes parlent des faits à la direction de leur établissement et ils sont moins de 4% à avoir lancé une procédure de signalement dans leur établissement. La peur des représailles, de l'exclusion sociale ou celle de ne pas être pris au sérieux amène ainsi près d'une victime ou témoin de faits sur six à se taire.

Malgré la gravité des faits rapportés, seulement un tiers des étudiants estime que leur établissement prend des mesures suffisantes en cas de VSS. D'après l'Observatoire, les dispositifs de signalement existent dans seulement 68% des établissements. L'association souligne qu'il existe un manque de communication concernant les dispositifs de lutte contre les violences et indique que les étudiants doutent de leur efficacité.

Plus de la moitié des jeunes interrogés pense ainsi que les auteurs de violences ne sont jamais punis, "ce qui souligne une perception généralisée d'impunité des auteurs de VSS". 

La majorité des personnes interrogées souhaitent donc maintenir ces périodes d'intégration, mais en "mettant l'accent sur la prévention, la formation des organisateurs" et avec "une plus grande implication des établissements pour créer un environnement inclusif et sécurisé."

Dans un cas d'agression ou de viol sur dix, l'un des organisateurs mis en cause

Concernant le profil des agresseurs, dans neuf cas d'agressions sexuelles et de viols sur dix, il s'agit d'hommes – le plus souvent d'un étudiant du même campus que la victime.

Les organisateurs de l'événement sont mis en cause dans plus d'un cas sur dix.

Léa Fournier | Publié le