La rénovation écologique du campus de l'Ecole hôtelière de Lausanne, source d'inspiration pour la France ?

Amélie Petitdemange Publié le
La rénovation écologique du campus de l'Ecole hôtelière de Lausanne, source d'inspiration pour la France ?
Le campus de Lausanne de l'EHL fait désormais 80.000 m2 et accueillera 815 étudiants. // ©  Amélie Petitdemange
Le campus de Lausanne de l’EHL a été agrandi de 55.000 m² pour la rentrée 2022. Il a été rénové dans une perspective écologique : panneaux photovoltaïques, sondes géothermiques, empreinte carbone compensée, jardin et rucher… Cette prise en compte des enjeux environnementaux devient la norme.

Après cinq ans de travaux, l'EHL (Ecole hôtelière de Lausanne) a agrandi et rénové son campus, passant de 25.000 m² à 80.000 m². Une rénovation écologique qui permettra d’accueillir 815 étudiants au total à la rentrée 2022.

Les architectes - qui ont travaillé main dans la main avec des étudiants en architecture - ont en effet pensé au renouvellement énergétique. Ainsi, 80% de l’énergie consommée sur le campus est renouvelable. Plusieurs procédés ont été utilisés, notamment des panneaux solaires couvrant une surface équivalente à trois piscines olympiques, 44 sondes géothermiques enfouies jusqu’à 400 mètres et de la récupération de chaleur sur les eaux usées.

L'école a d’ailleurs obtenu le label écologique minergie P, qui nécessite de respecter de nombreux critères en matière de renouvellement de l’air, de performance énergétique et d'isolation des bâtiments, ou encore d’autoproduction d’électricité.

Les architectes ont multiplié les espaces de vie communs.
Les architectes ont multiplié les espaces de vie communs. © Amélie Petitdemange

Végétaliser le campus

La nouvelle partie du campus comprend des infrastructures sportives, une cuisine d’application, une salle d’œnologie, des chambres de 16 m² et des espaces communs. Un jardin de 2.500 m², un rucher et une quarantaine de vignes complètent le tableau. "Cela permet d’insister sur l’importance de la saisonnalité et des circuits courts", explique Michel Rochat, le PDG du groupe EHL.

Le nouveau campus a aussi été conçu avec des matériaux de la région. "Nous avons fait le choix de matériaux proches. La pierre vient par exemple de Savoie. Finalement, l’aspect écologique n’a pas été insurmontable", raconte Virginie Reussner, chef de projet architecte.

La végétalisation locale a également été intégrée dans le campus. "Nous avons favorisé les échanges avec la faune. Le campus est ouvert, on y voit donc passer des animaux, comme des rongeurs et des renards". La nature est aussi visible depuis l’intérieur du campus. "Toutes les chambres sont orientées vers un espace vert", ajoute Laurent Gerbex, l’architecte chargé du projet de nouveau campus.

Le jardin comprend une serre ouverte aux étudiants.
Le jardin comprend une serre ouverte aux étudiants. © Amélie Petitdemange

Compenser l’empreinte carbone

À ce jour, 58% de l’empreinte carbone des cinq années de travaux a déjà été compensée. L’objectif est d’atteindre 100% d'ici 2024. "Nous travaillons avec une entreprise qui certifie des projets de compensation carbone. Nous avons par exemple choisi en Suisse un projet de gestion de la déforestation, et un autre pour remplacer des luminaires par des LED à Singapour [où l'école a un campus, NDLR]", explique Noémie Danthine, directrice de la stratégie et du développement durable à l'EHL.

La prise en compte de l'aspect écologique lors de la construction de campus devient de plus en plus importante, et cela au-delà de la Suisse. "Une rénovation de bâtiment ne se fera plus sans réfléchir aux éléments environnementaux, et les campus ne font pas exception. L’industrie hôtelière a longtemps traîné des pieds pour se mettre à agir, il y a encore beaucoup à faire", souligne Noémie Danthine.

"En France, il y a des universités extrêmement en avance et d’autres moins. Il y a plus d’inégalités selon les institutions", ajoute-t-elle. Des différences souvent liées aux budgets des établissements. C’est pourquoi l’État a selon elle un rôle à jouer à travers des subventions.

Échanger les bonnes pratiques durables

Elle prône par ailleurs l’échange de bonnes pratiques entre les établissements. "Il faut s’inspirer de ceux qui sont en avance. Pour la durabilité, il ne faut pas être compétitif mais travailler ensemble et s’entraider. Nous avons d’ailleurs une coalition avec l’université de Lausanne et l’école Polytechnique de Lausanne pour échanger sur ce sujet."

Pour l’architecte Laurent Gerbex, c’est une question de budget mais aussi d’image de marque. Si la rénovation écologique était innovante lorsque le projet a été lancé en 2012, il s’agit maintenant quasiment d’une norme. "Par exemple, nous venons de gagner un appel à projets pour un nouveau campus à l’école Polytechnique de Lausanne. Les bâtiments seront entièrement en bois."

Intégrer l’urgence climatique

Pauline Jochenbein, qui a travaillé sur le projet lorsqu’elle était étudiante en architecture, fait le même constat. "Avant, nous avions des commandes tournées vers l’esthétique ou le confort. Maintenant, la demande concerne des projets qui ont du sens à long terme et qui intègrent l’urgence climatique. Nous sommes convaincus qu’un campus ou tout autre élément doit désormais être pensé écologiquement."

Selon elle, le rayonnement de l’école hôtelière à travers le monde va inspirer et donner des envies. "Le courant écologique se développe beaucoup sur les campus, d’autres écoles vont sûrement entamer des démarches similaires."

Amélie Petitdemange | Publié le