L'université du Maine joue la carte de l'e-pédagogie

Émilie Weynants Publié le
L'université du Maine joue la carte de l'e-pédagogie
L'université a investi 40.000 euros dans la création d'un studio audiovisuel. // ©  Université du Maine.
Réunis pour une journée de réflexion autour de l'e-pédagogie, les enseignants et personnels de l'université du Maine ont pu échanger sur leurs pratiques, le 30 juin 2016. Investi depuis plusieurs année dans le domaine, l'établissement d'enseignement supérieur développe divers outils pour, entre autres, assurer son e-réputation.

Des enseignants-chercheurs, des documentalistes, des ingénieurs pédagogiques, des employés du service universitaire d'information et d'orientation... Tous sont venus observer, explorer et échanger de nouvelles pratiques pédagogiques. Le 30 juin 2016, l'université du Maine organisait sa troisième journée e-pédagogie, destinée aux enseignants et aux personnels de l'établissement. L'objectif : "Mettre en synergie les outils liés aux technologies de l'information-communication pour les rendre accessibles aux enseignants et bénéfiques aux étudiants", selon Rachid El Guerjouma, président de l'université.

Les enseignants testent, cherchent, explorent

L'établissement d'enseignement supérieur, réparti sur deux campus, au Mans et à Laval, s'est emparé du sujet depuis plusieurs années. Les enseignants ont investi la plate-forme en ligne d'enseignement UMtice (basée sur Moodle) en 2006 et proposent des captations vidéo, des QCM, des diaporamas, des serious games... Une offre de formation à distance est disponible depuis 2001. En 2015, près de 700 étudiants, toutes filières confondues, sur les 11.000 que compte l'université, ont opté pour l'e-learning. Si une majeure partie des élèves résident en France, d'autres étudient depuis le Brésil, le Japon ou encore l'Afrique.

Pour accompagner cette transition, un chargé de mission "Apprendre et enseigner avec le numérique" a été recruté et un vice-président au numérique sera nommé dans les mois à venir. L'équipe du pôle de ressources numériques (PNR) a également été renforcée. Au sein de cette unité, une dizaine de personnes – dont quatre ingénieurs pédagogiques à plein temps – travaillent aux côtés des enseignants qui tentent, cherchent, explorent. "Si l'utilisation du numérique pouvait être vécue comme un frein au départ, aujourd'hui, les enseignants ont dépassé ce stade, constate Nicolas Postec, directeur du PNR. La question est désormais de savoir ce qu'on peut faire avec ces nouveaux services."

Une équipe de 10 personnes pour accompagner les enseignants

Chitra Madomercandy fait partie des enseignants accompagnés par le pôle. Enseignant l'anglais depuis vingt-trois ans, elle voulait donner une nouvelle dynamique à ses classes, de la première année de licence au master 2. "Je constatais depuis quelques années qu'une petite partie des élèves n'écoutait plus en cours", raconte-t-elle.

Il y a quatre ans, elle décide de s'approprier la plate-forme UMtice, en proposant à ses étudiants des documents disponibles en amont du cours. Au final, les élèves s'autorégulent. "En classe, ça me permet de mieux gérer l'hétérogénéité de mon public. Je construis des groupes avec un meneur, un bavard, un plus faible... Les élèves se sentent actifs et responsables", constate l'enseignante. "Chitra n'était pas arrivée avec ce projet-là au PNR, mais on l'a aiguillée et conseillée, se souvient Nicolas Postec. Et le résultat est positif."

Proposer aussi du face-à-face intelligent

Jean-Michel Génevaux, quant à lui, est moins enthousiaste. Enseignant de mécanique à l'Ensim, école d'ingénieurs interne à l'université, il a introduit une autre forme d'innovation dans ses cours dédiés à la gestion des aléas : la modalité Craies, pour "Coopérons à notre rythme d'apprentissage individualisé, efficace et sympathique". "Chaque étudiant peut progresser en cours à son propre rythme, sur des exercices appelés brevets, détaille-t-il. Les étudiants ayant réussi les exercices deviennent référents et soutiennent leurs camarades."

Pour accompagner cette nouvelle forme d'enseignement, il a souhaité se servir de Pairform. Cette interface d'échanges devait permettre aux étudiants d'enrichir les cours via des commentaires en ligne. "La plate-forme a été très peu utilisée, ça n'a pas marché", constate Jean-Michel Génevaux, qui voit le numérique comme "une valeur pauvre du renouveau pédagogique".

"Le numérique facilite les pratiques innovantes", insiste Sébastien George, chargé de mission "Apprendre et enseigner avec le numérique", mais il est indispensable de proposer aussi "du face-à-face intelligent", complète Rachid El Guerjouma.

un financement sur fonds propres

Persuadé que l'université du Maine est un terreau favorable à l'innovation, le président multiplie les initiatives dans le domaine, malgré un accompagnement de tutelle "quasi nul", regrette-t-il.

L'établissement finance la plupart des projets sur fonds propres, "ce qui rend la tâche difficile, compte tenu du contexte général des universités", concède Nicolas Postec. 40.000 euros ont par exemple été nécessaires à la création d'un studio audiovisuel (le ministère ayant ajouté 20.000 euros). Par ailleurs, les collectivité territoriales financent annuellement une part de certains investissements matériels. L'université a ainsi obtenu 100.000 euros dans le cadre du contrat de plan État-Région pour financer la création de l'une de ses quatre salles d'innovation pédagogique.

Au menu des nouveautés, un centre d'aide à la réussite des étudiants (Care) a été créé pour encourager une synergie autour des pratiques pédagogiques innovantes. Un appel à projets devrait également être lancé prochainement pour booster les innovations, et des moyens devraient être déployés auprès des élèves de l'Espé (école supérieure du professorat et de l'éducation) voisin.

Une plate-forme UMotion, destinée à regrouper toutes les productions audiovisuelles de l'université et à les référencer par catégories, a également été inaugurée récemment. Cours, colloques, conférences... 400 vidéos sont déjà en ligne. "Cette plate-forme est une vitrine, se réjouit le président. Elle assure l'e-réputation de notre établissement. C'est important qu'une université ne soit pas fermée sur elle-même."

Émilie Weynants | Publié le