Évaluer, c’est d’abord choisir pourquoi évaluer

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La fréquente confusion des fonctions de l’évaluation

Le cas évoqué en introduction livre implicitement plusieurs objectifs de niveaux différents et variés selon les acteurs en présence.

Pour l’enseignant :

– satisfaire une obligation de moyenne dans sa discipline sur un livret scolaire, en alignant assez de notes chiffrées sur son carnet dans un temps limité ;

– se conformer intuitivement à un modèle mathématique (la distribution aléatoire de données suivant une courbe en cloche) devant restituer le classement des performances de ses élèves ;

– noter la production écrite comme significative de l’atteinte de compétences élaborées pendant les cours (de préférence).

Pour l’élève :

– répondre une fois de plus à l’exigence d’une évaluation sommative régulière ;

– décoder avec les moyens qui sont les siens les attentes trop implicites de l’exercice, de l’enseignant, de la discipline concernée ;

– tenter de pondérer un résultat qu’il ne maîtrise pas, vu l’addition, la multiplication, la division des notes, tempérées par des coefficients variés et secrets, véritable alchimie entre les mains de son enseignant préféré.

Plusieurs questions de fond restent en suspens, dans le désordre : faut-il tout noter ? Évaluer, est-ce (toujours) noter ? Pourquoi évaluer ? Qu’est-ce qu’évaluer ? Comment évaluer ?

           

Définir la fonction de l’évaluation

L’hypothétique fiabilité de la note. Dans la pratique, l’évaluation sommative a contaminé tout rapport entre enseignant et élèves. Un principal de collège de moyenne importance avait calculé le nombre appro­ximatif de notes chiffrées délivrées au cours d’une année scolaire : sur les seuls bulletins trimestriels, près de 18 000 notes, mais rapporté aux nombres de notes dans les disciplines, près de 90 000 notes. On espère qu’elles ont toutes une fonction bien assurée et bien comprise. Cet usage cependant pose aujourd’hui problème, tant par sa masse que par sa fiabilité, par une perte de sens et aussi notamment en matière d’orientation scolaire et professionnelle : qui pourrait dire à quelles compétences renvoie une note de 8,74/20 ?

Une définition générique. Il y a lieu d’abord de revenir à une définition de l’acte lui-même. Car si les pratiques s’imposent aux enseignants, jeunes et moins jeunes, par reproduction d’expériences (subies ?), par routine, par formation sur le tas, il est très rare que l’acte soit remis en questionnement et en sens. On peut s’appuyer sur la définition proposée par Stufflebeam assez large pour englober toute pratique : ­« processus­ [1] par lequel on définit [2], obtient [3] et fournit [4] des informations [5] utiles [6] permettant de juger les décisions possibles [7] » :

[1] processus = activité continue

[2] on définit = identifier les informations pertinentes

[3] on obtient = collecter, analyser, mesurer des données

[4] on fournit = communiquer ces données

[5] des informations = faits à interpréter

[6] informations utiles = qui satisfont aux critères de pertinence

[7] décisions possibles = actions d’enseignement, d’orientation, etc.

Rien n’est dit sur la façon de noter ou d’effectuer des calculs de moyennes. Il s’agit d’extraire de la valeur d’un acte, d’un travail, au regard de décisions : l’évaluation est ou doit être finalisée.

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