Faut-il encore former les journalistes ?

INA Publié le
Faut-il encore former les journalistes ?
22558-media-morphoses-original.jpg // © 

«Faut-il encore former les journalistes ? », interpelle le dernier numéro de la revue Médiamorphoses (n° 24, octobre 2008). Oui répondent sans hésitation les deux coordonnateurs du dossier, Frédéric Lambert et Camille Laville. Une réponse étayée par un sommaire étoffé, somme de réflexions pour tous les professionnels concernés.

Les écoles interpellent le rôle des entreprises

Une première partie, «Peut-on penser l’école idéale ? », donne la parole à plusieurs directeurs d’école tels Denis Ruellan (IUT de Lannion), Daniel Deloit (ESJ Lille) ou Rémy Rieffel, (Institut français de la presse, Paris 2). Ce dernier replace le débat dans le contexte actuel : «une précarisation croissante de la profession, une pression grandissante des communicants, et, plus récemment, une concurrence accrue des journalistes amateurs.» Denis Ruellan estime quant à lui que l’école idéale passe par «une relation apaisée avec les entreprises, lesquelles ne confondraient pas stage et remplacement de titulaires ; encadreraient les stagiaires par des professionnels avisés et un peu disponibles, donneraient aux écoles des indications sur leurs attentes et pratiques en matière de recrutement et s’intéresseraient à la participation de leurs salariés à l’enseignement. »  

Les petits soldats du journalisme, une main d’œuvre trop chère ?  

Une interpellation que l’on retrouve dans la bouche de Jacqueline Papet, membre de la CNPEJ (Commission nationale paritaire de l’emploi des journalistes) en charge de la reconnaissance des écoles. Interpellée sur le fait que seulement 14,5 % des nouveaux titulaires de carte de presse sont issus de l’un des douze cursus reconnus par la profession, celle-ci évoque la précarisation du métier. « Si les patrons recrutent aussi souvent hors des écoles reconnues, ce n’est pas seulement parce qu’ils accusent les écoles de formater leurs étudiants, mais aussi parce qu’en recrutant hors écoles, ils ont une main d’œuvre plus précaire et donc moins exigeante. »

De la diversité dans les écoles

Une enquête statistique édifiante sur le profil scolaire et l’origine sociale des élèves des écoles reconnues met en valeur différentes tendances (féminisation, hiérarchie entre filières plus ou moins prestigieuses en fonction de leur niveau d’entrée…) mais pose surtout la question du droit d’entrée social dans ces écoles. Les deux auteurs, Géraud Lafarge et Dominique Marchetti, rappellent combien «la composition sociale du public des écoles de journalisme est très proche de celle des prépas aux grandes écoles », un constat qui ne peut manquer d’interpeller sur la diversité et la représentativité du quatrième pouvoir.  

Egalement au sommaire de Médiamorphoses, les nouvelles formes numériques du journalisme ou les situations de l’enseignement du métier à l’étranger, dans des pays aussi différents que le Canada, le Brésil, l’Egypte ou le Sénégal. Au final, ce numéro de Médiamorphoses aurait trouvé d’utiles compléments avec d’autres articles portant notamment sur la question du financement des écoles (quid de la taxe professionnelle comme moyen de financement des filières ?) ou sur les nouvelles formes de formation comme l’apprentissage. Pour un prochain numéro ?

Mathieu Oui

INA | Publié le