Université de Strasbourg : comment la fusion s'est préparée

Elise Descamps Publié le
J-24. La fusion des universités de Strasbourg dans une université unique aborde une étape symbolique. Jusqu'au 9 décembre 2008, près de 45 000 étudiants et personnels élisent les représentants qui siégeront aux trois conseils centraux de l'Université de Strasbourg (UDS). Les résultats seront connus le 11 décembre. Le calendrier sera ensuite très serré avant le 1er janvier 2009, date où tout doit être en place pour que la fusion s'opère. Le président de l'établissement strasbourgeois sera élu par le nouveau conseil d'administration le 18 décembre. Alain Beretz, Michel Granet et Simon Thierry se sont portés candidats à ce jour. Le budget aura été voté le 15 décembre. Plongée dans les coulisses de la fusion. Notre correspondante revient sur plus d'un an de préparation, du début 2007 à l'automne 2008, et notamment sur la méthodologie employée.

Le calendrier s'est resserré sur les derniers mois, avec un nombre croissant de réunions. Les décisions ont été prises selon une méthodologie précise. Son chef d’orchestre : le comité de pilotage. Cette instance créée au démarrage du projet de fusion, en février 2007 - et qui disparaît de fait avec les élections -, était composée des équipes de direction des trois universités, de l’IUFM et du Pôle universitaire européen, de la coordinatrice du projet, Anne Goudot, et d’un expert extérieur, Josette Soulas. Le comité s'est réuni environ deux fois par mois pour étudier et valider les aspects concrets concernés par la fusion. Il a reçu l’aide du cabinet Deloitte sur la conception du nouvel organigramme et du calendrier de la fusion : ce cabinet a rendu en juillet 2008 un « macroplanning » qui présentait les échéances à respecter à court terme et les grands chantiers à conduire sur 2008-2010.

Soixante points étudiés par le comité de pilotage

Dénommés « projets » (réussite en licence, valorisation de la recherche, aide aux projets étudiants...), ils ont été préparés en amont depuis février 2008 par autant de petits groupes réunissant élus et opérationnels et représentant environ quatre cents personnes. Leur validation s’est effectué par étapes jusqu’à la mise en place finale du dispositif.

La documentation et la communication, premiers services mutualisés

Le premier service concerné par la mutualisation a été celui de la documentation. Non sans grincements de dents quant à la méthode, jugée par certains personnels comme arbitraire. Depuis, les services de communication ont fusionné. Il était impératif qu’ils fussent prêts pour l’événement médiatique du 1er janvier 2009 : l’UdS disposera à cette date d’un logo, d’un site Internet, d’une charte graphique et de plaquettes de présentation. Seuls les services des marchés, juridique, prévention environnement, et logistique immobilière doivent encore fusionner d’ici à cette date.

Le reste devrait se faire au fur et à mesure, tout au long du projet d’établissement, sur quatre ans. Les services mutualisés ne devraient ainsi n'avoir qu'un organigramme provisoire dans un premier temps. Des postes devraient notamment être proposés à la candidature avec un mouvement important dès le printemps 2009. L'ordre dans lequel ont fusionné et fusionneront les services paraît davantage le fruit de contraintes et de hasards que d’une réelle stratégie. Ceux de la scolarité n'ont pas pu fusionner pendant la rentrée scolaire par exemple, et les gros services ont dû attendre le déménagement d’autres entités.

L’information, pour faire adhérer le « corps social »

De tous ces aspects, les personnels et étudiants lambda sont informés par divers biais. Les chefs de service ont été conviés à transmettre les informations à leurs personnels. Beaucoup d’informations ont également été délivrées sur le site Internet du projet , et dans une lettre spécifique mensuelle.

« À l’UMB [université Macr Bloch] il n’y a eu qu’une seule réunion de tous les personnels sur la question de la fusion des universités, au printemps, et rien depuis la rentrée, regrettait en octobre 2008 Olivier Neveux, du Snesup-FSU. Le débat a été mené dans certaines UFR, mais de manière très variable. Les personnels n’appartenant à aucune commission ont eu très peu l’occasion d’intervenir dans les débats ». Les instances dirigeantes rappellent quant à eux que les syndicats ont été consultés en permanence par le biais de comités techniques paritaires et que es étudiants ont reçu une information lors de leur inscription.

Une fusion à « marche forcée » ? Certains personnels et étudiants des trois universités, syndiqués ou non, estiment que cette fusion a été menée dans la précipitation. « Nous sentons la pression du ministère. Nous n’avons pas le temps d’avoir de vrais échanges. L’assemblée constitutive n’est qu’une instance de validation », dénonce Olivier Neveux, chercheur à l’UMB et membre du Snesup. Selon lui, de nombreuses questions restent en suspens (sur le fonctionnement des collégiums notamment) et nourrissent « d’immenses inquiétudes » également liées au télescopage avec la LRU. « Les discussions ne sont devenues concrètes qu’en septembre 2008. Les membres des conseils croulaient sous les réunions, note pour sa part Julie Joho, présidente de l’Unef et membre  de la commission des statuts. Nous n’avons pas eu le temps d’aborder tous les points. Parmi les désaccords, le mode de répartition des sièges enseignants au conseil scientifique, en fonction de leur collège. Avec pour conséquence que les représentants de chaque université jouent le corporatisme. On nous renvoie toujours au règlement intérieur qui viendra ultérieurement », regrette-t-elle.

Elise Descamps | Publié le