L'écologie bientôt intégrée aux programmes des universités ?

Cécile Marchand-Ménard Publié le
L'écologie bientôt intégrée aux programmes des universités ?
L'association "la Fresque du climat" intervient dans les établissements du supérieur pour sensibiliser les étudiants aux questions climatiques. // ©  la fresque du climat
Un an après la signature par plus de 150 établissements d'un manifeste pour un "réveil écologique" lancé par des étudiants, les initiatives se multiplient pour intégrer les enjeux climatiques dans les cursus des universités françaises.

Le réveil écologique a-t-il eu lieu dans les universités ? Si les initiatives se multiplient pour intégrer les enjeux climatiques, les universités doivent aller plus loin pour répondre aux revendications des jeunes générations.

L'heure de la sensibilisation

À la rentrée 2020, tous les étudiants en deuxième année de licence à Paris Dauphine-PSL bénéficient d’un programme obligatoire consacré au développement durable. "Il s’agit d’un cours annuel consacré aux enjeux climatiques. Plusieurs enseignants chercheurs interviennent afin d’aborder ces questions sous différents angles. L’urgence climatique soulève des questions complexes qui mobilisent de nombreuses disciplines", explique Isabelle Catto, vice-présidente licence et affaires académiques à PSL.

Depuis son arrivée à la présidence de l’Université de La Rochelle en 2016, Jean-Marc Ogier va encore plus loin en transformant l’offre de formation. "Nous avons dissout nos facultés disciplinaires historiques et offrons désormais des parcours qui combinent des majeures et des mineures. Nos licences comportent une couche de sensibilisation au développement durable", affirme le président.

L’urgence climatique soulève des questions complexes qui mobilisent de nombreuses disciplines (I. Catto)

Au niveau master et doctorat, tous les étudiants sont également formés au développement durable en zone côtière. "Nous comptons notamment des cours spécialisés sur la construction en zone côtière qui intègrent la question de la durabilité des matériaux", détaille Jean-Marc Ogier.

2020 : année de bascule pour les universités

En mars 2019, une étude du think tank Shift Project réalisée auprès de 34 établissements d’enseignement supérieur a révélé que seules 11% des formations analysées abordent les enjeux climatiques dans un tronc commun. Un an plus tard, Benoît Marienval, référent de l’opération "Rentrée climat" pour l'association La Fresque du climat, est plus optimiste : "L’interdisciplinarité des enjeux climatiques est désormais plus évidente. Nous travaillons de plus en plus avec des établissements qui revoient leurs programmes pour y intégrer un volet environnemental".

Pour la seconde année, il intervient dans les établissements d’enseignement supérieur dès septembre pour une "Rentrée climat". Objectif : aborder de manière ludique les causes et conséquences des changements climatiques. En un an, le nombre de participants a quadruplé. "L'année 2020 marque un tournant. Les établissements sont plus alertes sur les enjeux climatiques et le rôle qu’ils peuvent jouer", se réjouit Benoît Marienval.

Des revendications d'étudiants

"Un campus pourra être écolo dans son fonctionnement, réduire ses déchets et sa consommation énergétique. Néanmoins, si on y enseigne des concepts qui ne sont pas du tout adaptés aux enjeux du 21e siècle, c’est problématique", explique Hortense Foulon, coordinatrice du réseau "Campus responsables". Cette dernière met en relation et conseille les établissements désireux de mieux intégrer les enjeux climatiques.

Les établissements sont plus alertes sur les enjeux climatiques et le rôle qu’ils peuvent jouer. (B. Marienval)

Selon elle, ce changement n’est pas sans lien avec les revendications d’une nouvelle génération d’étudiants. "La place des marches pour le climat et des mobilisations dans les médias poussent les directions à soutenir davantage ces initiatives", constate Hortense Foulon.

"Nos futurs métiers vont être impactés par le réchauffement climatique et la transition écologique. Il est donc essentiel que nous développions un socle de connaissances et de compétences concernant ces enjeux", martèle Julie Pasquet, vice-présidente du Réseau français des étudiants pour le développement durable.

Selon elle, "c’est en comprenant les conséquences des dérèglements climatiques que nous pourrons agir pour un monde meilleur. L’intégration de ces enjeux, de manière obligatoire et transversale dans les formations est une demande criante", affirme l’étudiante.

Des changements "anecdotiques"

Mais elle déplore que seulement "quelques établissements changent leurs formations pour répondre aux demandes étudiantes, cela reste anecdotique". "Il est difficile de transformer une université en quatre ans, modère Jean-Marc Ogier. La solution pourrait être d’allouer des moyens supplémentaires pour faciliter cette transition".

Quelques établissements changent leurs formations pour répondre aux demandes étudiantes, cela reste anecdotique. (J. Pasquet)

Pour autant, la promotion de programmes intégrant les enjeux environnementaux semble faire son chemin jusqu’au ministère de l’Enseignement supérieur. En février dernier, la ministre Frédérique Vidal a confié au climatologue Jean Jouzel la direction d’un groupe de travail sur l’enseignement de la transition écologique dans le supérieur. Ses conclusions devraient être rendues publiques prochainement.

Cécile Marchand-Ménard | Publié le