« Après ma mutation dans un collège difficile, j’avais besoin de raconter mon quotidien », explique Tiphaine, professeur de français, qui a ouvert son blog en 2004.
Dire les difficultés et plaisirs du métier
« C’est un métier qui accapare beaucoup, témoigne P'tite Maikress, professeur des écoles en ZEP qui s’est lancée dans l’aventure l’an dernier. Cela fait du bien de mettre ce qu’on vit par écrit ». Si les enseignants qui tiennent un blog sous la forme d’un journal intime sont encore peu nombreux, la plupart d’entre eux exercent dans une zone défavorisée et veulent en montrer toutes les facettes. « Dans les journaux, on parle davantage des agressions que des choses positives qui font que j’ai envie de continuer à travailler dans ce collège », juge Tiphaine.
Le blog permet aussi de rompre un certain isolement. « L’enseignement est un milieu assez cloisonné et on a besoin de dire les difficultés et les plaisirs de ce métier », constate Charly, qui « vide son cartable » sur son blog. Jack, professeur des écoles, conçoit son blog de dessins comme un « miroir où les enseignants se retrouvent », tandis que P’tite Maikress dit y puiser une « reconnaissance » qu’elle n’a pas forcément à l’école.
Que dit la loi ?
Si cette forme d’expression est encore peu répandue, c’est qu’elle se heurte au devoir de réserve du fonctionnaire, une notion précisée sur Legamedia, site juridique dépendant du ministère de l’Education nationale. « C’est aussi délicat qu’un blog de médecin qui parlerait de ses patients», commente Serge Pouts Lajus, spécialiste des TICE chez Education et territoires et co-fondateur du Café pédagogique . En 2006, un proviseur de Mende (Lozère) avait été suspendu de ses fonctions à cause de son blog. Plus récemment, une enseignante de l’académie de Versailles a reçu un blâme pour la même raison. Du coup, les auteurs multiplient les précautions. « J’ai donné l’adresse de mon blog à mes collègues et à la hiérarchie de mon collège, précise Tiphaine. Mais mes élèves ne sont pas au courant ». A en croire les cellules juridiques des syndicats, peu d’enseignants ont recours à leurs services pour des blogs, sauf en ce qui concerne les droits d’auteurs ou les photographies des élèves publiées sur des blogs pédagogiques.
Un outil pédagogique
Car cette seconde famille est beaucoup plus présente sur le web. D’après Vincent Olivier, fondateur du Webpedagogique , plate-forme de 2500 blogs éducatifs, il se crée 100 nouveaux blogs pédagogiques sur son site chaque semaine, majoritairement tenus par des enseignants. « Le blog a des vertus intrinsèquement pédagogiques, estime-t-il. Il est simple à utiliser, permet d’utiliser le son et la vidéo et d’interagir avec ses élèves. C’est un complément du cours qui montre que le professeur a aussi une valeur en dehors de la classe ».
Trois usages sont possibles : le blog comme prolongement du cours, le blog permettant de communiquer avec les parents ou les élèves et le blog créé pour la classe, permettant aux élèves d’en être les co-auteurs. « C’est un formidable outil pour réconcilier les jeunes avec l’écriture », estime Serge Pouts Lajus, persuadé que cet usage va continuer à se développer.
Des blogs comme vitrines d'expériences
La dernière catégorie de blogs, plus éparse, pourrait faire office de boîte à outils. Comme des conseillers principaux d’éducation qui partagent leurs expériences sur un blog transformé en site, des documentalistes qui font part de leurs ouvrages préférés ou des parents qui montrent comment se déroule l’école à la maison. On peut également citer le site Intellego qui propose aux enseignants, aux élèves et aux parents de créer leur propre blog de soutien scolaire.
