Des « PRES » pas si près... du but

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Selon une enquête de la Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (CDEFI) sur les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES), de nombreuses écoles d’ingénieurs ressentent un sentiment d’ostracisme. Mis à part quelques cas exemplaires, les PRES génèrent des frustrations et réveillent des querelles intestines tant dans les écoles qu’au sein des universités.

Pas d’invitation à la table des négociations

La CDEFI a procédé à un rapide sondage auprès de ses écoles d’ingénieurs – auquel ont répondu la moitié de ses adhérents (77 établissements). Interrogées sur leur situation par rapport à la mise en oeuvre et le fonctionnement des PRES, les écoles ont fait valoir un sentiment d’incertitude ou d’inquiétude (28 %) ou précisé qu’elles n’étaient pas impliquées directement (15 %) ou tenues à l’écart (9 %) ou encore mal associées (8 %).

« Les écoles prestigieuses sont d’office partie prenante des PRES, mais les autres établissements sont ignorés, même quand ils viennent frapper à la porte », déplore Dominique Breuil, directeur de la recherche à l’EIGSI (École d’ingénieurs en génie des systèmes industriels de La Rochelle) et membre de la commission recherche à la Conférence des grandes écoles. C’est le cas, par exemple, de Centrale Marseille dont le directeur ne décolère pas. 

Certains présidents choisissent leurs ouailles...

Pour Jacques Fontanille, président de l’université de Limoges et de la commission recherche à la Conférence des présidents d’université (CPU), ce constat n’a rien d’étonnant. « Le mouvement de constitution des PRES était au départ un projet de la CPU, rappelle-t-il. Il est donc légitime que les universités débattent entre elles, puis se retournent avec des délais plus ou moins longs vers les écoles d’ingénieurs selon la nature de leurs relations. » Dans la région Poitou-Charentes justement (qui doit créer un PRES avec le Limousin et le Centre), l’ENSMA est partie prenante des débats constitutifs du PRES, alors que d’autres écoles restent à l’écart. « La première a toujours était très imbriquée dans les projets de recherche avec l’université, souligne Jacques Fontanille, tandis que d’autres écoles sont beaucoup plus autonomes. Et puis, les PRES peuvent prendre différentes formes et s’appuyer sur diverses compétences sans s’associer nécessairement à une école d’ingénieurs. » 

... quand d’autres se chamaillent

« Les PRES ont tout simplement un effet détonateur là où les écoles et les universités s’ignorent depuis longtemps, résume Paul Jacquet, premier vice-président de la CDEFI, et là où les universités ne s’accordent pas entre elles. » Dans l’étude de la CDEFI, les écoles des académies d’Amiens, Besançon, Dijon et Limoges confirment qu’elles ne participent pas au PRES « au motif que les universités ne parviennent pas encore à s’entendre sur les contours qu’il doit prendre ».

Dans l’académie de Bordeaux, la rumeur laisse entendre que les débats entre les présidents porteraient sur un très vieux tampon intitulé « Universités de Bordeaux » sur lequel personne ne s’accorde pour supprimer le « s » ! La communication entre les universités bordelaises est devenue un modèle du genre. « Pour le moment, les échanges ne se font qu’au téléphone », rapportent les étudiants élus. Ces différentes situations de blocage agacent, notamment au ministère, sans qu’une intervention extérieure soit possible.

Pour la CPU, il n’est pas question d’imposer aux facs un schéma ou un calendrier. « Le PRES est un couteau suisse qui s’adapte aux différentes situations, lance Thierry Coulhon, deuxième vice-président de la CPU et président de l’université de Cergy-Pontoise. Il s’agit d’un dispositif expérimental et les remous sont incontournables. » De son côté, la CDEFI entend aider ses écoles à être partie prenante des pôles. Elle va donc prendre son bâton de pèlerin, via sa commission Territoires, pour aller sur place jouer les pacificateurs.

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