USA : l’éducation échappe au gel des dépenses

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Le budget 2011 du président Obama fait la part belle à l'éducation. En pleine crise, il propose une augmentation de 31 % par rapport à 2010 de la somme consacrée à ce secteur. Décryptage de ce budget, vu de l'ambassade de France aux Etats-Unis (Washington DC). Un texte signé Pascal Delisle, attaché culturel, et Isabelle Schöninger.

En phase avec les priorités du plan de relance adopté au début de sa présidence, la proposition de budget 2011 du Président Obama (exercice d'octobre 2010 à septembre 2011), présentée le 1er février, fait de l'éducation sa principale exception au gel annoncé des dépenses discrétionnaires, hors dépenses de sécurité nationale.

Avec 31 % d'augmentation par rapport à 2010 (78 milliards de dollars en 2011 contre 59 milliards de dollars en 2010), le budget de l'éducation reflète la conviction maintes fois réaffirmée selon laquelle l'éducation est non seulement le fondement du renouveau de l'économie américaine mais aussi le "meilleur investissement contre la pauvreté".

Si l'essentiel de l'augmentation du budget de l'éducation (tous niveaux confondus) concerne en 2011 les "Pell grants" permettant aux jeunes de milieux modestes de poursuivre des études universitaires, le projet de budget 2011 reflète une approche globale des questions de formation depuis la maternelle jusqu'au doctorat en passant par le recrutement et la formation des professeurs.

Renforcement du programme « Pell grants » de bourses en faveur des étudiants modestes

Pour ce qui est de l'enseignement supérieur, l'élément majeur concerne en effet le soutien aux pell grants, le principal programme de bourse en faveur des étudiants de milieu modeste ; avec 2 milliards de dollars supplémentaires par rapport au budget 2010, plan de relance compris, le gouvernement y consacrera 34,9 milliards de dollars contre 19 milliards en 2008, soit un quasi-doublement depuis l'arrivée du Président Obama, l'ensemble représentant près de 44 % du total du budget fédéral dédié à l'éducation.

Partant d'un montant de 5500 dollars en 2010, il s'agit d'abord d'indexer ces bourses de façon plus favorable qu'auparavant (indexation à l'indice des prix à la consommation plus 1 point de pourcentage). Face aux besoins accrus de soutien financier de la part des étudiants et de leurs familles, la proposition budgétaire permettrait également d'accorder des bourses à près de 9 millions d'étudiants au cours de l'année 2011-2012, soit un million de plus qu'en 2009.

Certains autres programmes d'aide aux étudiants seront simplement maintenus ("Trio" et "Gear up" avec des financements respectifs de 910 et 323 millions de dollars), certains seront cependant diminués ("National Endowment for the Humanities", voire supprimés (Programmes "Leap" et le "Robert C . Byrd Honors Scholarship") dans un souci de non duplication et de non dispersion des moyens.

Prêts étudiants, soutien aux Community colleges, aide aux Etats en difficulté financière

D'autres éléments de la politique proposée par le Président Obama, dont l'impact budgétaire n'est pas toujours immédiat ni proportionnel à leur importance relative, méritent d'être soulignés :
- Une augmentation de 1.1 milliard de dollars du programme de prêts Perkins à taux bonifiés, destinés aux étudiants de milieux modestes, qui portera l'aide à 6 milliards de dollars par an ;
- Dans une logique de mise à disposition des fonds fédéraux sur mécanismes d'appels à propositions, un fonds de 3.5 milliards de dollars est institué sur une période de 7 ans en direction des Etats, institutions d'enseignement supérieur et autres organisations soutenant les stratégies innovantes ayant pour but d'augmenter le nombre et le pourcentage d'étudiants entrant à l'université et recevant un diplôme ;
- l'Administration américaine prévoit également dans la même logique avec l'"American Graduation Initiave" d'amener une plus grande proportion de sa jeunesse vers une formation universitaire, pour cela les Community Colleges disposeront d'un soutien financier de l'ordre de 10.6 milliards de dollars sur 10 ans avec pour objectif d'avoir 5 millions d'étudiants diplômés en plus d'ici à 2020.
- enfin le projet de budget 2011 prévoit 25 milliards de dollars à destination des Etats en difficulté financière, fonds qui pourraient en partie, comme dans le cadre du plan de relance, bénéficier au secteur de l'éducation en complétant les fonds des Etats fédérés mais il est trop tôt pour savoir à quoi ces fonds seront utilisés.

Poursuite de la réforme des prêts étudiants fédéraux

Hors budget à proprement parler, il est important de souligner la poursuite d'une initiative majeure de l'Administration Obama, en partielle continuité de l'Administration Bush, sur la réforme des prêts étudiants fédéraux. Après un vote favorable à la Chambre, l'Administration doit désormais faire adopter par le Sénat la loi "Student Aid and Fiscal Responsibility Act" qui fera du gouvernement fédéral et non plus des banques (subventionnées pour cela) l'institution octroyant les prêts étudiants à conditions préférentielles.

Cela s'accompagnera d'une amélioration des conditions de prêts de façon à encourager les études supérieures en cessant de subventionner les banques privées pour faire cela, le gouvernement devrait également faire une économie cumulée de 87 milliards de dollars qui seront utilisés selon les indications du budget prévisionnel 2011 au bénéfice du développement de l'enseignement pré-primaire particulièrement peu développé aux Etats-Unis.

Adapter la structure décentralisée américaine dans le secteur éducatif

Ainsi, la proposition de budget 2011 reflète une ambition forte de l'Administration Obama pour l'ensemble de la filière éducative. Au-delà de l'effort budgétaire sans précédent, on voit une volonté - plus explicite encore sur la partie consacrée à l'enseignement primaire et secondaire - d'harmonisation et de diffusion de bonnes pratiques de façon à limiter les coûts liés a la fragmentation Etat pat Etat, district par district d'une grande partie des politiques éducatives du pays.

Le recours aux mécanismes d'appel à propositions/projets, à destination des Etats ou institutions d'enseignement permet au gouvernement fédéral d'agir progressivement sans pour autant mettre en cause la nature décentralisée qui caractérise le pays dans ce domaine comme dans d'autres. On peut penser que cette combinaison cohérente d'ambition globale et de subsidiarité devrait permettre à cette proposition de budget de passer les étapes législatives sans difficulté majeure, de la même manière que le Secrétaire à l'Education, Arne Duncan, avait reçu un très large soutien bipartisan lors de sa confirmation.

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Sources :

- "Obama's 2011 Budget Proposes More Money for Education and Research", The Chronicle of Higher Education, 1er février 2010, Paul Basken et Libby Nelson.
- "Obama's Budget Makes Education a Major Exception to Austerity", The Chronicle of Higher Education, 1er février 2010, Paul Basken.
"Despite Spending Freeze, Obama Proposes More Money for Research in His 2011 Budget", The Chronicle of Higher Education, 1er février 2010, Libby Nelson.
- "Higher Education Funding in President Obama's FY 2011 Budget", The Marketplace of Ideas, 4 février 2010, Mark Kantrowitz.
- "The Education Exception", Inside Higher Ed, 2 Février 2010, Doug Lederman
- "Education Department would see 9.7 percent rise in discretionary spending", The Washington Post, 1er février 2010, Nick Anderson

- The White House Government: http://www.whitehouse.gov/omb/budget/fy2011/assets/education.pdf
- US Department of Education : http://redirectix.bulletins-electroniques.com/9VGmr

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