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Formation des enseignants : des avancées positives mais un calendrier très contraint

Amélie Petitdemange Publié le
Formation des enseignants : des avancées positives mais un calendrier très contraint
La réforme de la formation des professeurs des écoles est prévue pour la rentrée 2026. // ©  Seventyfour / Adobe Stock
La réforme de la formation des professeurs des écoles se précise, en vue de la rentrée 2026. Si les grands axes annoncés par le gouvernement n'ont pas surpris et si certains points font consensus, les syndicats alertent sur le calendrier contraint et le manque de concertations.

Le gouvernement a annoncé, le 28 mars, une nouvelle réforme de la formation des enseignants. Initialement prévue pour la rentrée 2025, cette réforme controversée avait été mise en pause, après la dissolution de l’Assemblée nationale, en juin 2024.

Alors qu’un temps de concertations est prévu jusqu’au 21 mai, les pistes annoncées par le gouvernement semblent déjà bien tracées. La mise en place de la réforme est, en effet, prévue dès la rentrée 2026.

Une licence Professorat des écoles (LPE) serait ainsi accessible à la rentrée 2026, sur Parcoursup, pour les candidats souhaitant poursuivre dans un master préparant au professorat dans le premier degré, le MEEF (master de l'enseignement, de l'éducation et de la formation). Les titulaires de cette licence bénéficieraient d’une "fast track" : ils seraient dispensés de passer les épreuves écrites.

Les autres candidats passeraient toujours, quant à eux, des épreuves écrites et orales.

Un concours avancé à la fin de la licence 3

Autre changement : alors qu'aujourd'hui, les étudiants passent le concours de recrutement en fin de master, il sera déplacé à la fin de la licence, dès le printemps 2026. Pour préparer le concours, des modules doivent être organisés en L3, dès la rentrée 2025.

Le statut de fonctionnaire dès le master

En outre, les étudiants de master seront désormais sous le statut de la fonction publique. En master 1, les "élèves fonctionnaires" percevront une rémunération mensuelle de 1.400 euros nets, puis de 1.800 euros pour les "fonctionnaires stagiaires" de M2.

Ce statut induira l’obligation d’exercer le métier d'enseignant durant quatre ans. C’est le recteur d’académie qui proposera un contrat aux étudiants dont le stage a été évalué positivement.

Des points de consensus

Sup'Recherche-UNSA, la Fage et le réseau des Inspé (Institut national supérieur du professorat et de l'éducation) sont en accord avec plusieurs points de la réforme. Le déplacement du concours à bac+3 est ainsi bien accueilli. Le master MEEF est en effet très chargé pour les étudiants, qui doivent valider leurs cours, réaliser un mémoire, et préparer le concours.

Alain Frugière, président du réseau des Inspé, pointe cependant le flou autour de l’affectation des lauréats du concours. "Quels seront les choix laissés aux étudiants ? Et comment seront-ils croisés avec l’offre des universités ? Nous n’avons pas de réponse à ce niveau-là", souligne-t-il.

Le passage des étudiants de masters sous le statut de la fonction publique est aussi une avancée positive. Maé Bouteille, vice-présidente de la Fage en charge des politiques jeunesse, se réjouit de "l’argent débloqué pour l’indemnité en M1 et M2".

La Fage reste cela dit perplexe quant à l’obligation d’exercer durant quatre ans. Alors que cette réforme vise à enrayer la crise d’attractivité du métier, ce point pourrait être "contre-productif". Elle préconise de laisser le choix aux étudiants entre le modèle proposé par le gouvernement, ou bien une indemnité moindre de 700 euros en M1 et 900 euros en M2, qui ne serait pas assortie d’une obligation d’exercer.

Une formation longue saluée par les Inspés

Autre motif de satisfaction pour les Inspé : la formation initiale reste assurée par les établissements d’enseignement supérieur. Par ailleurs, les Inspé, qui pourront être associés à la nouvelle licence professorat des écoles, se réjouissent de la création d’une licence dédiée. Ce continuum de formation en cinq années, de la L1 au M2, est "une revendication de longue date" du réseau des Inspé, rappelle Alain Frugière.

Il s’interroge tout de même quant à l’accompagnement vers certains métiers qui n’ont pas de licence identifiée, comme conseiller d’éducation ou professeur documentaliste.

La Fage est plus sceptique quant au principe de cette licence. "C’est dur de savoir ce qu’on veut faire dès la sortie du bac. Cette licence devait permettre plus de perméabilité entre l’enseignement dans le premier ou dans le second degré", plaide Maé Bouteille. Plutôt qu’une licence professorat des écoles, la Fage propose des parcours préparatoires au professorat, accolés à d’autres mentions de licence. Ce fonctionnement, sur le modèle de la licence accès santé (LAS), faciliterait la réorientation.

Les syndicats déplorent le manque de concertations

Cette nouvelle mouture de la formation des enseignants est quasiment identique à celle annoncée en avril 2024. Les syndicats dénoncent ainsi une concertation fictive. "Nous avons été peu, pour ne pas dire pas consultés", regrette Virginie Saint-James, secrétaire générale de Sup'Recherche-UNSA.

Les groupe de travail auxquels sont conviés les syndicats jusque fin mai sont d’ailleurs intitulés "présentation". La FSU, FO, la CGT Educ’action, le SNALC et SUD Education ont ainsi quitté la table des concertations, le 2 avril dernier, tant la réunion était une présentation de la réforme plutôt qu’une consultation, indiquent-ils. La Fage n'avait pas été conviée à ces rencontres.

Un calendrier bien trop serré

Virginie Saint-James s’interroge également sur le calendrier "extrêmement contraint" pour la mise en place de la réforme. Une inquiétude partagée par le syndicat étudiant la Fage, qui demande un report de la première édition du concours à bac+3 en 2028.

"Nous avons des étudiants actuellement en L2 qui viennent d’apprendre qu’ils vont passer un concours dès la L3. Il faut aussi laisser le temps aux enseignants de préparer les modules de préparation aux concours", explique Maé Bouteille.

Un adossement à la recherche insuffisant

Un autre point de vigilance, partagé par le réseau des Inspé, la Fage et Sup'Recherche-UNSA, est la place de la recherche dans la formation. Pour l’instant, le master comprend un mémoire de stage, mais pas de mémoire de recherche. "Nous n’avons pas de garantie que les enseignements seront délivrés par des enseignants chercheurs", s’inquiète Maé Bouteille.

Le Réseau des Inspé estime enfin que le nombre d'heures est trop conséquent dans les nouvelles maquettes du master. Il portera ce point lors des concertations dont il fait partie, sur l’offre de formation en master pour les lauréats du concours.

Amélie Petitdemange | Publié le