Universités et écoles se mobilisent pour l'accueil des réfugiés

Isabelle Maradan Publié le
Universités et écoles se mobilisent pour l'accueil des réfugiés
150 chambres ou logements des Crous seraient disponibles en Île-de-France et 200 en région. // ©  Denis Allard / R.E.A
L'enseignement supérieur veut prendre toute sa part dans l'accueil et l'accompagnement des réfugiés et le fait savoir. Au regard de leur expérience d'accueil des étudiants étrangers parfois en situations difficiles, les établissements ne doutent pas de leur capacité à trouver la meilleure méthode. Au-delà du discours. Au cas par cas.

Mobilisation générale ? Dans l'enseignement supérieur aussi l'onde de choc provoquée par la publication, le 2 septembre, de la photo d'Aylan Kurdi, garçon syrien de trois ans mort noyé alors qu'il fuyait la guerre avec sa famille, a remis la question de l'accueil et de l'accompagnement des réfugiés en tête des sujets brûlants.

Le 8 septembre 2015, la CPU et le Cnous ont pris position : "François Hollande vient d'engager notre pays à mettre en place, en accord avec ses homologues européens, un mécanisme permanent et obligatoire d'accueil des réfugiés, au cours des prochaines années. La France a une tradition d'asile. Il est naturel et conforme à cette tradition d'asile que les universités françaises et les Crous s'engagent dans ce mécanisme".

Cours de FLE (français langue étrangère), logements, bourses et accompagnement personnalisé pour les étudiants… Tels sont les besoins des réfugiés impliquant l'enseignement supérieur. Et les communiqués de presse d'universités et d'écoles appelant à rejoindre le mouvement de solidarité ne se sont pas fait attendre. "Tant mieux si la conscience collective se réveille", souligne Alain Beretz, président de l'université de Strasbourg.

UN ACCOMPAGNEMENT sur-mesure

Après les déclarations d'intention, l'action. Mais universités et écoles ne sont pas démunies. "On parle aujourd'hui des étudiants qui vont arriver dans le cadre d'un conflit, mais, nous accueillons des internationaux au quotidien", explique Yves Jean, président de l'université de Poitiers, avant d'évoquer, notamment, "les mobilisations régulières pour aider les étudiants étrangers qui recevaient des OQTF (obligation de quitter le territoire français) avant l'abrogation de la loi Guéant".

Même retour d'expérience pour Alain Beretz : "parmi les 20% d'étudiants étrangers, il y en a toujours eu dans situations difficiles et complexes. Chaque université est capable de solidarité."

Il y a toujours eu des étudiants étrangers dans des situations difficiles. (A. Beretz)

Bertrand Monthubert, président de Toulouse 3, insiste sur la nécessité de mobiliser les étudiants "pour accueillir et aider" et envisage également de s'appuyer sur les professeurs émérites pour susciter des bonnes volontés chez les enseignants retraités.

Pas question de plaquer un ensemble de mesures d'accueil et d'accompagnement prédéfinies, en imposant un nombre d'heures de FLE ou les mêmes cours de soutiens à tous les étudiants réfugiés. Aujourd'hui comme hier, les établissements veulent faire du sur-mesure. Une dizaine d'étudiants syriens et érythréens font ainsi déjà leurs études à Poitiers. Yves Jean, qui préside l'université depuis 2012, estime qu'il leur a fallu "quatre à cinq mois pour être à l'aise dans leurs études", "grâce à des cours de français dédiés et des cours de soutien spécifiques".

En partenariat avec les villes et les associations étudiantes

Pas question non plus pour les établissements d'agir seuls. À Toulouse 3, Bertrand Monthubert prévoit de mener des actions de soutien en lien avec l'Afev (association pour la fondation des étudiants pour la ville). Son université a également pris contact avec les maires accueillant des réfugiés pour "commencer à construire des réponses adaptées".

À l'autre bout de la France, Alain Beretz s'inscrit dans la même démarche : "L'Unistra va œuvrer de concert avec les structures d'accueil des réfugiés et la ville de Strasbourg, très mobilisée."

Les Crous en première ligne

La question des moyens reste sensible... mais pas rédhibitoire. Pour le président de l'université de Strasbourg, "des crédits supplémentaires pour les aides financières et les logements seraient bienvenus". Yves Jean attend, lui, des engagements du Crous pour "voir s'ils mettent à disposition des chambres universitaires". Mais le premier assure qu'il pourrait "se débrouiller sans", quand le second compte sur "la solidarité des habitants de Poitiers pour faire la transition, si nécessaire".

"Pour y voir plus clair", une réunion coordonnée par la Dreic (Délégation aux relations européennes et internationales et à la coopération) avec l'ensemble des acteurs de l'enseignement supérieur et les Crous s'est tenue vendredi 11 septembre 2015. Jean-Paul Roumegas, sous-directeur au Cnous, a participé à cette réunion : "les préfets et les recteurs vont travailler en tandem pour orienter les personnes par rapport à leurs demandes. Les services sociaux des Crous, des universités et des écoles doivent répondre en priorité aux demandes des étudiants réfugiés." Une adresse dédiée etudiantrefugie@cnous.fr a été créée.

Et de poursuivre : "L’accompagnement pour orienter est aussi important que les aides financières". Les Crous comptent s’appuyer sur les aides d’urgence qu’ils octroient déjà pour accompagner les étudiants réfugiés dans la limite de 1600 euros par étudiant. Le budget global des aides ponctuelles permettant de répondre à la demande sociale et aux situations d'urgence est de 44,8 millions d'euros en 2015. Pour les logements, "le parc n’est pas saturé partout", assure Jean-Paul Roumegas.  Il recense 150 chambres ou logements disponibles en Île-de-France et 200 en région. "Les logements d’urgence leur seront destinés en priorité et si cela ne suffit pas, nous pourrons aussi remettre à plus tard des travaux prévus dans certaines résidences." La mobilisation est en marche…

Isabelle Maradan | Publié le